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Le coup d’Etat de Mborantsuo du 14 novembre 2018 : Du grand art !

Profitant d’une lettre du Premier ministre qui lui demandait, non pas de modifier la Constitution, mais plutôt d’interpréter les articles 13 et 16 pour en tirer toutes les conséquences, Marie Madeleine Mbouranstouo, la « patrona » de la Cour constitutionnelle, en a profité, avec son petit monde, pour se substituer nuitamment au pouvoir constituant et au législateur. La Cour constitutionnelle a rendu une décision qui laisse dubitatif. Au lieu de régler un problème, elle en pose plutôt plusieurs et met même à mal la Constitution elle-même.

Les Gabonais non seulement ne comprennent pas cette réécriture de notre chère Constitution, mais aussi ne l’acceptent pas. D’aucuns parlent même d’un coup d’Etat constitutionnel. Assurer la continuité du service public est une préoccupation légitime du gouvernement et c’est ce qui est fait depuis toujours. La Cour constitutionnelle est allée au-delà de ses prérogatives. Après avoir réussi l’exploit, le 30 avril dernier, de faire raconter à la Constitution ce qu’elle ne dit pas (dissolution de l’Assemblée nationale et du gouvernement, transfert de tous les pouvoirs au Sénat), Mbourantsuo a, cette fois-ci, franchi le rubicon en réécrivant la Constitution pour éviter de constater la vacance du pouvoir ou l’empêchement définitif du chef de l’Etat. Elle a en effet créé et ajouté à la Constitution, à peine revisitée en janvier dernier par eux-mêmes, la notion d’« empêchement provisoire ». Une violation claire des dispositions de l’article 116 (L13/2003).

Un « complot » bien préparé pour gagner en temps…

L’information a circulé mercredi soir comme une trainée de poudre, à savoir que la Cour constitutionnelle allait faire une communication importante. Au vu de l’actualité politique brûlante du pays depuis que Boa est porté disparu en Arabie Saoudite (puisque faute d’image(s) de lui et de la sincérité apparente dans la communication de la présidence sur ce dossier), il était clair que celle-ci porterait sur l’imbroglio institutionnel consécutif à l’état de santé du chef de la junte putschiste Boa. Pour d’aucuns, il devait s’agir de la proclamation officielle des élections législatives et locales d’octobre 2018. Finalement, les réseaux sociaux se sont activés et l’information est tombée. Il s’agissait, pour la tour de Pise, de sauver une énième fois un régime sérieusement coincé, sinon qui court ces dernières heures de gloire de dictature et d’arbitraire au regard des doutes légitimes nourris par la présidence sur l’état de santé de Boa en Arabie Saoudite.
En effet, par requête datée du 13 novembre 2018, le PM Issoze Ngondet avait saisi la Cour non pas pour qu’elle autorise le vice-président de la République Pierre Claver Maganga Moussavou à présider les conseils des ministres, mais à interpréter les articles 13 et 16. En réalité, à aller dans un état de fait, le constat de la vacance à la présidence de la République du fait que seul le président de la République peut convoquer et présider le Conseil des ministres, sauf en cas d’une habilitation expresse. Cette saisine, en réalité, faisait suite à leur tentative de passer en force en annonçant la tenue d’un Conseil des ministres avec une fausse habilitation expresse anti-datée et avec une imitation de la signature de Boa. L’information ayant fuité, car en allant en Arabie Saoudite en fin octobre dernier, Boa ne savait pas que le destin l’y attendait d’une manière ou d’une autre et, par conséquent, il aurait laissé cette habilitation au vice-président pour faire fonctionner « les institutions » en attendant son hypothétique retour.
Issoze Ngondet, il faut le relever, a manqué de courage pour demander à la Cour, au regard des difficultés qu’il rencontre, de mettre l’article 13 de la Constitution en mouvement. Cet article stipule qu’« en cas de vacance de la présidence de la République pour quelque cause que ce soit ou d’empêchement définitif de son titulaire constaté par la Cour constitutionnelle saisie par le gouvernement statuant à la majorité absolue de ses membres ou à défaut par les bureaux des chambres du Parlement statuant ensemble à la majorité de leurs membres, le président du Sénat exerce provisoirement les fonctions du président de la République ou, en cas d’empêchement de celui-ci dûment constaté par la Cour constitutionnelle saisie dans les mêmes conditions ; le premier vice-président du Sénat ». Voilà ce dont il devait être question non pas la réécriture de cet article qui est pourtant limpide. Avons-nous, oui ou non, une « vacance pour quelque cause que ce soit » ? Oui, le siège du bord de mer est vacant. Son occupant est inapte et personne ne sait jusqu’à quand.

 

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