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Le mirage rwandais : Les faits sont têtus

Dans les années 80 ce fut le Botswana et dans années-90-2000, la Tunisie voire le Maroc. Quant au Gabon c’est l’Eldorado sempiternel. L’on aurait dû dire « Eldorado » pour la classe dominante-dominée gabonaise. Et tous le cortège de vauriens du monde entier qui y ont fait fortune sauf les gabonais. Cet empressement d’une naïveté partisane témoigne de leur fébrilité historique. Et la difficulté à aborder la longue durée et le complexe avec rigueur et sérénité. Et pourtant tous ces superlatifs se sont avérés icariens. Aussi depuis quelques temps, l’on entend dire que le « Rwanda est le Singapour de l’Afrique », il serait un « nouveau dragon africain », « un Etat développeur », et « Kigali ville la plus propre d’Afrique » etc. il y a même des « démocrates africains » qui ne tarissent d’éloges pour cette dictature invétérée. D’aucuns parlent de « despotisme éclairé », ce qui est un contresens ici.

Depuis 1973, dans ce pays il y a eu incontestablement des avancées. Mais la réalité parait surfaite. Au-delà des satisfécits décernés par certains « observateurs » pressés. A propos d’un pays en plein cœur de l’Afrique dont on ne sait fichtre rien. Si ce n’est des images d’Épinal. Dans cette foulée Paul Kagamé propose une « zone économique africaine ». Comme si on dirait que le Bouthan va tirer toute l’Asie. Une pure mise en scène de la part d’un démagogue cajolé qui bien que célèbre, demeure mal connu à la tête d’un pays tout autant inconnu. Certains gabonais semblent succomber à cette mystification. C’est pourquoi, il convient de préciser les choses dans les lignes qui suivent.

Un rappel historique dirait que les mêmes éloges avaient déjà été adressés au régime Habyarimana (1973-94) dans les années 80-90. En effet, le Rwanda sous le règne brutal d’une dictature Hutu (1959-1994) fut déjà estampillée – y compris par des « spécialistes sérieux » – « Suisse africaine ». En oubliant de souligner que ce qu’ils désignaient sous le mode déclamatoire comme une « société stable » n’était en réalité qu’une « Cohésion Oppressive » (Catherine Newbury) contre les tutsis. Des louanges qui sonnaient comme la dernière extase avant le déluge. Aussi quand on a un peu de bon sens tout ce qui précède n’est que de la pure intox. Les lignes qui suivent constituent une modeste contribution aux discours et cérémonies du 26e anniversaire.

En effet Il y a presque 30 ans, le monde entier n’avait de débats que : la « fin de la guerre froide » voire la « fin de l’histoire ? ». L’ex-Yougoslavie (1918-91) et surtout le « triomphe » capitaliste sur le communisme. L’humanité redevenait enfin une. Elle allait donc vivre sur une posture antipolitique : la paix perpétuelle. Je définis l’antipolitique (ou l’impolitique) comme un régime qui détruit les liens sociaux au lieu de les construire et qui a : la hantise du conflit et piétine les règles républicaines de base, notamment le respect de la loi et des deniers publics. Qui considère que l’opposition est toujours néfaste et que seuls les membres du groupe au pouvoir sont des égaux. Les autres n’étant que des infra-citoyens à qui l’on déni tous les droits. En paraphrasant romain Gary ; alors que, le patriotisme c’est l’amour des siens, ici le tribalisme c’est la haine des autres.

De fait, une République c’est une « communauté de citoyens égaux » fondée sur la raison et non des liens de sang. Une vraie mutation anthropologique. Et puisque le conflit est au cœur du politique, et il n’y aucune communauté humaine sans conflit. Ce fut dans ce contexte, que Francis Fukuyama se posa originellement la question de savoir s’il n’y avait pas une « fin de l’histoire » ? (1989) Il avait dû changer la forme interrogative du titre en affirmation dans sa version longue (1992). Ce changement de titre est en lui-même une césure intellectuelle. Dans cette atmosphère d’euphorie néolibérale, on ne jurait plus que par « Trade » (affaires) et non plus d’« Aide ». L’axe Reagano-Thatcherien avait ravivé la vieille théorie du « doux commerce » chère à Montesquieu. Ils en avaient fait le substrat de leurs relations nord-Sud. Mais contrairement au sens commun en réalité le néolibéralisme venait de la gauche : Aux Etats-Unis avec les démocrates de l’ouest (Jim Brown en Californie) ou du Sud profond géorgien avec Jimmy Carter Gouverneur de cet Etat qui avait commencé la déréglementation. Où il avait déjà expérimenté la désinflation compétitive et son corollaire le conservatisme budgétaire (en réalité l’austérité). Puis en Europe, en Allemagne par l’ordoliberalisme, par la deuxième gauche en France (Michel Rocard, Revue Esprit, Nouvel Obs.). Ainsi que les anciens maoïstes et « anciens compagnons » de route du PCF qui revenaient de leurs fantasmes « antihumanistes ». De fait, le conservatisme budgétaire et son corollaire la désinflation compétitive porte-étendard néolibéral sont les faux-nez du cynisme économique et social. La puissance médiatique conservatrice était telle qu’ils n’ont toujours pas fini de convaincre le monde que le néolibéralisme est une idée de droite.

En réalité, le néolibéralisme ne se définit pas par « l’Etat minimal » mais par une société de marché calée sur un Etat fort répressif. En somme l’Etat ne doit être qu’au service des puissants. La réglementation sert à légaliser la violence des riches qui est plus subreptice, corrosive et non brutale. C’est-à-dire, que tous les rapports sociaux sont marchands sous la tyrannie du « laissez-faire ». L’Afrique n’était pas en reste, l’ouvrage collectif « le Tiers-monde et la Gauche » au départ un édito de Jacques Julliard dans Le Nouvel obs. (1978) séchait les larmes du « sanglot de l’homme blanc » (Pascal Bruckner 1983). L’Occident se devait ainsi de renouer avec son « arrogance colonialiste historique » comme dirait Sergio Romano. Dans le tiers-monde l’euphorie postcoloniale s’était fracassée contre le mur des réalités du pouvoir. Ce vide politique enrobé de discours lyriques a été mis-à-nu. En effet, ce ne furent en réalité que d’horribles pouvoiristes sans projets.

Au Gabon, nous étions chauffés à la « rénovation bongoiste »

Cette machine infernale à tuer l’intelligence des gabonais et génératrice de leur misère matérielle et spirituelle cinquantenaire. C’est ainsi que dans ce contexte deux pays « francophones » d’Afrique centrale (Burundi-Rwanda) vivaient sous le joug de l’Etat criminel : Répression politique, massacres de masse, ou politicide, déplacement de populations. Une réalité dont seuls les spécialistes connaissaient l’existence. Je dois reconnaitre que j’en ai vaguement entendu parler dans un cours de géographie avec les noms de leurs capitales : Bujumbura (Burundi) et Kigali (Rwanda) qui sonnaient bien aux oreilles. Ces deux petits pays de 10-12 millions d’habitants aux densités de populations les plus élevées d’Afrique : 519 (Rwanda) et 451 (Burundi) – Des données importantes pour comprendre ce qui s’y passe – défraient la chronique internationale depuis des décennies avec leurs postures lugubres. Certes leurs deux présidents Michel Micombero au Burundi (1966-76) et Juvénal Habyarimana du Rwanda (1973-94) sont venus en visite au Gabon en quête de sous.

Par ailleurs, en 1976, le Gabon avait abrité les jeux d’Afrique centrale. Il y avait les deux équipes de football de ces deux pays frontaliers du Zaïre-RDC qui se situent dans la région des grands lacs. Les analyses historiques démontrent que les pays de l’intérieur de l’Afrique aux zones rugueuses n’ont pas subi de la traite. Un détail historique important. Ils n’ont donc pas subi la ponction séculaire inhérente à la traite négrière atlantique comme les pays côtiers dont le Gabon. L’autre facteur décisif fut que le Marechal Mobutu fut l’arbre qui cachait la forêt des dictatures immuables d’Afrique centrale. Car aucun chef d’Etat de cette zone (et encore de nos jours) ne sortait du lot. Omar Bongo était même pire que Mobutu. Mais les journalistes avides de sensation ne voulaient parler que du « maréchal fantasque ». De mémoire d’homme, aucun chef d’Etat africain francophone n’avait été autant victime de caricature que ce dernier. Il était pourtant plus intéressant qu’on ne le pensait. D’abord il parlait un français exquis avec une diction parfaite (mieux que Patrice Lumumba, Joseph Kasavubu, Moïse Tshombe, Etienne Tshisekedi). Il fut à l’origine agent de la force publique puis journaliste au magazine l’Eveil. Et c’est sous cette casquette qu’il s’était rendu sous à la fameuse table-ronde de Bruxelles (1960) pour couvrir l’événement. Il n’était donc pas « l’idiot » souvent décrit par des journalistes en mal de sensation. Son régime avait attiré la recherche internationale, au point qu’il n’y a pas un travail de recherche sur l’Etat dans le tiers-monde qui n’évoque le régime mobutiste. Et près d’un quart de siècle après son éviction par les américains, la situation de la RDC démontre à suffisance que ce pays demeure une figure d’hystérésis politique. C’est-à-dire qu’alors que les principaux éléments d’un phénomène ont disparu le phénomène persiste. Dans ce pays on est bien passé du mobutisme au mutli-mobutsime (les élites dépècent leur pays).

Il appert au regard de la situation cahoteuse et chaotique de la RDC, que Mobutu n’était donc pas la « racine du mal zaïrois » (Nguza-Karl-I-Bond). De fait, tous les thèmes qu’il avait promus : Authenticité, Zaïrianisation, Manifeste de la N’selé (rédigé par Etienne Tshisekedi), Parti unique MPR (fondé avec Tshisekedi 1967), Militarisme lui avaient été soufflés par les fameux « intellectuels » qui ont tout fait depuis 60 ans sauf relever l’Afrique. Car en réalité si les choses vont si mal c’est parce que les intellectuels congolais sont nullissimes. Et d’ailleurs le sens commun semble lui attribuer la paternité de « L’Authenticité » alors que ce fut l’invention d’un autre dictateur : Etienne Gnassingbé du Togo ancien caporal-chef devenu Eyadema qui en fut l’auteur. Il avait été suivi par Tombalbaye qui était passé de François à Ngarta (Tchad 1960-1974). Mobutu n’avait fait que reprendre le relais avec brio en popularisant le concept. La responsabilité des intellectuels est très importante dans le délabrement du Congo-K. Jamais on n’a vu une élite piller autant son pays avec un appétit d’ogre en se conduisant comme de bandits itinérants.

L’Afrique en général et l’Afrique centrale en particulier a démontré que si on veut ruiner un pays il suffit de le confier à ses élites.

Par exemple, le Congo-Brazzaville est une tragédie sans importance où l’Etat tue depuis 1963. Ils ont chassé tous les français sous fonds de nationalisme radical rebaptisé : Socialisme Bantou (1963-69-Massamba-Debat) puis socialisme scientifique marxiste-léniniste avec le Parti Congolais du Travail (PCT) : 1969-77 commencé par Marien Ngouabi. Poursuivi par Joachin Yhombi-Opango (4 Avril 1977-5 Février 1979). Puis parachevé par Denis Sassou-Nguesso (DSN)-I (8 Février 1979-31 Août 1992). Lequel est revenu dans le sang en octobre 1997 (Sassou-II), et tient le pays depuis presque 50 ans : soit comme ministre de la Défense chargé des Services secrets : 1969-92 puis 40 ans comme Président (en deux temps). Ainsi si le Slogan du PCT était bien « tout pour le peuple » c’est en réalité tout pour les Mbochis ou nordistes. Et depuis le retour sanglant de DSN, c’est finalement : « seule la famille Sassou mange avant tout le monde ». En fait c’est plutôt DSN et ses enfants exclusivement. Autrement dit qui veut vivre comme un capitaliste doit prôner le socialisme du bout des lèvres (notre ouvrage comparatif sur le Gabon/Congo-Brazza est en cours).

Mais tous les yeux étaient tournés vers la rive droite du Congo.

Le Congo-Brazzaville (rive gauche) souffre d’ailleurs de cette proximité et de l’homonymie. De fait, très peu de gens savent qu’il y a deux Congo. Un congolais né entre 1951 et 1990 n’aura connu que la violence d’Etat. Avec son cortège de massacres politiques et de faillite économique. L’Afrique est le continent du crime politique parfait. Au Gabon, alors qu’Omar Bongo et sa clique ont pillé le pays, les media ne parlaient que de Mobutu et de Bokassa. Arthur Comte (journaliste de droite) avait publié un opus de 528 pages sur les « Les Dictateurs du XXe siècle, » au sein duquel Mobutu était la star, mais il n’eut pas une seule ligne qui n’évoqua Omar Bongo. Même pas en annexe. Qui fut ainsi le dictateur le plus tranquille au Monde. Qui ne se souvient de Macias Nguema qui se disait le « seul miracle de la guinée Equatoriale » et « le seul coq qui devait y chanter » ? Nous sommes donc tous des mobutistes. La position du Congo-Zaïre-Congo a ainsi masqué ce qui se passait au Burundi et au Rwanda. C’est pour cela qu’il était essentiel de faire ce détour par le Zaïre/Congo. Dans cette région, il faut rappeler que le « génocide » avait d’abord eu lieu au Burundi (200-300 000 morts en 1972). Donc 22 ans bien avant le Rwanda.

Ni le Burundi ni le Rwanda ne furent des colonies françaises

Il me souvient que les joueurs burundais que je voyais jouer au stade omnisport en 1976 étaient donc des rescapés du génocide. Dans ces deux pays depuis des décennies, l’Etat est criminel, tant il s’est livré à des politicides à répétition. Les gabonais devraient y réfléchir avant de crier contre Léon Mba. Qui avait gouverné et laissé un pays en paix et prospère avant que les satrapes ne s’en emparent depuis 52 ans. Cela dit, il faut rappeler que ni le Burundi ni le Rwanda ne furent des colonies françaises – malgré l’usage de la langue française – ce furent deux colonies allemandes (1897-1918) : puis après la grande guerre ; le « Ruanda-Urundi » est passé sous la tutelle belge en 1923 puis rattachées au Congo-Belge en 1925 (SDN). Cette relation à l’Allemagne est importante pour comprendre ce qui s’y passe.

Les allemands avaient reconstruit une stratification sociétale inégalitaire crypto-racialisée. Et malgré leurs configurations ce ne sont pas non plus des pays jumeaux. Il y a tellement de monde qui croit que ce sont des anciennes colonies françaises. La France n’y avait mis les pieds pour la première fois qu’en 1965 avec l’établissement des relations diplomatiques. Des travaux essentiels sur ces pays demeurent en allemand et en anglais. Cependant il y a des deux côtés une structuration Tutsi/Hutus. Mais dans ces deux pays la masse était hutu et l’élite royale de souche tutsi.

Au Burundi les tutsis se subdivisent entre tutsi-hima du sud plutôt roturiers et tutsi-banyaruguru du nord de souche royale. De fait tutsi et hutu ne sont pas des ethnies mais des identités modernes : ils sont le même peuple, tout le monde parle kirundi au Burundi et Kinyarwanda au Rwanda, que l’on classe dans les langues dites bantoues. Donc un « tutsi » et un « hutu » parlent la même langue. Ils ont les mêmes coutumes et mangent la même chose avec des variantes régionales et culturelles. En somme ce ne sont pas des races ni des ethnies.

Alors d’où vient cette dialectique essentialiste exterminatrice ?

C’est une dialectique historique inhérente à la division sociale agro-pastorale du travail au sein d’une communauté. Et des représentations qui en découlent. « Mututsi » signifie éleveur celui qui a une vache (donc prestige) et Muhutu signifie « laboureur, cultivateur ». Cela dit il n’y a qu’un petit clan tutsi qui se désigne « baganwa » ce qui signifie consanguins. Et c’est ce groupe de souche tutsi qui est la source des « rois » Burundais. Aussi tous les tutsis mêmes roturiers pour se distinguer de la masse ont fini par adopter une posture aristocratique qu’ils n’ont pas. Ainsi à propos du Rwanda, On ne dira jamais assez que « Tutsi et Twa n’étaient pas des étiquettes ethniques mais des catégories faisant référence à la richesse et au statut. Les trois groupes partagent la même histoire, culture, religion et espace. Bien que le Rwanda ne soit pas sans conflit, cela n’a jamais été de nature ethnique. Les rois appartenaient à des lignages tutsis, mais ils ont perdu cette étiquette ethnique en prenant leurs fonctions et ils étaient les gardiens bienveillants du bien-être de tous les Rwandais. En contraste apparent avec cette image d’harmonie, le récit historique repose en même temps sur la notion de guerre et de conquête continues, ku-aanda d’où le Rwanda tire son nom littéralement Expansion ou Propagation du Centre : le principe du ku-aanda, qui impliquait l’annexion et l’intégration ultérieure des territoires voisins, a influencé l’expansion et la croissance continues du Rwanda précolonial. Tous les rois mentionnés par Rusagara sont des rois guerriers, et la Carte de Ku-aanda comprend une grande partie de la situation actuelle en Ouganda et en République démocratique du Congo (RDC). Compte tenu de l’insistance des dirigeants du FPR sur la continuité avec le Rwanda précolonial, nous devons jeter un bref regard sur cette histoire.

Le royaume de Nyiginya a été fondé au 17ème siècle par Ruganzu Ndori. L’armée – une innovation qu’il a créée – ainsi que le système de clientèle Ubuhake, est devenu la base du pouvoir dans le royaume. Bien que le royaume de Nyiginya ne soit qu’un des nombreux pays qui ont émergé dans la région au 17ème siècle, il est devenu très différent au cours du 18ème siècle de ses voisins lorsque des armées non territoriales, multiples et permanentes ont été mises en place.

L’effet le plus profond de cette nouvelle organisation militaire a été l’institutionnalisation d’une glorification du militarisme et de la violence martiale qui a finalement imprégné toute la culture nyiginya au moment où les armées sont devenues le fondement de la structure administrative du royaume. (…) Enfin, tous les habitants du royaume ont été intégrés à l’organisation militaire. L’armée constituait le cadre administratif du pays et la concentration du pouvoir entre les mains des commandants de l’armée était une étape essentielle pour l’unification du royaume. Dans ces conditions culturelles, logistiques et institutionnelles, il n’est pas étonnant que l’histoire du royaume coïncide avec la guerre et la violence. Même le récit en grande partie mythique proposé par le premier historien du Rwanda, Alexis Kagame, est une longue litanie de guerres contre des voisins, de conquêtes, d’expéditions punitives contre des régions indisciplinées, d’attaques de représailles, d’insurrections et de leur répression et de guerres civiles. La violence visait non seulement les ennemis extérieurs et l’opposition interne, mais aussi les tribunaux et les milieux dirigeants. La liste de Kagame des luttes de succession royale, des massacres de familles princières entières et de chefs dont la loyauté était mise en doute, rumeurs et vengeance, empoisonnement et torture cruelle, exécutions, règlement de compte, etc. est presque infinie. Jean Vansina note aussi que depuis le règne de Rujugira (fin du XVIIIe siècle), le pays était presque continuellement en guerre. De même, s’agissant de la période la plus récente, celle du milieu du XIXe siècle, qui est connue avec assez de détails, tous les événements mentionnés par Kagame sont des guerres, des massacres, des intrigues et des compétitions à l’intérieur de la cour royale. Le pays a été en guerre deux ans plus tard. Pendant le règne de Rwabugiri, campagnes militaires ont été organisées en moins de 20 ans. L’histoire de la militarisation au Rwanda est donc riche et, comme nous le verrons, sa réutilisation après le génocide a été intense. Les dynamiques ne sont pas capturées dans la littérature explorant les liens entre la militarisation et la gouvernance après un conflit. Cela ne signifie pas que les souvenirs historiques sont le seul ou même le principal facteur explicatif de la militarisation actuelle. L’expérience du FPR, pendant la lutte du NRM en Ouganda et la guerre civile rwandaise, est au moins aussi importante. Gérard Prunier note que sa forte dépendance aux moyens militaires et violents est compréhensible à la lumière du passé du FPR regorgeant d’atrocités et de massacres de civils, commis à leur encontre, autour ou par eux. Pour eux, la violence n’était pas exceptionnelle. C’était un état de fait normal. En outre, seuls les soldats connaissaient le pistolet et celui-ci fonctionnait bien pour eux dans le passé. Et disciplinée, et accorde une grande importance à la sécurité et au pouvoir militaire. Mais l’influence de l’insurrection étant moins surprenante et mieux établie dans la littérature, nous soulignons ici l’influence de la longue durée » (Filip Reyntjens- traduction de l’auteur). Cette digression historique est importante pour saisir la tragédie rwandaise. Tant elle a été génératrice de confusions et de lieux-communs. Il fut un temps au Gabon où des gens de Ndendé se disaient « nièce ou neveu » de Paul-Marie Yembit le VPR (1961-66). Mais après sa chute, ils rejetaient cette parenté. Il n’y a donc seulement qu’une petite élite tutsie faisant partie de la royauté. Il y eut aussi une branche hutue mais elle avait été détruite.

Les allemands et les belges trompés par leurs interlocuteurs et leur propre racialisme ont manipulé ces fausses représentations. Les premiers ont vendu le mythe hamitique tutsi et les seconds (les pères blancs belges) ont entretenu le mythe prolétaroïde hutu. Ce qui se passe au Burundi influe sur ce qui se passe au Rwanda et vice-versa. Le drame rwandais démonte aussi les fantasmes panafricanistes. Car voilà des gens qui ont tout pour s’entendre mais qui se massacrent depuis des siècles sans réel mobile apparent. Et cela à l’intérieur de leurs frontières historiques. Paradoxalement, il se trouve ici que, les territoires africains qui n’avaient pas été affectés par la causalité diabolique des « frontières coloniales » sont ceux qui connaissent le plus de conflits ethno-politiques postcoloniaux. De fait, les frontières de ces deux pays n’ont jamais bougé. Il en fut de même pour le royaume du Bonyoro ou Buganda en Ouganda. Leurs structures politiques ont donc été préservées par les coloniaux. Les monarchies sont tombées après la colonisation et non pendant, déposées par les populations locales postcoloniales.

Les frontières à la sauce berlinoise ne sont pas responsables du désordre africain.

Il faut d’ailleurs rappeler que l’Afrique n’a pas été « balkanisée » à Berlin en 1884. La conférence de Berlin portait plus sur l’Allemagne que sur l’Afrique proprement dite. En réalité, la délimitation des frontières n’a commencé qu’en 1897. Ces deux pays n’ont d’ailleurs été au contact des empires coloniaux que pendant 55-66 ans ce qui est un temps court par rapport au Gabon (133 ans). L’inégalité politique ici est plus source de conflits que les tracés de frontières (on y reviendra dans une future chronique).

Ce rapide balayage historico-anthropologique est nécessaire pour figer les impressions fugitives. Et surtout exposer tous les mensonges de Kagamé et de ses supporteurs somnambules (africains et non-africains). Aussi même si, les deux monarchies étaient dominées par des tutsi, cela n’impliquait pas que tous les tutsis étaient « aristocrates ». Les observateurs ont ainsi inventé une « race supérieure » dite « hamitique ». La question qu’on peut se poser c’est pourquoi les génocides burundais de 1972 et 1988 n’ont pas eu la même couverture ? L’esprit du temps probablement. L’indignation est de plus en plus mondialisée. Un tweet suffit à toucher le monde entier.

Ainsi il y aurait donc au Rwanda 87-90% de hutus et 13-10% de tutsis ainsi qu’une minorité batwa. Le dernier groupe étant complètement absent des analyses. Il y a donc le « Rwanda » des médias et des anthropologues, et le Rwanda réel. Pourtant le pays est clivé en différences régionales ou spatiales. L’histoire immédiate est d’ailleurs venue à grands pas de manière anachronique. Le régime Habyarimana est devenu le « IIIe Reich » et les tutsis sont devenus des « juifs ». Nous étions ainsi face à un « nazisme tropical » un pur anachronisme. Les juifs qui avaient fait de Berlin leur Jérusalem étaient des citoyens allemands. Ce ne furent pas des fils de réfugiés qui revenaient en Allemagne après y avoir perdu le pouvoir. Ils n’avaient pas d’armée partant de Pologne pour envahir l’Allemagne et récupérer le pouvoir au nom d’une grandeur perdue.

Mais l’occident ne peut parler de l’Afrique que sous le prisme de son histoire.

De plus le gauchisme a écrit son propre roman où les blancs seraient responsables de tout. L’histoire rwandaise fut lue sous le prisme pangermaniste. Comme si c’étaient eux qui tenaient les machettes ! Un vrai roman d’épouvante. Il est notoire que sous le regard paternaliste occidental, le « noir » n’est jamais responsable de rien. Car c’est une victime expiatoire. Il est innocent et quand il inflige la mort, elle ne peut être que le fait de « méchants blancs ». Pourtant en bonne rhétorique il faut commencer par rétablir le sens des mots. Ce qui est une forme de racisme qui relègue les noirs dans l’infra-humanité d’où leur innocence naturelle. Ils ne peuvent jamais tuer ni avilir leur prochain. Les génocides sont donc inhérents à cette vision du monde qui se traduit par la clôture politico-culturelle.

Il convient de rappeler que ce fut le socialiste français Gracchus Babeuf qui parla de populicide pour qualifier les meurtres de l’Etat français en Vendée pendant la révolution française. Mais le concept était tombé en désuétude depuis le XIXe siècle.  Cependant, il semble pourtant être plus pertinent pour la situation rwandaise. De fait ici, un Etat a tué une partie de sa population sans mobile apparent. Je soutiens d’ailleurs que le concept de politicide me parait encore plus grave que le génocide. Mais comme c’est le concept adopté il convient de le définir. Car il est très récent dans les imaginaires. Le concept de génocide formé à partir du mot grec genos (race, peuple) et du suffixe latin –cide (tuer) avait été utilisé en 1944 par Raphael Lemkin un juriste américain d’origine polonaise qui le définit Le génocide comme : « la destruction totale ou partielle d’une nation ou d’un groupe ethnique. Il ne signifie pas nécessairement la destruction immédiate d’une nation ou d’un groupe à moins que ne ce ne soient des meurtres de masses de toute une nation. Par le truchement d’un plan coordonné d’actions diverses préétablies visant à la destruction des fondements essentiels de la vie des groupes nationaux. Dans le but d’exterminer les groupes proprement dits. Cela implique la désintégration des institutions politiques et sociales, de la culture, de la langue, des sentiments nationaux, de la religion, de la vie économique et du cadre d’existence des peuples, de leur sécurité, liberté, santé, dignité voire de la vie des personnes appartenant à ces groupes ». Le génocide implique, donc l’essentialisation, et l’extermination préméditée et la transformation forcée d’un groupe spécifique. Il y a donc une différenciation supposée. Selon l’ONU, le génocide exclut les groupes politiques. Mais concerne les « meurtres de masse » y compris des éléments concomitants : blessures corporelles, restriction forcée des naissances et transferts d’enfants ; il englobe ainsi cinq critères :

  1. a) Meurtre de membres du groupe ;
  2. b) Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;
  3. c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ;
  4. d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;
  5. e) Transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe. Certains critères se retrouvent au Rwanda.

Mais d’où viennent les massacres dans ce pays ?

L’histoire est ici précieuse. Ce fut ainsi qu’en Novembre (fin) 1896 au Rwanda, le roi régnant et guerrier Kigere Rwabugiri meurt et est remplacé par Ruhi Musinga. En réalité, le Roi Rwabugiri avait désigné six ans auparavant son successeur en la personne de son fils Rutarindwa. Traditionnellement, un futur roi a besoin d’une mère vivante pour monter au trône. Mais la mère de Rutarindwa décéda plus tôt, il était donc orphelin de mère. Le roi confia alors la tutelle de son fils héritier à son épouse préférée Kajongera du puissant clan Bakagara de la lignée dite Bega qui était redoutée au sein de la cour royale. Il se trouve qu’elle avait son propre fils et n’apprécia jamais le choix de son époux. Elle décida donc avec l’aide de ses deux frères d’outrepasser la volonté du roi défunt, en désignant contre toute attente, son propre fils Musinga qui ne répondait pourtant pas aux critères. Ce fut donc un coup d’Etat de palais qui élimina ipso facto, définitivement le clan des Nyinginia. Musinga dit « Yuhi V (1897-1931) » fut en fait un faux roi. Ce coup d’Etat avait compliqué son règne. Au point que certaines contrées du sud ne l’avaient jamais reconnu comme un souverain légitime.

Les racines de la crise rwandaise sont donc très anciennes et bien avant l’arrivée des blancs.

Les violences sont donc endogènes et non inoculées par le racialisme occidental, selon la légende victimaire panafricaniste. Son fils Mutara III (1933-1959) avait lui aussi une légitimité douteuse. Il appert qu’ici les rois régnaient très longtemps. Le pouvoir perpétuel récurrent de régimes modernes y trouve donc ses racines. Les tutsi furent ainsi installés dans leur nouvelle posture par les allemands et les belges comme des aristocrates et les hutus des sous-hommes qui devaient leur faire allégeance sous un régime dit Ubuhake. Le système dit ubuhake qui définit la relation clientéliste et d’allégeance d’un hutu à un tutsi était impitoyable. Les bahutus subissaient toutes les humiliations dans tous les domaines bien qu’étant majoritaires. Par exemple, le tambour du roi une forme de sceptre local était recouvert de la peau d’un hutu. Le roi pouvait décider d’éliminer un hutu à sa guise. Sous ce régime brutal, les hutus étaient traités comme des bêtes de somme infrahumanisées.

Après moult conflits et révoltes hutus, il y eut un « Manifeste Bahutu » qui avait mis exergue l’inégalité politique de l’ancien régime (1957). Il fut suivi d’une révolution sociale en 1959 qui aboutit à la chute de la monarchie avec la prise de pouvoir 2 ans plus tard du président du parti Parmehutu : Grégoire Kayibanda (1961-73). Durant son règne, le régime considérait les tutsis comme des « envahisseurs hamites nilotiques » donc des étrangers « occupants imposteurs ». Cette haine avait cristallisé dans les esprits une méfiance et un rejet de tout ce qui s’apparentait aux tutsis. Des massacres eurent lieu en 1959 et provoquèrent l’émigration des tutsis vers l’Ouganda. Il eut même de petites rébellions tutsies sporadiques en 1963 qui furent anéanties par le pouvoir Kayibanda plutôt extrémiste et hutucentrique Il disait même que le Rwanda « avait deux nations, une hutu et une tutsi » tout un programme !

Quelques 500 rebelles tutsis avaient envahi le Rwanda depuis le Burundi (27 décembre 1963), causant la mort de plus de 100 rebelles. Le gouvernement rwandais sollicita l’assistance du Secrétaire général de l’ONU, U Thant. En réalité au moins 10000 Tutsis avaient été massacrés par les troupes gouvernementales dans la région de Gikongoro, dans le sud du Rwanda, (entre le 21 décembre 1963 et le 12 janvier 1964). Il eut un début de contestation au sein du régime et du pays. Grégoire Kayibanda est finalement déposé en 1973 par son ministre de la Défense le général Juvénal Habyarimana dit « Kinani » (invincible) parfait francophone et hutu comme lui.

L’arrivée de Habyarimana transféra le pouvoir du sud vers le nord du pays et refonda la perception des tutsis.

Ils n’étaient plus considérés comme des « envahisseurs » sous Kayibanda, mais seulement comme « représentants de l’ancien régime ». Ils ne sont donc plus « étrangers » mais « ennemis de classe ». Le régime Habyarimana était dirigé de main de fer avec le soutien de ses deux beaux-frères sous la houlette de ce que l’on nommait « l’Akazu » qui vivait sous un mode paranoïaque. Ainsi toute tentative de changement politique était considérée comme le « retour des Inyenzis » ou « cancrelats » donc le retour à l’ancien régime monarchique. Il bénéficia cependant de la bienveillance occidentale dont la presse qui ne tarissait pas d’éloge à son égard, alors que c’était une dictature tribaliste. De nombreux chercheurs étrangers lui prêtaient d’ailleurs le flanc.

De l’autre côté de la frontière au Burundi, ce furent des hutus qui subirent les affres de la dictature militaire tutsi qui n’hésitait pas à massacrer les paysans hutus. Il eut même le faux « complot des officiers » dénoncé par le dictateur Michel Micombero qu’il utilisa comme prétexte pour éliminer tous les officiers de l’armée burundaise et cadres civils hutus.

Non seulement l’armée mais tout l’Etat devint essentiellement tutsi.

 De plus, les trois premiers présidents burundais : Michel Micombero (1966-76) Jean-Baptiste Bagaza (1976-87) et Pierre Buyoya (1987-93-puis 1993-96) étaient tous non seulement tutsis-hima mais originaires du même village (Rutovu). Ces événements au Burundi ont crispé davantage les dirigeants rwandais notamment avec l’assassinat par des officiers tutsi burundais (oct.93) de Melchior Ndadaye premier président hutu élu du Burundi. Le régime de Kigali fut donc attaqué depuis l’Ouganda par le FPR avec à sa tête le charismatique vénéré Fred Rwigyema (descendant du Roi Matare, né Emmanuel Gisa) secondé par Paul Kagamé.

Les pressions internationales poussèrent le régime Habyarimana à ouvrir le système et organiser des élections dans un pays aussi divisé ce qui accentua les crispations communautaires. Avec l’avantage démographique hutu, un tutsi ne peut être président des deux côtés. Les deux régimes se caractérisent par une posture criminelle de l’Etat fondée sur l’obsession des hutus (Burundi) et obsession des tutsis (Rwanda). Aussi chaque événement semble crisper les tenants du pouvoir qui massacrent en masse leurs « ennemis ». De plus si l’on prend les cinq échelles des valeurs de Inglehart : Valeurs traditionnelles, Valeurs Séculières-Rationnelles, Valeurs de Survie, et Valeurs d’Estime de Soi. Le Rwanda est classé dans la catégorie des valeurs de survie, qui se caractérisent par une profonde méfiance entre les membres d’une communauté renforçant l’esprit de clocher. Où la société devient un jeu à somme nulle. La coexistence et donc l’action collective est impossible sans autoritarisme. L’Etat y est structuré comme une cohésion oppressive. C’est donc une « Dissocieté ».

Les tutsis rwandais de l’Ouganda ne vivaient plus dans des camps de réfugiés depuis 1972. Idi Amin Dada les ayant détruits. Ils se sont donc intégrés dans la société ougandaise et ne pensaient plus retourner au bercail. Ils ont été éduqués en anglais. Il se trouva qu’un ancien ministre de la santé nommé Yoweri Museveni (de l’ethnie Muhima) financé par Kadhafi lança une rébellion en 1985 aidé par de combattants rwandais, avec lesquels ils se sont livrés au Génocide dans le « Triangle du Luwero » (Ouganda) avant le génocide rwandais. Le FPR était coutumier de massacres de masse. Après sa prise de pouvoir en 1986, Yoweri Museveni nouvel homme fort du pays nomma Fred Rwigyema ministre de la Défense et Paul Kagamé responsable des services secrets donc deux rwandophones. Kagamé était d’ailleurs en stage aux USA dans l’Etat du Kansas en tant que fonctionnaire ougandais. Cependant Museveni est accusé par les ougandais de nommer des étrangers à des postes stratégiques. Face au flot de critiques, il décida de s’en débarrasser.

La préparation du génocide rwandais de 1994

Les tutsis acculés en Ouganda, décidèrent de reconquérir le pays de leurs ancêtres avec l’aide des américains, des anglais et de Julius Nyerere qui décidèrent de redessiner la carte géopolitique des grands lacs afin de l’angliciser.

Historiquement l’Afrique centrale pour les anglais fut le pourtour OugandaRhodésie du Nord (Zambie), Rhodésie du Sud (Zimbabwe) et Nyassaland (Malawi). Ils voulaient donc reconstruire cet ensemble en y ajoutant, le Rwanda, le Burundi et le Zaïre. Ils attaquèrent donc le Rwanda en 1990 sonnant le début du désastre. Il se trouve que Rwigyema est abattu au début de l’invasion par ses « amis », au motif qu’il avait une stratégie différente. Une mort qui semble être un assassinat perpétré par Kagame qui faisait un complexe face à Rwigyema bel homme adulé et de souche royale. La veuve Rwigyema qui est en exil est malmenée par le régime notamment madame Kagamé qui lui voue une haine viscérale. Kagamé prit donc la tête du FPR. Le double meurtre de Habyarimana (6 Avril 1994) et de son homologue Cyprien Ntaryamira (burundais, hutu) constitue le début du génocide.

De fait en 6 mois, trois présidents hutus sont tués par des tutsis selon certains dirigeants hutus. Sans chef d’Etat, la machine est lancée le 7 Avril-1994 et un génocide est perpétré en massacrant 800 000 rwandais. Le monde entier « découvre » ces horreurs que ne connaissaient jusque-là que les spécialistes de la région. Pourtant, le génocide de 1994 ne fut pas le premier dans ces pays, mais le plus médiatisé. Les hutus furent donc nazifiés et les tutsis étaient devenus des juifs. Le problème c’est qu’il y avait au Rwanda 600 000 tutsis. Après le génocide il en restait 300 000. Pourtant toute la presse et tous les commentateurs parlaient bien de « 800 000 tutsis ». Dès lors s’il n’y avait que 600 000 tutsis, il ne pouvait pas en mourir 800 000 ! Il eut donc 300 000 tutsis parmi les 800 000 victimes. Les 500 000 restants furent en fait des hutus (Christian Davenport). Ce qui fait qu’en plus du génocide, il eut encore plus grave : un politicide c’est-à-dire l’Etat tue une partie ou toute sa population. Mais comme le débat était focalisé sur le « génocide des tutsis » tout le monde a fini par perdre le sens des réalités.

Il convient aussi d’ajouter que le régime Habyarimana était victime d’une agression extérieure. Ce n’était pas une guerre civile. En ce sens qu’il n’y avait pas des civils armés qui se faisaient la guerre sur des clivages sociétaux. Ce fut un régime acculé par une rébellion qui avait donc tué son propre peuple désarmé. Les media ont joué un rôle néfaste dans la qualification des actes. Ainsi Le FPR fut considéré comme « libérateurs » alors que ce ne furent que des usurpateurs impitoyables qui dans leur marche vers Kigali ont perpétré à leur tour un politicide à l’égard des hutus. Mais La parole hutue n’est pas légitime. Le monde entier chauffé par la propagande de Kagamé et ses alliés occidentaux n’avait d’yeux que pour les tutsis. Et l’on dit que dans toute guerre la première victime c’est la vérité. De plus évoquer le supplice hutu reviendrait à démolir la posture spécifique du « génocide des tutsis » par les « Interahamwe et Impuzamugambi ».

Il se trouve que de nombreux journalistes européens sont mariés à des femmes tutsies, Ils n’ont fait qu’amplifier les choses. Pourtant un ouvrage décapant d’une journaliste canadienne : Judi Rever : « In Praise of Blood » remet en cause toute la littérature aussi bien savante que journalistique sur cette période, tant elle démontre de manière convaincante que le FPR dits « inkontanyi » (guerriers) ont commis eux-aussi un « génocide » d’une ampleur sous-estimée par des observateurs tétanisés par l’émotion. Cet ouvrage démontre que dans une guerre il y a des « salauds » partout. Mais les hutus ne peuvent pas mourir puisque ce sont des bourreaux ! L’ouvrage n’est toujours pas traduit en français, alors que l’auteure est une canadienne francophone ancienne de RFI. C’est un ouvrage qui remet en cause tout ce que l’on nous balance à propos du Rwanda depuis 25 ans. Il eut bien génocide et politicide mais la réalité est plus compliquée.

Kagamé n’est pas un « libérateur » mais un criminel impénitent. Il dit ne pas parler français, alors que je l’ai vu de mes yeux faire le contraire. Il se trouvait que le FPR était constitué par les descendants de réfugiés de 1959 qui vivaient dans une bulle. Aussi le Rwanda étant un Etat francophone, ils ne pouvaient contrôler l’Etat. Ils ont donc imposé l’anglais pour asseoir leur pouvoir et éliminer le gros des fonctionnaires de l’ancien régime Habyarimana. En conséquence, Tout l’Etat est désormais dominé par les tutsis. En somme une dictature hutue a été remplacée par une dictature tutsie avec le soutien des américains et de nombreuses élites occidentales. De fait, les tutsi 12-15% de la population occupent 87% des fonctions suprêmes. L’ambassade du Rwanda au Royaume-Uni est presqu’essentiellement tenue par des ougandais. Les hutus sont exclus de tout. Tenus en respect par l’opprobre génocidaire qu’on leur jette à la figure à la moindre incartade. Il y a une fabrique de la mémoire officielle fondée sur le traumatisme. Paul Kagame est dépeint comme le « héros anti-génocide ». Ce qui est une insulte à l’intelligence. Le FPR a confirmé la fameuse loi d’airain des « mouvements de libération nationale » constatée dans presque tous les pays, dite : « Rebel-to-Ruler » (de rebelle à gouvernant) : Il appert selon cette loi que les mouvements rebelles, une fois au pouvoir, se transforment en autocratie : les cas du Cambodge, de l’Ethiopie, de l’Erythrée de l’Ouganda corroborent cette hypothèse.

Kagame lâché par Donald Trump

Cela dit dans la recherche anglo-saxonne, Kagamé et son régime sont désormais mis-à-nu. Il a bénéficié de la bienveillance clitonienne, mais Donald Trump l’a mis en quarantaine. Par exemple il fut exclu du banquet franco-Africain de Donald Trump. Instruit par Peter Pham, le nouvel envoyé spécial des USA dans la région qui est un de ces critiques féroces. Cela explique d’ailleurs le retour tactique de Kagamé vers la francophonie. Car tous ceux qui dans le monde anglo-saxon le soutenaient l’ont lâché. Y compris de nombreux chercheurs dont la canadienne Susan Thomson qui vient de publier une étude solide incontournable (Rwanda : From Genocide to precarious peace) qui ridiculise toute la logomachie du régime et de ses nombreux soutiens depuis 25 ans. Ils ont compris l’entourloupe. Quant à la recherche française voire belge elle s’accroche toujours à ses illusions manichéennes. Elle se situe à la limite du militantisme et de l’humanitanarisme et du sanglot culpabiliste.

Ce n’est pas étonnant que l’ouvrage de Judi Rever ancienne journaliste canadienne française à RFI (: « Praise of Blood : The Crimes of the Rwandan Patriotic Front ») ne soit toujours pas traduit en Français à ce jour, car des chercheurs français et militants belges droitsdelhommistes seront ridiculisés par ses trouvailles. Certains commencent à l’attaquer. Elle a fait preuve de probité et courage intellectuels, et au péril de sa vie, car Kagamé a tout fait pour que l’ouvrage ne paraisse pas. Il croyait que tous les pays sont comme le Rwanda : une « fausse cohésion » en réalité oppressive. Judi Rever a redonné au journalisme d’enquête toute sa splendeur et corroboré les révélations de : Pierre Péan, Charles Onana, et Patrick Mbeko qui avaient été injustement attaqués pour leur indépendance d’esprit sur le cas rwandais. En ramenant un minimum de probité intellectuelle dans un débat miné par l’ignorance, la mauvaise foi et le sensationnalisme. Car il faillait toujours claironner que Kagamé fut « un grand libérateur ». Il y a belle lurette que l’on sait que des chercheurs étrangers tombent toujours amoureux de leur objet de recherche au lieu de nous relater les faits.

Cependant, il est rare de trouver des témoignages hutus. Certains journalistes ont même créé le concept de « hutu modéré » ce qui présuppose que les hutus sont des extrémistes. En fait, le FPR n’est pas une « armée de libération nationale », mais de vrais khmers noirs avides de pouvoir. Le cas Rwandais illustre, le problème des minorités régnantes dans des sociétés à polarisations multiples. Alors sachant qu’elles ne peuvent gagner une élection, elles sont obligées de conserver le pouvoir par la force. Cette traction était patente au Burundi de 1965 à 1996. Par ailleurs, les « africains » en mal de héros aiment toujours encenser la canaille. C’est ainsi qu’ils se disent « démocrates » mais adorent les dictateurs des autres pays. Pour peu qu’ils leur chantent un couplet anti-occidental. Ils se disent « panafricanistes » mais sont curieusement xénophobes et racialistes.

C’est ainsi qu’aidés par l’association « Survie », Ils ont ridiculement avancé que la France serait l’auteure du génocide. On se demande bien pourquoi elle le ferait ! Alors que Koffi Annan – leur héros pourtant africain – fut Directeur de la division des opérations d’urgence de l’ONU au moment du génocide il n’avait rien fait. Il y avait pourtant des troupes onusiennes sous l’opération Mission des Nations Unies d’Assistance au Rwanda (MINUAR-dans sa résolution 872 du 5 octobre 1993) commandé par le Général canadien René Dallaire neveu du Premier ministre canadien de l’époque : Jean Chrétien, composée essentiellement de Bangladais, de Belges et de Ghanéens (2700) qui n’avaient pas bougé au moment du Génocide. Pis elle n’avait pas repoussé le FPR. La France était donc la seule puissance à intervenir. Une intervention qui a mis en exergue l’échec des solutions onusiennes et leur neutralisme dévastateur. Tels de gardiens d’incendies qui laissent la maison prendre feu.

L’ancienne puissance coloniale rwandaise : la Belgique n’avait rien fait. Quant aux Etats-Unis ils ont laissé faire selon leur cynisme légendaire. Où le drame des autres est toujours pour eux un jeu à chat perché et des tragédies sans importance. Et ce fut cette intervention française qui limita les dégâts. De plus, c’est le corridor français qui a balisé le passage du FPR jusqu’à Kigali. Kagamé avait lui-même affirmé que « la France nous a été utile pour notre conquête ». L’on peut être anti-français, mais il faut connaitre les faits et contextualiser les événements. Faut-il rappeler qu’en 1994 la France était sous la seconde cohabitation avec un gouvernement de droite ? Et contrairement au sens commun, en cas de cohabitation les institutions de la Ve République fonctionnent à plein régime. Le président n’a pas les coudées franches ; il doit tenir compte du PM donc du gouvernement. C’est en fait, ce dernier qui constitutionnellement détient les moyens de l’Etat dont la « force militaire ». François Mitterrand n’y pouvait rien. De fait, la cohabitation permet à la Ve République de redorer son blason dyarchique : « Le Gouvernement définit et conduit l’action de la nation Il dispose de l’administration et de la force armée. (Art.20) » d’autant qu’il n’y a pas de domaine réservé dans la Constit58.

Les africains avec leur culture autoritaire croient toujours que dans tous les pays (surtout démocratiques), le président est un roi comme dans leurs pétaudières tropicales. Et bien que vivant en France- et/ou en occident-ils ignorent l’histoire et le fonctionnent institutionnels de leurs pays de résidence. Cela explique leur incapacité à inventer des formules démocratiques. Ainsi Ils peuvent avoir passé des décennies en occident. Mais n’acquièrent jamais l’esprit démocratique. Aussi peut-on voir un juriste ayant longtemps vécu en occident devenir tortionnaire tribaliste ou liberticide une fois revenu au bercail. De plus, il n’y a pas un seul conflit africain où l’on a vu une force africaine d’intervention rapide.

De fait les fausses armées nationales ne sont que des milices tribales en quenouille qui ne remportent des victoires que contre leurs populations désarmées. Elles n’ont jamais battu une seule rébellion en 60 ans. Le FPR était une armée dotée d’un matériel dernier cri fourni par les américains. Dans leur croisade anglo-saxonne pour refonder la géopolitique les grands lacs. La France a sauvé l’honneur et il faut le reconnaitre. Et d’ailleurs, l’on n’a jamais vu de « brigades » panafricanistes dans aucun conflit africain en 60 ans, comme l’on voit de jeunes européens d’origine immigrée (musulmane) aller se battre aux côtés de l’Etat Islamique par exemple. Ou avec des rebellions en Amérique Latine, si ce n’est brailler dans les media ou fameux « réseaux sociaux » contre l’homme blanc. Le génocide est bien une affaire exclusivement rwandaise, à laquelle le pouvoir de l’époque et le FPR se sont livrés par soif du pouvoir. Le FPR est donc entré dans Kigali sur une « victoire » à la Pyrrhus dans un terrain balisé par les troupes françaises. Usurpant ainsi une réputation de « libérateurs » médiatiques. Kagamé a bénéficié de de l’entregent de : Bill Clinton, Tony Blair, Susan Rice et tous les faiseurs d’opinion occidentaux. Ce qui est une assurance-vie politique.

Mais 25 ans après, le masque est tombé.

En effet le régime FPR, n’est en réalité qu’un pouvoir typiquement africain de revanchards qui continuent les « politiques de la haine ». En éliminant ou en emprisonnant les vrais résistants comme l’excellente Victoire Ingabiré Umhoza (une femme digne) qui a le malheur d’être une hutu. Pis, personne n’évoque son cas, son valeureux combat demeure inaudible. Et pour cause, les hutus ne peuvent être des victimes puisque ce sont des « bourreaux génocidaires » leur parole n’est donc pas légitime ! Elle n’a été libérée (mais sous contrôle) que comme monnaie d’échange pour obtenir le poste de Secrétaire générale de la Francophonie. Le Régime FPR prouve à suffisance, que l’on peut critiquer (voire rejeter) la France tout en faisant fortune sur la francophonie.

Le régime FPR ultra minoritaire sociologiquement donc politiquement ne s’accroche jusque-là, que grâce à son autoritarisme croissant et aux soutiens américain et britannique. Il semble vouloir y ajouter une palette développementaliste qui fut déjà le slogan du régime Habyarimana dont les observateurs louaient la « cohésion sociale », alors qu’il y avait un ostracisme manifeste contre les tutsis. Kagamé pour se mousser essaie de convaincre le monde entier que le Rwanda est un « futur Singapour » ce qui est risible ; un vrai conte africain. Le Rwanda n’est pas un « dragon ». Son « régime économique » surfait ne repose sur rien. C’est un feu de paille économique doublé d’un volcan politique éteint.

Sur le terrain, il appert que des tutsis anciens émigrés d’Ouganda (1959-94) ont exproprié les maigres biens immobiliers et fonciers des hutus exilés. Imaginez que vous rentriez chez-vous en retrouvant des étrangers dans votre maison. C’est ce qui se passe sur le terrain : Une petite minorité peu sûre d’elle-même qui opprime la majorité. Assise sur un équilibre instable. De plus, le régime est très hostile aux chercheurs et journalistes indépendants rendant difficile toute analyse empirique et honnête. La plupart des données économiques et sociales du Rwanda sont bidonnées. Et ne relèvent d’aucune enquête objective. Au point que des experts de la BM, ont enjoint une lettre à leur président dans laquelle ils dénonçaient « la tendance de Kagame à falsifier les données ».

En effet ces données extrapolent celles de la capitale Kigali à l’ensemble du pays profond qui est majoritairement hutu. En réalité, c’est un pays très pauvre et enclavé qui n’a aucune ressource. Si ce n’est du café et des montagnes. Son rêve se heurte aux réalités physiques : Il n’y a pas assez de terres pour une démographie aussi galopante avec une population qui est toujours rurale (85%). Ce sont des paysans sans terre aux pieds-nus qui ne parlent ni français ni anglais. Et qui demeurent toujours largement analphabètes. Les données officielles comme partout en Afrique sont fantaisistes. Le Rwanda ne dispose d’aucune structure économique pour s’industrialiser. Il suffit d’examiner ses indicateurs pour constater que c’est de la pure intox. Le régime vit de rapines (pillage de la RDC). Son budget est financé par l’aide publique au développement (47%) Il est bâti sur du sable. Il a reçu près de 2 milliards de dollar d’aide. Avec une contribution des USA de $177.6Ms. Son commerce extérieur est dérisoire. Et curieusement, certaines données de son commerce extérieur comportent des ressources naturelles qu’on ne trouve qu’en RDC (Coltan, bauxite). Son IDH est insignifiant (158e sur 189). Les chiffres officiels et les analyses partielles n’intègrent pas les réfugiés qui sont entassés en RDC et ailleurs dans la sous-région.

Aussi, si le Rwanda se développait et est sécurisé, pourquoi ne repartent-ils pas dans leur pays ? Sa croissance est superficielle car elle ne représente que du rattrapage d’après le génocide. N’importe qui ayant un peu de culture économique sait que lorsqu’une économie se reconstruit après une longue rupture la croissance s’accélère. Et la croissance ce n’est pas le développement. Il n’y a rien de nouveau ici : les exemples sont multiples en Afrique (Ethiopie, Liberia, Côte-d’Ivoire, Ghana) Amérique Latine (Chili, Bolivie) et Asie (Vietnam, Cambodge) voire au Liban.

En effet, les crises actuelles au Chili ou au Liban, Colombie, Equateur et Bolivie sonnent le glas de régimes économiques financiarisés qui sont rattrapés par leurs structures sociales. C’est ainsi qu’au-delà des publi-reportages, Il n’y a que 350 000 personnes qui sont réellement intégrées dans les circuits modernes sur une population de 9 à 12 millions d’habitants. Ce sont essentiellement des anciens émigrés qui reviennent d’occident. Il n’y aura pas de miracle naturel qui ferait élargir son espace. Le pays malgré les apparences n’est pas stabilisé, tant il ne repose que sur l’extorsion et non le consentement de la majorité. L’environnement extérieur est dirimant. La croissance dans cette zone n’est que la version régionale du boom des matières premières. Elle ne changera pas le schmilblick.

Les appels de Kagamé à une zone économique unique sont d’autant plus loufoques qu’il n’y a pas de place pour des « dragons africains ». De plus le commerce ne peut reposer sur l’échange de matières premières. Il devrait s’appuyer sur des produits industriels un pur commerce de discours creux. En somme, une prophétie autoréalisatrice. L’analyse historique rigoureuse démontre que le développement n’est pas convergence, mais divergence. Internet donne l’illusion d’être branchés au monde, alors que les réseaux dépendent de l’Energie. Donc sans grille électrique solide ; les réseaux ne servent à rien. La réalité nous rappelle combien tout ceci n’est que fiction.

Le Rwanda pille les richesses de la RDC !

Les zones rurales sont abandonnées à leur sort, alors qu’elles devraient être le catalyseur. Il y a une exubérance immobilière, qui ne trouve aucun preneur. Car les habitants sont trop pauvres. L’instabilité en RDC est le meilleur atout du régime Kagamé qui a des alliés objectifs au sein de l’élite congolaise, tant celle-ci n’a que pour projet de piller son pays jusqu’à la lie. En effet les « richesses congolaises » sont facilement accessibles. N’importe qui peut les exploiter. Mais le pays n’en profite pas faute de politique publique. Le Ni Guerre ni Paix en RDC arrange tout le monde dans la sous-région. Et en l’occurrence, le Rwanda qui pille les richesses congolaises.

Les simples comparaisons statistiques indiquent que les chiffres réels sont largement en deçà des effets d’annonce du régime qui essaie de se racheter une conduite. Le régime annonce un taux d’inflation de 17%, mais il est en réalité de 30%. Il en est de même quand le régime annonce que le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté a baissé passant de 45% à 39%, la réalité est plus morose pour les rwandais. Le croisement des données microéconomiques infirme cette assertion. Aussi alors que les statistiques officielles ont baissé de 6% quand elles ont plutôt augmenté de 6%. De fait le vrai chiffre c’est 52%. La plupart des enquêtes sont extorquées à une population terrorisée par un régime autoritaire liberticide. Les régimes autoritaires sont coutumiers du fait, exagérer les choses.

Quid des inégalités sociales ou spatiales ?

Son coefficient de Gini est de 0,52. Selon le nouveau classement IHD-2019 : Très Elevé, Elevé, Moyen et Faible : le Rwanda se situe dans les basfonds du classement. Son IDH de 0,524 le situe au 157e/189 et son PIB par tête : $1815 est largement en dessous de la norme africaine : $3399. Des données objectives qui ridiculisent davantage tous les « satisfécits » décernés par des observateurs anglosaxons notamment la Banque mondiale, qui croient voir au Rwanda la matérialisation de leur propre posture idéologique.

En effet le concept d’émergence est un pensum néolibéral. Il est inopératoire dans les situations africaines. Quant aux africains, ils croient naïvement que le capitalisme est un banquet gratuit qui leur offrira une table. Le Rwanda que d’aucuns aiment à comparer à Singapour est une illusion politico-économique où la majorité hutu (87%) demeure exclue, mais l’histoire travaille pour elle. Cette comparaison est d’autant plus ridicule que la configuration singapourienne (une cité-Etat) ne remplit pas les conditions d’équivalence comparative. On ne peut comparer un Etat (Rwanda) et une ville (Singapour).

De plus l’accumulation du capital à Singapour remonte au XIXe siècle (1894). Alors qu’elle n’est que balbutiante au Rwanda. De plus le capitalisme singapourien demeure périphérique et extraverti. La plupart des ressources financières de l’ile proviennent de l’étranger. Car les autorités avaient choisi d’ouvrir le pays aux multinationales notamment avec des incitations fiscales, et une législation du travail coercitive.

Aucun africain et surtout les gabonais n’accepteraient de vivre dans ces conditions.

A Singapour par exemple pour bénéficier d’un logement social vous devez impérativement adhérez au PAP singapourien (parti au pouvoir depuis 1959). Sinon vous serez délogés. Kagame donne une fausse image de rigueur mais il demeure un dirigeant typique du chevauchement : corrélation entre position de pouvoir et position d’enrichissement. Ainsi de source sûre, il détient des comptes offshores sous le Titre : Crystal Ventures Ltd. La fille du président Kagamé résidente aux USA mais passe le week-end à Kigali en jet privé aux frais du contribuable.

Au Rwanda les analyses utilitaristes vont contre le peuple. C’est une réalité icarienne, l’Etat moderne n’y existe pas. Les gabonais se laissent abuser par une propagande internationale qui n’a d’égale que la vacuité des pseudo-projets historiques.

Le Gabon est un pays à part.

Dès lors vivez votre histoire. Le Rwanda constitue un ensemble de constructions faussement savantes qui ne résistent pas à l’examen empirique critique. En réalité, c’est plus le Cambodge de Hun Sen que le Singapour de Lee Kwan Yew. Une dictature africaine classique vivant dans une illusion néolibérale. Le Gabon n’a pas à rougir de ses données objectives qui sont les meilleures d’Afrique. Il a plus un problème de péréquation que de capacité financière. De fait en termes d’IDH (UNPD-2019), le Gabon se situe dans le groupe des pays IDH élevé (115). Elles ont tout simplement besoin de politiques publiques fortes. Qui a dit que le Rwanda était un Dragon ? Circulez, il n’y a rien à en retenir.

Aristide Mba. Ecopolitiste, chercheur en Sciences sociales

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