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Max Anicet Koumba : de la valeur réelle à la valeur conventionnelle

Le 28 octobre 2021, le Gabon a été secoué et ébranlé par les propos à l’emporte-pièce contenus dans un discours iconoclaste de Max Anicet Koumba, président du Rassemblement des Gaulois. Inspiré par le démon de la division dont ses donneurs d’ordre et lui connaissent le secret, il est, depuis lors, le sujet à la Une des médias, des réseaux sociaux, l’épicentre des cancans et des conversations moqueuses. Le discours de Max Anicet Koumba procède de la déconstruction de l’unité nationale en cours depuis plus d’un demi-siècle.

En effet, pour dominer le million d’âmes que compte le Gabon, Bongo s’est appuyé sur le tribalisme, le régionalisme, le népotisme, le séparatisme… Il serait alors malheureux de tomber pieds et mains joints dans le piège tendu par les ennemis de la construction de l’unité nationale tapis çà et là au sein de nos familles. A le regarder de près, le président du Rassemblement des Gaulois semble incarner une double valeur : la réelle et la conventionnelle.

Une valeur réelle

Au visage d’ange travesti par un caractère détrempé, Max Anicet Koumba, dont le daltonisme affecte toute sa vision politique, jure la main sur la Bible que la Françafrique est un instrument favorable au développement de l’Afrique et à l’émancipation de son peuple. Cette nébuleuse, à ses yeux, aurait fait davantage pour le Gabon n’eut été l’existence sur ses terres des inciviques et racistes fang… Mais, diantre ! où sommes-nous ?
Jusqu’à un passé récent, nous pensions que le rassembleur des Gaulois du Gabon était un Punu d’une valeur réelle, voire intrinsèque, parce qu’il est né de deux grandes puissances claniques : Yongu et Badjengui, du côté paternel, et Badumbi ayant pour totem le colibri, du côté avunculaire. Le colibri est un oiseau vivant toujours en groupe indivis. Il symbolise la famille et l’unité.
Nous le pensions vraiment parce qu’il a grandi en côtoyant des personnages valeureux et de premier plan, notamment Edouard Mossot et Simon Mapangou. Leurs domiciles avoisinaient d’ailleurs celui de son père, Mbadinga Itu, qui, comme d’autres jeunes de son âge, a joué les vigiles de Mavurulu-ma-Nziengui, dit Nyonde-ma-Kite, en guerre contre les troupes coloniales françaises et leurs supplétifs sénégalais dans la région de Moabi au lieu-dit Mocabe.
Ce vaillant guerrier punu et ses hommes suaient sang et eau pour s’affranchir de l’asservissement des peuples et de l’humiliation de l’Homme entre 1904 et 1909. De descendance noble, tout portait à croire que notre frère et cousin avait suffisamment acquis des matériaux à même de construire et de sécuriser ses valeurs fondamentales. Mais, au regard de son parcours, le rassembleur des Gaulois au Gabon se situe aux antipodes de ses courageux ascendants : agitation et délation plus plus, parasitisme et gigoloterie en bandoulière. C’est vraiment dommage et il n’est malheureusement pas le seul dans cette catégorie.

Une valeur conventionnelle

Comme l’admettaient des anciens penseurs, la valeur est susceptible de toutes les formes. Elle est généreuse ou brutale, stupide ou éclairée, furieuse ou tranquille selon l’âme qui la possède. Les âmes légères, quant à elles, adoptent la forme conventionnelle de la valeur pour satisfaire leur concupiscence, cette dimension de la personnalité qui les rend incapables d’accéder à leur indépendance mentale, indispensable pour sortir de l’aliénation et de la soumission.
La dénomination de son parti politique est une des preuves indicatives de ce type d’individu incapable de cette décolonisation. Son allocution a indisposé et révolté tous ceux qui l’ont écouté tant elle exprime le sens de son engagement dépourvu de toute valeur réelle. Il met en évidence l’accord de volontés entre les « Gaulois » françafricains, les marionnettes du bord de mer et l’intéressé. Lequel se dépouille de « Gabon d’abord » au profit de l’impérialisme sauvage, pur et dur.
Dès l’entame de son propos, il glisse un lapsus traître, révélateur d’un soumis : « Honorables invités, chers camarades ». Clin d’œil, d’une part, à l’impérialisme dont il est l’incarnation, au bord de mer qu’il vénère et au PDG dont il est appendice ; d’autre part, ses ascendants par remords post-mortem. La suite est tout autant révélatrice : « …. c’est une question d’habitude ». Dans une de nos livraisons, nous disions que l’habitude et l’inclination sont deux obstacles invincibles. Ils empêchent un individu d’être maître de sa volonté et de penser par procuration. L’un rend le vice nécessaire, l’autre le rend aimable.
Le Gaulois en chef s’est plu, par nécessité, à plaire sans pour autant l’emporter auprès des descendants d’Emane-Tôle et de Nyonde-ma-Kite qui se rappellent, à tout moment, que l’impérialisme ne progresse que dans la division. Ils refusent de céder aux sirènes de la provocation en se remémorant que la construction de la paix entre les nations et de la dignité des peuples est le projet le plus élevé d’une politique au service de l’Homme. Quoi qu’on en dise, l’humanité se rappellera pendant longtemps que les Punu ont la chance d’avoir en leur sein le plus grand daltonien politique d’Afrique, voire du monde. Mais, à toute action, ses conséquences.

Des excuses ou des preuves ?

Faussement interloqués les commanditaires du président Rassemblement des Gaulois l’enjoignent de se confondre en excuses sous peine de poursuites judiciaires. De manière presque convenu, Max Anicet Koumba a balancé, avec désinvolture, ses excuses sur le plateau de la télévision d’Etat à l’endroit de « ceux qu’il aurait blessés par ses propos ». Mais le mea culpa, mea maxima culpa, implicite du gouvernement à travers la montée au créneau du ministre de l’Intérieur et exécuté par Max Anicet Koumba n’entame à rien la densité de son affirmation sans précaution oratoire : « je tiens à dire ici, je l’affirme et je répète, le Gabon est bloqué par l’imposture des Pahouins et le tribalisme qui constitue… ». Des preuves, le téméraire et le très preux Max Anicet Koumba devrait les présenter et non des simples excuses. La mesure de la vraisemblance, en lien avec cette certitude affichée lors de sa déclaration, nous permet de dire que ce ne fut pas des paroles en l’air qu’il débitait. La preuve a l’avantage de matérialiser un fait. Le concept « anti-fang » pourrit notre espace de vie et nuit notre vivre-ensemble.
Une hypothèse étrangement absurde : prenons le cas d’un individu dont la conscience restaurée reconnaît être resté longtemps au service de l’ignominie. Et, proprio-motu, veut éclairer l’opinion, preuves à l’appui, sur l’origine des malheurs qui s’abattent dans le village ainsi que leurs fondements. Ne nous agitons pas et ne jetons pas l’enfant avec l’eau du bain. Si Max Anicet Koumba ne peut pas nous apporter des preuves testimoniales, il peut néanmoins disposer, en « éminent journaliste », des preuves littéraires ou par écrit. Dans le cas contraire, des preuves morales de complot sur le dos des « Pahouins ». S’il ne peut apporter des preuves justifiant cette accusation anti-fang, alors personne, même ses militants, s’il en dispose, ne comprendrait pas le bien-fondé de sa démarche… Du pain béni alors à ceux qui, comme lui, se nourrissent du corps et du sang de la division. Certains se sont d’ailleurs jetés « à plat ventre sur le dos » non pour blâmer l’acte posé par le très preux chef gabonais des Gaulois, mais pour davantage ensorceler l’axe « Pahouins » – bilop.
Léon Mébiame Mba, illustre franc Fang, vice-président du gouvernement de 1967 à 1975 et Premier ministre de 1975 à 1990, avait déclaré n’avoir rien géré tout le temps qu’il est resté aux affaires. Jusqu’à son décès le 18 décembre 2015, personne n’y a apporté de démenti formel. Visiblement, Casimir Oye Mba, Paulin Obame Nguema, Jean François Ntoutoume Emane, Jean Eyeghe Ndong, Paul Biyoghe Mba, Raymond Ndong Sima, Daniel Ona Ondo, qui lui ont succédé à la Primature, ont subi la même mésaventure, le Gabon fonctionnant en mode entreprise privée avec un président directeur général omnipotent et omniscient assisté d’un vice-président directeur général agissant par délégation expresse. Ceux de ces Premiers ministres avec lesquels nous avons échangé l’ont affirmé. Il en va certainement de même pour les Punu, en l’occurrence Didjob Divungi Di Ndinge et Pierre Claver Maganga Moussavou qui ont joué le rôle de factotum des Bongo au poste de vice-président de la République.
Pour notre part, jusqu’à preuve du contraire, « les Pahouins » ne sont pas le mal du Gabon. Nous ne le dirons jamais assez, les maux dont souffre notre pays ont une origine : l’établissement des Bongo à la tête du Gabon. Et les preuves, nous les avons. Que Max Anicet Koumba nous prouve le contraire en démontrant à la face du pays le rôle des « Pahouins » dans la destruction de l’économie nationale, la désarticulation de notre administration, la déconstruction de l’unité nationale, la mort programmée de nos systèmes éducatif et sanitaire, l’affaiblissement de la diplomatie, les détournements hypertrophiques des deniers publics, etc.

Indivisibilité de la République

« La République est une », pour signifier son unité absolue, et « indivisible » parce que ne pouvant être séparée par opposition aux tendances fédératrices. La conséquence majeure de cette disposition est ce qu’il convient d’appeler « l’obligation indivisible » dans laquelle chacun des obligés est tenu pour le tout. Insusceptible de division en se donnant tout entier à la République, il est contraint de vivre pour elle. La maxime « un pour tous, tous pour un » trouve son sens et met évidence le fait que dans une République nous sommes « un » et soumis à l’usage immémorial de son indivisibilité. L’indivision de la République gabonaise est actée par la Constitution de 1991 issue des Accords de Paris approuvés par voie référendaire.
Lorsqu’on se positionne en qualité de leader politique, le discours ici querellé est une grave infraction à loi et considéré comme un crime contre la sûreté de l’Etat. Les crimes de cette nature sont, dans la classification de Montesquieu, punis par des supplices. Max Anicet Koumba restera-t-il attaché au démon qu’il connaît ou s’ouvrira-t-il à Dieu qu’il ne connaît pas ? En d’autres termes, s’il ne présente pas des preuves, nous dirons que lorsqu’on n’a ni force, ni courage, on ne provoque pas une guerre.

Beauty Nana BAKITA MOUSSAVOU

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