Plus de trois mois après son entrée en fonction, c’est, curieusement, dans sa propre majorité que le Premier ministre Alain-Claude Bilie-By-Nze doit compter les coups tordus qui lui sont portés dans les réseaux et à travers la communication de la presse de son chef hiérarchique. Des exemples abondent qui indiqueraient que c’est moins l’opposition, qui n’a intérêt qu’à s’occuper d’un candidat très en difficulté, que de ses concurrents politiques dans le camp de sa majorité que proviennent les difficultés.
En politique, encore plus dans la vie de tous les jours, le mal ne vient jamais vraiment de loin. Disons-le très clairement, c’est souvent dans le cercle élargi de la famille biologique que la parentèle voit d’un mauvais œil, teinté de jalousie, la promotion de celui qu’on a vu naître et grandir.
Dans les milieux politiques, où la concurrence est exacerbée en vue de l’occupation de positions comptées que libèrent ces espaces, véritables mares aux caïmans, les batailles de leadership sont impitoyables, voire cruelles, avec des coups bas et des peaux de banane glissées sous les pieds de celles et de ceux qui ont eu les faveurs des plus grands décideurs.
C’est donc peu que de dire que l’ascension d’Alain Claude Bilie-By-Nze à la tête du gouvernement n’a pas été et n’est certainement pas du goût de celles et de ceux, généralement impatients, qui aspiraient à occuper la même fonction, notamment le genre, mis en appétit incompressible de pouvoir ces dernières années sous le parrainage de la première dame de la République. Hormis Rose Christiane Ossouka Raponda, qui pensait faire de vieux os à la tête de cet important pan de l’Exécutif, deux autres femmes sont souvent citées pour la remplacer le cas échéant. Mais, malheureusement pour elles, comme pour d’autres hommes aux ambitions ouvertement ravalées qui n’en pensent cependant pas moins, il a finalement plu au chef de l’Etat de jeter son dévolu sur une personnalité qu’il connaît sans doute mieux que les autres prétendants, Alain-Claude Bilie-By-Nze ayant longtemps magistralement porté sa parole dans les bons comme dans les mauvais moments. Plus souvent dans la tempête des contestations violentes que dans les moments jouissifs de l’accalmie. Le facteur sociologique bloquant, cher à Jean Eyeghe, avantageait le Makoviste ici dès lors qu’il se posait en obstacle à ceux de sa nombreuse communauté dissimulés à travers cinq des neuf provinces du pays. Le moindre de ses membres n’étant pas le Dr Séraphin Akure Davain qui va très probablement tenter d’entraver la marche d’Ali Bongo Ondimba vers son troisième mandat.
Personne n’est dupe. C’est certainement au sein de sa propre formation politique, écartelée entre plusieurs clans qui s’épient, que les ficelles de la déstabilisation sont tirées pour essayer d’affaiblir un leadership dont la vocation, à ce stade, n’est que d’aider le pouvoir commun, très en difficulté, à résister au mieux à la bourrasque électorale qui s’annonce en l’absence d’un bilan qui fait si cruellement défaut au distingué-camarade-président du Parti démocratique gabonais. Ils oublient, par ailleurs, que tenter d’affaiblir le Premier ministre, simplement entre autres, dans l’optique de la dévolution future du directoire de campagne d’Ali Bongo Ondimba, c’est contribuer d’autant à l’amenuisement des chances d’un candidat qui n’a plus beaucoup de marge de manœuvre au moment où l’échéance fatidique se rapproche. Or, le travail de Bilie-By-Nze, s’il n’a pas encore pleinement apporté tous les fruits escomptés pour la satisfaction de l’électorat national, a néanmoins commencé à affaiblir une opposition mise à mal et divisée depuis la publication des résolutions, très mitigées, de la dernière concertation politique.
Curieusement, dans le camp du pouvoir, ces résultats compteraient moins que la satisfaction des ambitions individuelles portées par des femmes et des hommes qui manœuvrent dans certains laboratoires obscurs pour savonner la planche à un chef de gouvernement victime de coups tordus dans la vie de tous les jours comme dans les réseaux sociaux avec l’exhumation d’un passé que Bilie a courageusement assumé en son temps. La publication d’extraits d’attaques personnelles sortis du contexte, le choix d’images vicieusement sélectionnées dans la multitude, la commission d’articles de presse tendancieux peuvent incliner à penser que le fils prodige de Ntang-Louli n’entendrait pas s’arrêter au pied de l’avant-dernière marche du piédestal. Autant de gestes associés à la séquence de Bruxelles et à la malhabile tentative de vassalisation dénoncée dès les premières heures de sa prise de fonction qui devraient fortifier le chef du gouvernement et lui rappeler qu’« on ne jette des cailloux que sur un arbre qui porte des fruits ».
Bien entendu, un Premier ministre, ça peut servir de fusible, mais pour autant que le courant entre le chef de l’Etat et les populations passe encore de façon continue. On peut malheureusement observer qu’entre Ali Bongo Ondimba et les Gabonais, les lignes d’alimentation semblent coupées et qu’il y a urgence à solliciter les services de dépannage dirigés par l’Ogivin qu’il vient librement de se choisir pour la maintenance de son régime saturé.