Les conclusions du Dialogue nationale inclusif (DNI) et des dispositions de la Charte de transition suggèrent de frapper ou touchent très clairement déjà une catégorie de compatriotes qui ne pourraient pas prendre part aux prochaines consultations électorales de 2025 et des deux autres années à venir. Mais la quête d’inclusion du Ctri faisant tout pour associer les acteurs politiques de tous bords à la gestion du pays, il faudrait penser, pour que l’agir ne tourne pas à l’arbitraire, à fixer clairement les règles des éventuelles exclusions.
Qui, au jour d’aujourd’hui, dans la classe politique s’étant mise en scène depuis la proclamation de la victoire issue, du sanglant coup d’Etat électoral de 2016, peu dire qu’il est absolument certain de pouvoir participer aux élections à venir, au-delà de sa simple bonne volonté ? Très peu de gens. Même dans la population de ceux qui, après avoir servi ou subi docilement le régime d’Ali Bongo Ondimba, ont par la suite tourné casaque, pour se ranger derrière le candidat Jean Ping Okoka, vainqueur auto-proclamé du scrutin présidentiel de 2016. Ces personnalités seraient d’autant moins rassurées quant à leurs chances de participer aux prochaines échéances électorales de 2025, qu’elles savent que pèseraient dorénavant sur elles, des présomptions d’avoir été, dans tous les cas au mauvais endroit au mauvais moment.
Commençons le passage en revue de ces potentiels exclus, par ceux qui pourraient légitimement lorgner vers le scrutin présidentiel et croiser éventuellement le fer avec le Gl de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, le moment venu.
Il y a d’abord les deux derniers challengers d’Ali Bongo Ondimba en 2016 et en 2023.
Jean Ping, qui n’aura fini de renoncer à ses prétentions présidentielles qu’à l’issue du coup d’Etat du 30 août dernier, non seulement passe aujourd’hui pour une espèce d’envoyé spécial ou de chargé de missions itinérantes du président de la transition, ne pourrait pas participer aux scrutins présidentiels à venir, touché qu’il sera par l’exigences d’un certain nombre de conditionnalités qui devraient figurer dans la future Constitution et la nouvelle loi électorale. Parce qu’il faudrait désormais être Gabonais de père et de mère Gabonais d’origine, le natif d’Omboué, de père Chinois, ne pourra pas compétir de ce fait. Le plafonnement de l’âge à 70 ans le touchera également, lui qui est aujourd’hui âgé de 82 ans.
Le Pr Albert Ondo Ossa, aura également franchi les 70 bornes en août 2025, date présumée de l’organisation du scrutin présidentiel de sortie de transition. L’oncle de la République va-t-il se résigner à soutenir son neveu candidat ? Lui qui l’invita à Oyem à aller « se partager le gibier au village »…
D’autres personnalités, ayant affiché leurs ambitions pour le fauteuil présidentiel avant la bataille de 2023, seront aussi frappées par les mesures d’exclusions préconisées par les panélistes d’Angondjé et les rédacteurs de la Charte de transition. Il s’agit notamment de la présidente du Sénat, Paulette Missambo et d’acteurs politiques et de la société civile ayant été coopté dans d’autres institutions de la transition. C’est le cas de Séraphin Moundounga ou de Bertrand Zibi-Abeghé…
Les membres du gouvernement ne pourraient pas, eux aussi, espérer participer, certains au scrutin présidentiel, d’autres à tout autre élection pendant au moins trois ans.
C’est ici qu’il faudra bien commencer à fixer assez nettement les choses.
Si pour Alexandre Barro-Chambrier, il est exclu d’office de la présidentielle 2025, pour n’être que de père Gabonais et avoir pris pour épouse une Congolaise de Brazzaville, rien n’interdirait à l’actuel Vice-premier ministre de la transition, de participer à titre personnel aux élections législatives, locales et sénatoriales à venir. Le Premier ministre Raymond Ndong Sima pourrait également y aller. Mais quid pour d’autres membres du gouvernement, comme Marcel Abéké, Charles Mba ou Camélia Ntoutoume, pour ne citer que les plus emblématiques ? Ils ne pourront logiquement pas prendre aux futures élections pour avoir soutenu Ali Bongo Ondimba lors du scrutin présidentiel annulé de 2023.
Membres du HCR (Haut Conseil de la République) conçu et créé pour aider le président déchu alors affaibli en quête de réélection, le ministre du Pétrole et celui des Comptes publics, auront été pour lui des soutiens extrêmement clairs. Tout comme leur collègue l’actuellement ministre de l’Education nationale, membre du Comité permanent du Bureau politique du PDG pour le compte de la province de l’Estuaire et épouse d’un ressortissant français.
Pour rester dans le registre de l’ancien parti, toujours avec le pouvoir, on devrait relever, s’ agissant de la circonscription de Ntoum qui est le fief de la ministre repêchée par les militaires, que deux autres importantes personnalités, comme les anciens premiers ministres Paul Biyoghe-Mba et Julien Nkoghe-Bekale ne sauront, si les recommandations du DNI sont coulées finalement en lois, prétendre aller aux élections à venir. D’autant plus qu’aussi bien Biyoghe, que Nkoghe, ont récemment renouvelé leur attachement aux idéaux du parti sanctionné.
Malgré le regard qui serait facile à poser sur les unes et les autres personnalités ayant soutenu le régime à travers le pays, le tableau des éventuels exclus ne serait pas aisé à peindre, tant subsisteraient des interrogations sur des détails à ne pas occulter. Ainsi, s’agissant de l’appartenance au (x) gouvernement (3), l’inéligibilité toucherait-elle aussi des membres qui en auront été éjectés longtemps avant, pendant la transition et ceux qui auront choisi d’en démissionner avant la fin du processus ? Autrement dit, si un ministre, comme Mays Mouissi par exemple, démissionne du gouvernement avant la fin de transition, pour se porter candidat à la prochaine présidentielle, les dispositions de la charte, en l’état actuel, pourront-elles l’en empêcher ?
S’agissant de certaines personnalités ayant soutenu le régime jusqu’en 2023, mais qui ont quitté le bateau cette année, pourraient-elles échapper à l’application des sanctions qui vont frapper l’ancien parti unique ? C’est le cas, pour ne citer qu’eux, de Mathias Otounga Ossibadjouo, le fondateur du « Regard », et de Franck Nguema, le leader de « Gabao ». Pourront-ils aller éventuellement aux élections à venir ? Il va falloir préciser tout cela. Très clairement.
Au niveau de la Majorité républicaine et sociale pour l’émergence, si les anciens sociétaires sont connus, il faudra bien en dresser la liste définitive, et tenir aussi compte des postures. Certains leaders de cette galaxie n’ayant eu de cesse d’attirer l’attention du régime sur ses dérives. C’est le cas de Hervé Patrick Opiangah de l’Udis, qui ralliera le Ctri dès sa prise de pouvoir. Et de Jean-Boniface Assélé, l’oncle d’Ali Bongo Ondimba, dont le franc-parler lui a valu une espèce d’embargo de la part des ados-pubères tatoués qui faisaient la loi au Bord-de-mer.
Au niveau de la présidence de la République et de la haute administration, il existe aussi des personnalités, politiquement proches du dictateur déchu, qui devraient être frappées par les inéligibilités électorales. Sans en dresser une liste exhaustive, nous ne pourrons retenir que ceux qui auront pris part au dernier processus électoral avec la tenue du Parti démocratique gabonais. C’est le cas de l’ancien responsable du trésor public, Yann Koubdjé, actuellement conseiller du nouveau chef de l’Etat ; de Fabrice Andjoua Bongo Ondimba, l’ancien patron du budget, actuellement à la tête de la direction générale de la Consommation et de la concurrence ; ou de Guy-Bertrand Mapangou, haut dignitaire du PDG dans la Ngounié et actuellement haut-représentant du chef de l’Etat.
Osera-t-on signer la fin des carrières d’autant de personnes toujours aux commandes du pays à certains niveaux ? Nous attendons simplement de savoir. Tout en oubliant pas que dans ce pays comme dans tant d’autres en Afrique, il y a… « Garçon et garçon » !
Nkwara Mendzime