Le coup de la libération va-t-il progressivement se muer en véritable coup de force contre les libertés fondamentales reconnus à tous nos concitoyens dans ce pays ? Il y a tout lieu de le redouter, avec le traitement à la limite de la torture morale et de l’humiliation, infligé à une dizaine de syndicalistes de la SEEG qui portaient la voix de leurs collègues en revendiquant le paiement du 13ème mois par l’entreprise toujours pas correcte…A leur libération du B2, tous les agents ou presque se sont fait un covo en guise de solidarité avant de déposer un préavis de grève à leur direction générale, le 11 décembre 2023 dernier. Et si les méthodes d’un temps qu’on croyait révolu, réactivées par la direction générale de la contre ingérence et de la sécurité militaire (B2), produisaient à terme, l’inverse des effets d’intimidation recherchée ?
En dépit du mea culpa d’une frange d’employés qui n’auraient jamais craché sur le 13ème mois de rémunération usuelle, il est à craindre que la manière dont les 7 syndicalistes, femme et hommes responsables de familles, qui ne peuvent être comparés à des étudiants francevillois brimés en 1988 pendant le parti unique, ne finisse par incliner leurs collègues des autres structures syndicales entendant porter les mêmes revendications sociales, à se braquer. Le président du CTRI, sous le couvert de l’Etat d’exception qui laisse tranquilles et en liberté tant de fossoyeurs de ce pays meurtri, ne pouvant enfermer au B2, ou les débaucher de leurs activités qui pourraient aussi être privées, tous les leaders syndicalistes de ce pays. Bien sûr, beaucoup de leurs prédécesseurs ont été mis dans…la sauce passablement savoureuse des nouvelles institutions de la transition. Et ne peuvent que la boucler aujourd’hui.
Mais pour la masse des syndiqués, rien n’a encore véritablement changé du point de vue social. Et tant qu’on en restera là, toutes les intimidations militaires ne sauraient avoir que des effets très limités sur eux. Surtout quand l’opinion nationale s’aperçoit que, selon que tu seras plus ou moins impliqué dans l’ancien régime Bongo-PDG qui a décidément la peau dure, tu peux, sans rien risquer du Procureur ou des services de renseignements comme le B2, alléguer ou injurier comme tu veux le sémillant général… Sinon Patience Dabany, très en verve dans les réseaux sociaux cette semaine qui s’achève, n’aurait plus ses cheveux, ou son tissage sur la tête. Et que dire de toutes ces gens, personnalités connues et identifiables sur les réseaux sociaux, qui s’acharnent sur le CTRI et menacent l’unité du pays alors qu’ils ont bien plus de moyens de le faire que les syndicalistes n’ont la possibilité de plonger le pays dans le noir.
Non, le Gl de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema doit songer à rectifier rapidement le tir groupé que certains de ses collaborateurs de l’ancien système, qui savait aussi utiliser les forces de défense et de sécurité pour entraver les libertés syndicales et d’expression, diriger vers tous ceux qui ne savaient pas s’aligner sur les vues officielles. Vivement que l’humiliation des syndicalistes de la SEEG soit un mauvais souvenir à vite oublier dans la restriction des libertés au Gabon. Personne ne gagne à rapidement ramener la peur dans les esprits au Gabon et aujourd’hui, avec ce qui vient d’arriver aux syndicalistes de la SEEG, nombreux pensent la peur est de retour.
Il y a eu ces confrères d’une presse en ligne, envoyés à la DGR par le Procureur de la République de l’ancien et du nouveau régime, pour s’être questionnés sur l’exactitude des sommes retrouvées chez certains des bandits qui nous gouvernaient jusqu’à l’arrivée du coup de libération tant salué à travers le pays. Il y a ces sept syndicalistes, qui au-delà des légitimes revendications salariales, s’étaient permis d’alerter publiquement sur les menaces sérieuses dont ils étaient l’objet. A qui le tour demain ? La presse à nouveau ? Avec toutes ces garanties données par le président de la transition lors de ses premières audiences ? Oligui Nguema prétendait alors que les journalistes avaient pêché sous l’ancien régime par leur silence complice, et que « Les menaces » dont voulait se prévaloir un confrère « Ne tuaient pas ». Nous, nous ne pouvons que le prendre aux mots.
Quoi qu’il en soit, le Le syndicat National des Travailleurs du Secteur de L’Eau et de L’Electricité (SYNTEE+), le syndicat le plus représentatif de la SEEG a déposé le lundi 11 décembre 2023 dernier, son préavis de grève. Préavis de grève qui expire demain 21 décembre. Au terme de celui, le SYNTEE+, après avoir rappeler les entourloupes qui sont devenues monnaie courant au sein de la SEEG pas toujours correct avec ses clients et désormais avec ses employés, notamment : avec « la séquestration lors de la journée du o8 décembre 2023, dans la salle de réunion
du 8ème étage, pendant plus de deux heures des Responsables des trois Syndicats de l’entreprise par le Président du Conseil d’Administration et sa Direction Générale dans
l’attente de l’intervention des forces de l’ordre venues intimider le personnel manifestant pacifiquement » pour revendiquer le paiement de leur 13è mois. En fait, une gratification de fin d’année, donc payable en fin d’année, comme le stipule l’article A50 de leur Convention collective…Pour avoir dénoncé ce banditisme de la part de la direction générale de la SEEG, les leaders syndicaux de cette maison vont en payer le prix. Un prix dont ils viennent de transmettre la note à leur direction générale pour exiger, aussi bien » le paiement de la gratification 2023 sous 48 heures et » le départ du FGIS et de M Lawson du Conseil d’administration « . Comme on le voit, l’étape des leaders syndicaux du B2 ne leur a malheureusement pas fait plier ou se coucher comme d’aucuns pouvaient le penser. Elle a plutôt alimenté leur courage.
Elive Sarah-Noëlle Nyanah-Mbeng