Arrêté à son domicile dans la nuit du 17 au 18 février à Angondjé, dans la zone nord de Libreville, l’activiste pro Ping Carl Mihindou-Mi-Nzamba reste à ce jour introuvable auprès des unités de police et de la DGR, souvent à la base de ce type d’opération (rapt, kidnapping d’opposant ou interpellation abusive). Est-il toujours en vie ou mort ? Une question à laquelle les autorités, dans une forme de silence complice, se refusent de répondre.
Kidnapping, un mode opératoire bien connu
Loin d’une simple disparition, notre compatriote Carl Mihindou-mi-Nzamba a été enlevé la nuit du 17 au 18 février à son domicile selon le même mode opératoire propre aux services spéciaux (renseignements) du régime Bongo : encerclement de la maison, irruption forcée dans le domicile, présentation en tant que membres des forces de police ou de la DGR, perquisition de fond en comble de la maison, puis enlèvement de la personne. Le tout étant très lourdement armé.
Aussitôt informés, des membres de famille ont déjà fait le tour de l’ensemble des postes de police ou commissariats de Libreville, Akanda et même Owendo. Ils se sont même rerndus au B2 et à la DGR pour qu’on leur dise où est serait gardé à vue leur enfant. Mais partout, comme un mot de passe qui leur a été donné, la réponse est « non, il n’est pas chez nous ». Malgré les recherches, ni sa famille ni son avocat n’ont à ce jour aucune information officielle sur le lieu précis de sa détention.
Aux dires de son gardien, « Carl Mihindou a été kidnappé par 7 individus arrivés dans trois véhicules ; un pick-up blanc, une grosse voiture américaine noire semblable celle de l’un des responsables de la DGR et un autre véhicule ». Ceux-ci auraient menacé le gardien de l’abattre au cas où il faisait un faux geste. « Ils ont ensuite appréhendé Carl et l’ont emmené vers une destination inconnue avec son matériel informatique et ses portables », indique la même source familiale. Les parents du concerné s’interrogent sur la raison de ce nouvel enlèvement. « Il n’a aucun lien avec l’Ajev pour être dans la même vague qu’eux. Il ne gère aucun fonds. Il est sans emploi depuis 2016 après avoir été limogé de la société où il travaillait. Que lui reproche-t-on ? », s’interroge l’un de ses frères.
Représentant de Jean Ping à Moabi, dans le département de la Douigny, Carl Mihindou-mi-Nzamba avait déjà été arrêté en septembre 2016 dans le Woleu-Ntem (Mitzic). D’abord transféré alors à la DGR, il avait fini à la prison centrale de Libreville où il avait été hospitalisé pour y avoir été tombé malade. Le 9 novembre 2019, il avait obtenu de la doyenne des juges d’instruction une mise en liberté provisoire. Il était poursuivi pour crime contre la paix publique par le régime Bongo.
C’est le 23 décembre 2019 qu’il avait été vu pour la dernière fois dans une manifestation publique lorsqu’il avait offert des denrées alimentaires aux détenus de la prison centrale de Libreville. Le geste, expliquait-il, avait pour objectif d’aider ceux qui sont privés de liberté à « manger différemment le jour du réveillon ». Le don avait été réceptionné par le représentant des prisonniers, Bertrand Zibi, ancien député du PDG arrêté en 2016 après l’élection présidentielle. Celui-ci a comparu le 17 février dernier, un jour avant le rapt du fils de l’ancien ministre Valentin Mihindou-mi-Nzamba.
Réaction de la Coalition pour une nouvelle République (CNR)
Le mercredi 19 février dernier, la CNR, présidée par le président élu Jean Ping, a fait d’abord observer « quelques semaines seulement après son engagement à respecter les droits et libertés des citoyens dans le cadre du dialogue politique intensifié avec l’Union européenne, le régime dictatorial gabonais n’a cessé violer délibérément ses engagements ». Le même communiqué a poursuivi en disant que suite à son enlèvement par les forces armées du régime, Carl Mihindou-mi-Nzamba « subirait des tortures ». En d’autres termes, les autorités judiciaires et militaires du Gabon savent qui a donné l’ordre de l’arrêter et où il est actuellement séquestré.
Face à cela, la famille a porté plainte contre X auprès du procureur de la République tout en dénonçant le non-respect des procédures prévues en matière d’interpellation et de garde à vue.