« Appel à Agir » a introduit un référé heure par heure pour obtenir une contre-expertise médicale sur l’état de santé réel d’Ali Bongo Ondimba. Cette saisine, si elle aboutit, amènera un collège de médecins neutres à pratiquer des examens approfondis qui détermineront si l’actuel chef de l’Etat est encore en mesure d’assumer pleinement ses fonctions tant de Chef de l’Etat que celle de Chef suprême des Armées. Dans sa frilosité, le gouvernement via le ministre de l’Intérieur, Lambert Noël Matha a fini par brandir le bâton.
Alors que le groupe des dix avait donné une date buttoir au 31 Mars 2019 devant les conduire à mener des actions d’envergure sur l’étendue du territoire national pour exiger la vacance du pouvoir, l’annonce de l’arrivée du chef de l’Etat est intervenue et son retour effectif dès le 23 Mars.
Un communiqué du groupe des dix, sitôt les images de Rabat et de Libreville diffusées, a mis en doute les capacités d’Ali Bongo à assumer ses fonctions. Ce communiqué cité par notre confrère gabonreview.com disait : « «Nous n’avons jamais demandé une preuve de vie. Nous avons demandé la constatation de la vacance du pouvoir. Nous avons affirmé qu’Ali Bongo n’est plus en capacité d’assumer les charges inhérentes à la fonction de président de la République. Les images de son arrivée renforcent notre conviction ». Les membres du groupe de dix repris par le confrère ajoutaient : « « Le peuple gabonais est en droit d’exiger des clarifications. Ce mutisme entretenu pose la question de ses réelles capacités cognitives. Ceux qui ont décidé du retour d’Ali Bongo voulaient éteindre la projection du 31 mars. Mal leur en a pris parce que, à l’évidence, Ali Bongo est sérieusement ».
Il faut dire que les images distillées par les médias, ainsi que celles diffusées dans les réseaux sociaux n’ont pas convaincu le groupe. C’est donc fort de cela que ces derniers, déterminés à voir clair ont saisi le président du Tribunal de Première Instance de Libreville dans une demande en référé pour une décision rapide comme il l’avait promis dans ledit communiqué.
C’est désormais chose faite. Toute la question est : quelle sera la dimension d’indépendance du juge de référé à se déclarer compétent et à rendre une décision d’heure à heure ?
L’on se souviendra que lors de la contestation du document de naissance d’Ali Bongo en juillet 2016, Jean De Dieu Moukagni Iwangou, avait entrepris la même démarche pour obtenir du même juge une décision selon le droit sur ledit document. Ce dernier s’était déclaré incompétent. Mieux, des considérations purement politiques prévaudront sur le droit.
Le Procureur de la République, sur ce dossier, avait simplement placé en avant l’argument non fondé de l’immunité du Chef de l’Etat et que cela étant, ce dernier ne pouvait en aucun cas être traduit devant le Tribunal. Or l’on sait, dans ce cas de figure, que le but n’était pas de juger Ali Bongo Ondimba, Chef de l’Etat, mais de certifier ou non de l’authenticité de son document d’état civil. Il n’est pas à exclure que cet argument spécieux soit remis au goût du jour pour débouter les plaignants. Si c’est le cas, le groupe des dix n’aura pas d’autres voies que de remonter vers les instances supérieures dont la Cour constitutionnel en dernier recours afin de prétendre obtenir gain de cause. Là aussi il y a un hic ; car l’on se souviendra que dès le début de la crise qui a frappé Ali Bongo à Riyad, Maitre Ange Kévin Nzigou avait saisi la Cour constitutionnelle aux fins de commettre une équipe médicale auprès du chef de l’Etat pour s’assurer de son état de santé. Cette dernière n’avait même pas daigné recevoir la requête de l’avocat. Une fin de non-recevoir qui a traduit un parti pris de la part de la Haute juridiction.
A la suite de la démarche de l’avocat, il y a eu celle conjointe des partis politiques dont l’Union national, le Rassemblement Héritage et Modernité et Les Démocrates. Ces formations politiques avaient saisi tour à tour les deux institutions que sont le Sénat et le gouvernement pour les mêmes raisons, mais sans suite. Qu’est ce qui changera en cas de saisine de la Cour constitutionnelle une fois de plus ? Une fois de trop ?
Ce qui change est que le mobile n’est plus le même. Le groupe des dix veut s’assurer, à travers une contre-expertise médicale que le président de la République Ali Bongo Ondimba, brandi comme un trophée par sa cour, est en mesure d’assurer la plénitude de ses fonctions dont celle de chef suprême des Armées. Mieux, on pourra enfin lever la suspicion sur un Ali Bongo réel mais inapte. Et un sosie qui est baladé à souhait pour convaincre les compatriotes que l’illustre malade de Riyad « va très bien » ! Mieux il peut convoquer et présider les Conseils des ministres.
Le plus pathétique dan tout ça, c’est qu’au lieu d’apporter une réponse convaincante au club des dix et à tout le peuple Gabonais, le gouvernement, dans sa frilosité et son esbroufe, opte pour l’intimidation. Accusant ceux qu’il appelle « un groupuscule de compatriote » à « vouloir déstabiliser les institutions de l’Etat ». Il est même allé, toute honte bue, à brandir en épouvantail, le Procureur de la République, « en engageant l’action publique contre toute personne impliqué dans les actes de déstabilisation de notre pays… ». C’est d’ailleurs dans ce sens qu’il va envoyer la police, sa police, empêcher la tenue d’une conférence de presse que voulait organiser le groupe des dix à la Chambre de commerce de Libreville, le dimanche 31 mars 2019.
Voilà des honnêtes citoyens qui invitent l’Exécutif sur le terrain du droit et de la justice, et la réponse est celle de la matraque et de l’oppression. Pourquoi aggraver une situation qui n’est pas déjà aisée au départ ? Il est temps de s’armer de retenus, de recul et de plus de sagesse pour instaurer les conditions du salut national. L’avenir de notre nation se joue et il doit primer sur nos intérêts égoïstes. La force et l’oppression à terme ne peuvent qu’engendrer la violence. Matha doit savoir que le Gabon est un et indivisible. Nous n’avons pas de pays de rechange et nous ne voulons pas être la Centrafrique.