Alors que le nombre de cas augmente petit à petit chaque semaine pour ne pas dire chaque jour que Dieu fait (21 cas au 05 avril 2020), la majorité provenant des pays à haut risque (Italie, France…), une question taraude les esprits des Gabonais : sommes-nous en capacité de tenir en cas de crise majeure (100, 200 voire 1 000 cas positifs au Covid-19) ?
Renforcées par le gouvernement ces derniers jours, les mesures barrières (limitation ou interdiction des transports en commun, selon les cas, fermeture des écoles, couvre-feu) contre le Coronavirus posent au quotidien des difficultés aux populations qui n’y adhèrent pas encore totalement (ouverture clandestine de bars, restaurants, hôtels, transports en commun). Au-delà de la surveillance policière pour les faire appliquer, le gouvernement gagnerait à renforcer la transparence au plan épidémiologique et la communication avec les masses médias pour une véritable prise de conscience volontaire.
L’Italie, l’Espagne et la France bien débordées
Ce sont des pays que nous prenons souvent en exemple dans bien de domaines, y compris au plan hospitalier. Le défunt Omar Bongo est parti mourir dans une clinique espagnole en 2009. Les hautes personnalités gabonaises et africaines aiment bien aller se faire traiter en France, mais avec la survenance du Covid-19, ces pays « modèles » en matière d’infrastructures et d’expertise médicales ont montré qu’ils n’étaient pas capables de faire face à cette pandémie.
Fait méconnu, l’Italie, qui a le nombre de morts le plus élevés du Covid-19, possède l’un des systèmes de santé les plus robustes au monde. Un classement de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) lui accorde la deuxième place au monde pour son efficacité générale, juste derrière la France. Le Canada occupe le 30è rang. L’indice tient notamment compte de la santé générale de la population, des inégalités de santé, du niveau de réactivité du système et de l’aspect équitable de son financement. Mais aujourd’hui, l’Italie manque de lits, d’appareils respiratoires, on trie même les malades pour sélectionner qui on va soigner ou qui va aller « mourir » à la maison…
En France, le Covid-19 bat aussi des records journaliers du nombre de morts, soit une moyenne de 300 par jour. Plus qu’une guerre civile dans un pays. Au début de la crise, la France comptait 5 000 lits en réanimation. Elle va maintenant passer à 14 000 lits face à la crise et la capacité à tester la population va être amplifiée jusqu’à atteindre 80 000 tests par jour fin avril. Les évacuations sanitaires entre villes ne se comptent plus, même vers l’Allemagne, la France envoie ses malades, faute de capacité pour les prendre en charge dans certaines régions.
L’Espagne a connu en mi-mars le pic de 1 500 nouveaux cas par jour. Actuellement, les hôpitaux sont débordés, plus de place pour mettre en quarantaine et soigner les malades du Covid-19. A la capitale, Madrid, la plus touchée du pays aussi, l’armée aide à transformer des pavillons de la foire commerciale en hôpitaux de campagne où des patients sont transférés.
Quid du Gabon en cas de…déferlante du Covid-19 ?
En effet, il est évident que les mesures de protection individuelle et collective renforcées ces derniers jours sont difficiles à supporter, parfois même à accepter quand on regarde la gêne occasionnée aux plans familial et économique. De même, il faut se dire, les yeux dans les yeux, n’en déplaise à certains, que nous ne disposerons pas des moyens techniques (masques respiratoires, médicaments, etc.) et des ressources humaines suffisantes pour faire face à la maladie si jamais elle se propageait à une échelle plus grande dans tout le pays en même temps. C’est d’ailleurs le sens des propos, mal pris par certains, du Secrétaire général de l’Onu sur les ondes France 24 et RFI il y a deux semaines en faisant part de ses craintes pour le continent africain où la propagation du virus pourrait conduire à des millions de morts et de personnes infectées.
Après les provinces du Woleu-Ntem, de l’Ogooué-Ivindo, du Haut-Ogooué, du Moyen-Ogooué et de l’Ogooué-Maritime, servies le lundi 30 mars, les provinces de la Nyanga, de l’Ogooué-Lolo, de la Ngounié et de l’Estuaire ont aussi été livrées. Chaque lot comprend 3 000 équipements de protection individuelle (Épi) pour les personnels soignants, 215 thermo-flashs, 100 000 masques chirurgicaux et 1 008 gels hydro-alcooliques.
Cependant, ces dotations ne rendent pas suffisamment compte de l’enjeu d’une riposte. Elles ne rentrent que dans le cadre d’une prévention, mais pas dans celle d’une véritable riposte. L’absence de médicaments et d’appareils respiratoires, le non aménagement aussi bien à Libreville qu’à l’intérieur du pays des hôpitaux dits de campagne (provisoire) dans des espaces aménagés (salle de cinéma, complexes sportifs, etc.) en prévision d’une vraie riposte de guerre montrent à suffisance que le discours officiel notamment celui tenu par Ali Bongo le vendredi 03 avril 2020, n’est pas suivi sur le terrain de mesures qu’il faut en cas de…propagation massive.