«Sous la haute présidence de Monsieur le vice-président de la République, Pierre Claver Maganga Moussavou, le Conseil des ministres se tiendra ce vendredi, 16 novembre 2018 à 11h 30 dans la salle habituelle au palais de la présidence de la République.», pouvait-on lire hier soir dans les canaux de communication du régime. L’homme a certainement trouvé la nuit longue et certainement la journée qui commence pour lui. Oui, aujourd’hui est un grand jour pour le vice-président de la République qui va enfin jouir du statut de demi-président de la République qui convoque et préside la haute instance de prise de décision de l’Etat, à savoir le Conseil des ministres. Emmanuel Issoze Ngondet, Alain Claude Bilie-By-Nze, Régis Immongault Tatangani, Jean-Fidèle Otandault Adjahou, Madeleine Berre…
Il va tous les passer solennellement en revue, question de leur faire comprendre que, désormais, après Mborantsuo, l’autorité suprême, c’est lui. Et comme aimait à le dire Mobutu au Zaïre : « Celui qui n’est pas content sera content ! ».
On imagine les mines de certains ministres, sinon le plus grand nombre qui, jusque-là, le traitaient avec dédain et mépris du fait qu’il ne vient pas de leur écurie. Mieux, que son parti s’est fait tabasser chez lui à Mouila lors des dernières élections couplées. Tout ça, c’est derrière lui. L’enfant de Moutassou se voit en train de donner la parole à ces émergents avec, bien sûr, la stature de chef, pour ne pas dire de président de la République avec les attributs du pouvoir qui vont avec. Et comme son fils Biendi est aussi membre du gouvernement, les deux hommes ont certainement passé la nuit à préparer la solennité de l’événement de ce jour.
En faisant ce qu’elle vient de faire, à savoir modifier nuitamment la Constitution pour maintenir les intérêts du clan, sans le savoir, Marie Madeleine Mbrantsuo a ouvert une porte qu’elle aura des difficultés à refermer demain. Aujourd’hui, les récriminations ne viennent pas seulement de l’opposition et de la société civile. C’est toute la République, ou presque, qui semble ne pas comprendre pourquoi la tour de Pise est allée aussi loin, au point de soulever l’ire des sages de la République. Dans les rangs du PDG, même si on ne le dit pas haut, nombreux pensent tout bas que la tour de Pise, par cette mesure de modification en solo de l’article 13 de la Constitution, risque d’entrainer le pays vers des lendemains incertains. Déjà, l’opposition et la société civile sont en train d’appeler à la mobilisation afin de contraindre Mborantsuo à reculer dans sa tentative à diriger le pays par « autorisation ».
Ainsi, en acceptant, pour son prestige personnel, de convoquer et de présider un Conseil des ministres sur la base d’une décision anti-constitutionnelle, le demi-président de la République, Pierre Claver Maganga Moussavou, devient, lui aussi, complice de ceux et celles qui ont pris cet acte illégal et lourd de conséquences aussi bien pour le pays que pour le régime en place.
Parlant du régime, il n’est pas exclu que, dans les jours qui viennent, les contradictions internes graves qui le minent actuellement explosent au grand jour et le mettent en lambeaux. Il est encore temps, pour ceux qui aiment ce pays et qui peuvent donner un conseil à ces aventuriers qui tentent de le conduire vers des lendemains incertains, de le faire maintenant. Il est temps que l’on comprenne que le refus de la violence par le peuple gabonais est loin d’être de la trouille, encore moins du laxisme. Et si tel est le cas, évitons tous que ce laxisme atteigne son paroxysme.
Au demi-président Pierre Claver Maganga Moussavou, nous souhaitons un très bon Conseil des ministres. Lui, l’opposant, va pour la première fois de sa vie, présider une assemblée qui est l’émanation de la majorité au pouvoir. Il ne va certainement pas bouder son plaisir. Malheureusement un plaisir amer, car fruit d’un coup de force de la Cour constitutionnelle.
Les choses vont-elles rester en l’état ? C’est au peuple gabonais d’apprécier !