Le président de l’Assemblée nationale du Gabon et élu de Pana, dans l’Ogooué-Lolo, court depuis la semaine dernière derrière le chef de l’Etat pour tenter de faire aboutir une proposition de loi en faveur de la parité homme-femme lors des consultations électorales. Il foule ainsi au pied le principe de la séparation des pouvoirs entre le législatif et l’Exécutif.
Laurent Lépéguet, son colistier depuis au moins les deux dernières législatures, devrait commencer à se faire du souci. Sauf si l’actuel président de l’Assemblée nationale est promu d’ici les prochaines échéances législatives ministre de la République en charge de la Promotion de la femme et de l’Egalité des chances dans le paysage politique gabonais, offrant ainsi à son suppléant l’opportunité de siéger à l’Assemblée nationale.
Si cette hypothèse ne devient pas réalité d’ici-là, le camarade Lépéguet devrait alors commencer à se chercher électoralement ailleurs, tant la détermination du député de la Lolo-Bouenguidi de faire de la place à la femme devient intenable.
Alors que nous sommes pratiquement en fin de mandature et que la production législative de l’institution que le PDG contrôle totalement reste invisible en termes de propositions de lois conçues par ses élus nationaux, Faustin Boukoubi trouve subitement qu’il y a urgence à proposer une loi pour favoriser l’égal accès des hommes et des femmes aux mandats octroyés par un électorat pourtant majoritairement féminin. Comme s’il existait à ce jour une disposition qui restreindrait l’accès de nos sœurs à la sphère décisionnelle politique. Il n’est que de jeter un regard dans le Moyen-Ogooué pour s’en convaincre. Là-bas, ce n’est pas la parité, c’est la razzia !
En tous cas, sous le magistère d’Ali Bongo Ondimba, aucun de ses opposants ne peut nier que des efforts considérables ont été faits pour plus de visibilité, à tous les niveaux, de nos compatriotes du sexe opposé. Pour en arriver-là, le chef de l’Etat gabonais avait deux atouts : son gouvernement, où des femmes occupent les premières places, et son épouse dont l’engagement en faveur de ses sœurs et belles-sœurs est indéniable.
L’excitation du président de l’Assemblée nationale, qui avait travaillé, pour ainsi dire, à valider une certaine concurrence à la femme gabonaise, ne se comprendrait plus. Sauf à vouloir semer la zizanie au sein d’un pouvoir où les tendances se regardent de plus en plus en chiens de faïence au seuil des élections.
Le Parti démocratique gabonais, dont Faustin Boukoubi est le produit politique privilégié, tient tous les rouages du pouvoir au Gabon bien avant même que l’actuel président de l’Assemblée nationale n’entre au Parlement en 1996 et au gouvernement pratiquement dans la foulée.
La loi, c’est ce camp politique qui en a le privilège, aussi bien dans l’initiation au gouvernement et au Parlement que dans sa stricte application.
En élevant dernièrement Rose-Christiane Ossouka-Raponda à la vice-présidence de la République, le chef de l’Etat n’a pas eu besoin d’une loi. Et si telle avait été sa volonté, l’actuel Premier ministre n’aurait pas rechigné à mettre en place une équipe gouvernementale paritaire avec 22 femmes et autant d’hommes.
Suivant la même logique et à l’occasion des prochaines élections législatives, ce n’est pas le secrétaire général Steeve Ndzegho Dieko qui pourra se mettre au travers d’une décision du distingué camarade président qui consisterait à aligner, pour le compte du parti au pouvoir, autant de femmes que d’hommes, titulaires comme suppléants, sur les 141 sièges de députés que compte le Gabon.
Faustin Boukoubi n’ignore rien de tout ce dispositif comme il ne peut feindre d’ignorer le pouvoir qu’a l’Exécutif de légiférer par ordonnance.
Qu’est-ce qui ferait donc courir le président de l’Assemblée nationale au moment où des problèmes plus urgents préoccupent l’ensemble des Gabonaises et Gabonais à travers le pays ? L’envie de plaire à la première dame ou le besoin de faire parler de lui à tout prix ?
Ce sont des questionnements qui taraudent les esprits depuis que, faisant fi de la séparation institutionnelle des pouvoirs de l’Etat, le patron du pan législatif est allé requérir le soutien du chef de l’Exécutif pour espérer faire aboutir un projet qu’à l’évidence la composition actuelle de l’Assemblée nationale du Gabon ne pourra laisser prospérer aussi facilement. A moins que l’on procède, comme d’habitude, par des encouragements…pécuniaires. Et c’est probablement-là le véritable objectif visé.
Nkwara Mendzime