Cela fait plus de trois semaines que le jeune activiste des bords de l’Ogooué, Crépin Dieket, est incarcéré au pénitencier de Lambaréné pour activisme. Interpellé par la Ddirection générale des recherches (DGR), il lui serait reproché d’avoir écrit des choses pas bien sur l’ancienne maison des Rogombé qui, dans un passé récent, servait de siège à la mairie du premier arrondissement. Mais au fond, on parle plutôt de ses coups de gueule contre le régime assassin et criminel de Libreville.
Comme on le voit, la dictature des émergents est en train d’étendre ses tentacules à l’intérieur du pays. On raconte que l’ordre d’arrêter et de mettre le jeune homme serait venu d’en haut, sauf que c’est vague de dire « en haut ». En haut-là, c’est qui ? Même du temps du dictateur local, Georges Rawiri, on n’en était jamais arrivé à de tels dérapages. Rappelons que les publications et les prises de parole sur sa page Facebook ont souvent dérangé au plus haut point la hiérarchie locale du PDG. Et comme on dit là-bas, au sein de ce parti, « le pays est géré », donc là où moi aussi je suis, en qualité de PDGiste, je gère. Et comme on PDG on gère par la dictature et l’oppression, des jeunes comme Crépin Dieket en viennent à faire les frais et à payer le prix de leur témérité.
Tout le monde a vu les graffitis rouges sur la barrière de l’ancienne mairie du premier arrondissement où on pouvait lire : « Ali Bongo est mort ». C’est un fait. Encore faudrait-il apporter la preuve que c’est lui qui est à l’origine de ces graffitis avant d’envoyer des éléments de la DGR aller le cueillir dans son bar comme un vulgaire bandit de grands chemins et le jeter au gnouf comme un malpropre. Le pouvoir émergent, il faut le rappeler, est tellement cynique qu’il peut lui-même poser un acte et vous le mettre sur le dos lorsqu’il cherche à vous coller un motif. « Le petit était dans le viseur depuis. Il paie juste le prix de son activisme sur les réseaux sociaux », nous a avoué un agent des forces de l’insécurité du régime en poste à Lambaréné. On comprend tout.
Excepté d’être privé de sa liberté, nous apprenons que le jeune bagnard se porte bien, qu’il a un moral d’acier. Au gnouf, il est l’attraction des autres taulards qui l’aident à traverser cette épreuve de la vie d’un vrai homme avec beaucoup de courage. Tant qu’on n’a pas volé, tué, violé…, aller en prison pour un combattant de la liberté est plutôt un acte d’oppression. La victime devient un martyr. Et lors de sa sortie, il est accueilli comme un héros de guerre.
Arrêter un jeune compatriote parce qu’il pourfend une dictature, l’une des plus impitoyables d’Afrique, n’a pas de sens. Les Bongo et apparentés ont tout arraché aux Gabonais. Maintenant on nous refuse même de faire usage de la seule chose qu’on pensait qu’ils nous avaient laissé : la parole. Comment alors s’étonner de cette conspiration du silence qui gagne en ce moment le pays, en commençant par le Haut-Ogooué ?
Courage, Crépin ! Certain que tu seras libre et tu pourras à nouveau humilier tes bourreaux. Montesquieu nous rappelle ceci : « La justice qui se met du côté du criminel devient elle-même criminelle et la victime, un héros ». Ailleurs il dit : « An soir de la libération, on n’embrasse pas les collabos, on les fusille ».
C’est vrai que dans ce « pays de merde » nous sommes encore trop nombreux à penser qu’il y aurait une sorte de fatalité, un destin implacable qui empêcherait tout changement en profondeur et que les Bongo seront au pouvoir ad vitam aeternam. Heureusement que pour d’autres, la liberté s’arrache. Continuons la lutte ! Certain qu’un jour, au prix du sang versé pour la libération du pays, notre pays connaîtra un changement en profondeur.