Objet de toutes les attaques depuis quelques jours pour avoir osé revendiquer de meilleures conditions pour ses coéquipiers, Pierre Emérick Aubameyang (Péa), capitaine de l’équipe nationale de football Les Panthères du Gabon et Ballon d’or africain, attaquant de prou d’Arsenal (D1 Angleterre), est devenu la honteuse cible des sbires du régime Bongo après le récent couac de la fausse nomination de son père au poste de coach des Panthères et son refus d’aller jouer au Soudan du Sud pour une affaire d’avion.
Un énième litige qui prend, au fond, une dérive tribaliste et anti-fang primaire à travers les réseaux sociaux et une certaine presse.
De quoi se plaint PEA ?
En qualité de capitaine des Panthères, Pierre Emérick Aubameyang a souvent eu des prises de bec avec les dirigeants du foot gabonais concernant les conditions de traitement et d’encadrement de ses coéquipiers. Ce n’est pas un problème personnel de primes qu’il exigerait à la fédération. Dans ce cas on l’aurait traité d’« enfant gâté », d’« égoïste ». Mais qu’un capitaine se plaigne que ses coéquipiers ont droit à des conditions minimales de toute équipe de football, on ne comprend pas la cabale stupide et aveugle que certains ont engagée contre lui pour avoir osé, dans l’intérêt général, demandé entre autres : un avion sécurisé, un hôtel propre, une alimentation, des moyens de transport pour les joueurs appelés en sélection nationale et évoluant à l’étranger, des primes de match, un suivi médical, etc. Daniel Cousin, qui est aujourd’hui le coach des Panthères, ne mentira pas qu’au temps où il évoluait en France, il ne se plaignait pas comme Aubameyang pour les mêmes soucis logistiques et d’intendance que les dirigeants du ministère des Sport et du Fonds national du développement du sport (FDS) sous-estiment tout en exigeant aux jeunes des performances. Comme dans ce pays il ne faut pas se plaindre, il faut se taire et ne pas revendiquer ses droits, le jeune sportif est pris à parti.
On parle d’indiscipline. C’est quoi précisément l’indiscipline dans ce contexte ? N’a-t-on pas appris que la sélection des Panthères qui est allée jouer ce match de tous les dangers à Juba est restée coincée là-bas après le match parce que…l’autre avion, finalement affrété par les « hautes autorités » après la contestation d’Aumabeyang, a aussi connu des soucis ? Pour un joueur qui a son propre jet privé (avion), a-t-il vraiment besoin de risquer sa vie (ainsi que celle des autres joueurs, les enfants des autres) parce que des gens font des calculs et des économies sur des budgets destinés au sport gabonais pour obtenir des ristournes ou des queues de budget pour se les partager ? On veut mettre en avant ses coups de gueule, mais quid des frasques connues de tous dans ce milieu politico-administratif du football gabonais dominé par un président de fédération élu au forceps et des bureaucrates nommés en conseil des ministres qui sont assis sur le pognon du foot gabonais ? Aujourd’hui, par médias interposés, grâce à la réaction de l’« enfant gâté », on s’accuse mutuellement de mauvaise gouvernance. Comprenez donc détournement, corruption autour de l’argent du foot gabonais. Quand des fils à papa sont parachutés conseillers, DG d’administrations et de sociétés para-publiques et foulent l’argent du pays à leurs pieds, on aurait aimé voir les même zélés tirer sur eux à boulets rouges. Vu que l’« affaire Péa » est d’une certaine consonance ethno-linguistique (fang), on en fait une affaire d’Etat. Pitié pour ce pays !
PEA, un noble combat pour le pays
D’autres handicapés intellectuels et tribalistes primaires vont, à bras raccourcis, jusqu’à dire qu’il n’a qu’à quitter la sélection nationale. « Pourquoi sont-ce toujours les Fang qui aiment se faire voir ? », lit-on ici et là dans les réseaux sociaux et entend-on dans certaines conversations. De quoi parle-t-on au juste ? Voilà un jeune qui est même plein de patriotisme parce qu’il a accepte de venir défendre le pays de ses origines, sachant qu’il ne doit rien au Gabon : ni sa formation, ni une bourse, ni quoi que ce soit. Il aurait pu jouer pour un autre pays européen, notamment la France, ou se contenter d’évoluer dans des clubs de haut niveau (St Etienne, Dortmund, Arsenal) où il gagne honnêtement sa vie et richement sans venir subir les foudres de la part de profito-situationistes qui doivent tout à l’Etat gabonais mais volent et pillent ce même Etat et passent pour des gens sérieux en écrivant n’importe quoi dans la presse à leur service alors que ce sont eux qui plombent le pays dans tous les domaines (économie, administration, sport, santé, éducation, mœurs). Du vrai n’importe quoi !
Si Aubameyang, qui ne joue pas en tant que Fang, mais en tant que Gabonais d’abord, n’était pas un patriote, il n’aurait pas continué à ce jour d’évoluer au sein de cette sélection nationale. Il a contribué au rayonnement extérieur de ce pays grâce à son talent, mieux que de nombreuses ambassades qui coûtent des milliards annuels à l’Etat gabonais. La diplomatie du sport, voilà ce qu’il incarne pour ce pays. Un lauréat du Ballon d’or qui a fait que l’Allemagne redécouvre le Gabon autrement ces dernières années. On aimerait savoir combien avant lui ont apporté à ce pays cet honneur d’avoir un Ballon d’or ? Pour avoir osé dénoncer l’amateurisme et la mauvaise gestion des moyens alloués aux Panthères, dans un contexte où, depuis 2012, le peuple gabonais a presque tourné le dos à une sélection qui n’a plus fait honneur au pays, le fils de Yaya est traité pire qu’un criminel.
Il faut se souvenir de la piètre participation du Gabon à la Can 2015 en Guinée Equatoriale et à celle de 2017 organisée ici même à Libreville. En cause, les mêmes pratiques de détournement et d’immixtion politique dans le fonctionnement et la sélection des joueurs qui doivent être sur le terrain pour représenter le Gabon.
Est-il le seul joueur africain de cette envergure qui, par son attitude, fait en sorte qu’au final les choses bougent dans le bon sens ? Voilà des dossiers qui doivent intéresser la Cour des comptes et le parquet pour connaître les tenants et les aboutissants des contrats autour des voyages, des hôtels, des locations d’avions, des équipements, des primes de l’équipe nationale, des subventions de la Caf et de la Fifa ainsi que du Fonds national de développement du sport. C’est le vrai débat pour faire gagner au Gabon une coupe d’Afrique avec des joueurs de talent comme Péa et ses coéquipiers.