« Celui qui boude, il bouge ». Ce slogan, devenu viral dans les réseaux sociaux, a été lancé par Brice Laccruche Alihanga, directeur de cabinet d’Ali Bongo, lors de son passage le samedi 5 octobre 2019 dernier au stade de Nzeng-Ayong, dans le 6ème arrondissement de la commune de Libreville, à l’occasion de la tournée nationale qu’il a entreprise depuis plusieurs semaines pour, dit-il, transmettre le message de son patron aux Gabonais.
Et de la bouderie, il y en a eu dans la semaine. Le premier à bouder – et qui a effectivement bougé – se nomme Arnauld Engandji Alandji. L’autre, Karine Cécilia Arissani, général de troupes et commandant en chef des « soldats têtus » (une appellation assez évocatrice), est pratiquement entrée en guerre ouverte en canardant à volonté les troupes de l’Ajev. Et il faut tout de même noter que ça se la joue au bord du feu, avec de l’essence en main, entre protagonistes du Haut-Ogooué.
Ainsi, poursuivant sa tournée nationale entamée en juillet dernier dans la province du Haut-Ogooué pour transmettre aux populations gabonaises le message de son chef, le directeur de cabinet d’Ali Bongo, Brice Laccruche Alihanga, s’est retrouvé au milieu des populations de Nzeng-Ayong, au stade qui porte le nom éponyme. Ce qui, au vu de l’organisation, a marqué les esprits des populations présentes à cette rencontre était vraisemblablement l’arrivée « inattendue » d’Ali Bongo sur le podium. Car, en effet, il faut dire que depuis les soucis de santé d’Ali Bongo survenus à Ryad, en Arabie Saoudite, il y a bientôt un an jour pour jour, très peu de Gabonais pouvaient se targuer d’avoir approché leur président comme ce fut le cas au stade du quartier Nzeng-Ayong, l’un des plus grands de notre pays.
Pourtant, de cette rencontre où Ali n’a pas été loquace, normal puisque son directeur de cabinet se chargeait déjà de transmettre son message, on ne retiendra presqu’uniquement que ce slogan de Brice Laccruche Alihanga, devenu viral sur la toile, « celui qui boude, il bouge ». Et depuis, les commentaires et des interprétations n’arrêtent plus sur internet comme dans les conversations réelles. D’aucuns, tournant cette boutade en dérision à travers des caricatures humoristiques, d’autres, à tort ou à raison, la reliant à la sortie du gouvernement du ministre Arnaud Calixte Engandji Alandji, comme quoi, ce dernier aurait boudé le portefeuille de la Décentralisation, la Cohésion et du Développement du territoire qui lui avait échu lors du remaniement ministériel du vendredi 4 octobre dernier. Dans tous les cas, ce slogan du DCPR n’a laissé que peu de Gabonais indifférents.
Certains compatriotes se demandent d’ailleurs si le maintien au gouvernement n’est plus lié à l’efficacité de l’action de chaque membre, mais plutôt à une totale soumission. Quelqu’un a ainsi posté ceci sur sa page Facebook, « sans encourager celui qui boude un portefeuille ministériel ni blâmer les sanctions qui s’ensuivent, mais déclarer publiquement que « celui qui boude, il bouge » pourrait, hors de son contexte, s’apparenter à un slogan totalitaire ou autoritaire ». En effet, Wikipédia nous enseigne que les caractéristiques habituellement retenues pour définir le totalitarisme sont, d’une part, un monopole idéologique, c’est-à-dire la conception d’une vérité qui ne supporte aucun doute, ne tolère aucune critique, est imposée à tous et se trouve orientée par la lutte contre les ennemis du régime et, d’autre part, un parti unique qui contrôle la totalité de l’appareil étatique…
Il est bien vrai que notre pays le Gabon n’est pas très loin des caractéristiques décrites plus haut et les conséquences face à un régime où on ne doit plus exprimer ses contradictions, de peur de se voir exclure, peuvent être dangereuses. Et qu’adviendra-t-il des boudeurs du régime en place : bouger du pays ?
Ça boude et ça bouge dans le Haut-Ogooué
Ainsi, la guerre de positionnement sur fond d’humiliation que se livrent actuellement les troupes de l’Ajev et les « soldats têtus » est assez révélatrice du climat qui règne au sein du régime en ce moment. Avec, en fond, des contradictions internes et graves dans le Haut-Ogooué.
Visiblement, le climat qui prévaut dans le Haut-Ogooué en ce moment inquiète plus d’un et montre à suffisance que ceux qui tiennent les leviers de l’Etat ne savent pas comment régler la question du Haut-Ogooué. Veulent-ils seulement la régler ou peuvent-ils la régler ? Toute la question est là. Depuis la maladie d’Ali Bongo, une bonne partie du destin du Gabon se joue là-bas. On sait désormais comment on a failli éjecter Marie-Madeleine Mborantsuo et comment elle a réussi à sauver son fauteuil. Rien qu’à ce niveau, on comprend que plus rien ne sera comme avant et qu’elle fera tout pour faire payer à ses comploteurs leur conspiration dès qu’elle en aura l’occasion.
Quelqu’un qui a passé son temps à bouder et qu’on a fait finalement bouger de son rang de militant du PDG et déchu de son mandat de député sans qu’il ne trouve à redire est le roi téké Ali Akbar Onanga. Le même sort vient de tomber sur un autre Altogovéen, Lambert Noël Matha. Celui-là même qui avait humilié le général Célestin Embinga avant de le virer de la DGDI (ancien Cedoc). C’est lui également qui avait pris la décision de priver de sortie du territoire BLA qui tentait de se rendre à Ryad pour voir Boa…La liste des cadres émergents du Haut-Ogooué qui ont aujourd’hui rejoint le maquis est longue. Reste à savoir si, pour pouvoir survivre, les « maquisards » ne vont pas se fédérer et former une force rebelle pour revenir punir ceux qui les ont mis en jachère non sans pactiser avec les anciens amis d’Obo mis en jachère par eux-mêmes, les amis de Boa, lorsqu’ils avaient usurpé le pouvoir. N’oublions pas que Lemboumba est en embuscade depuis qu’il a quitté le palais. Paul Toungui n’a pas encore totalement baissé les armes. Engandji, qui vient de claquer la porte du gouvernement, va-t-il faire profil bas et rester dans son coin ou va-t-il, au moment où il est devenu un buffle aux longues cornes, tisser de nouvelles alliances pour rebondir demain ? Tic-tac, tic-tac !