Après la disparition du patriarche Omar Bongo Ondimba en 2009, les crimes financiers et les détournements d’argent public ont augmenté dans notre pays façon vertigineuse avec l’investiture d’Ali Bongo Ondimba à la tête de l’Etat. Regard sur les réseaux des biens mal acquis (BMA) du clan Bongo qui pille le pays et accumule cet argent à l’étranger, notamment en Angleterre, car trop pourchassés en France ces dernières années (à partir de la communication de Persis Lionel Essono Ondo, secrétaire exécutif de Réagir France, présentée à la conférence panafricaine sur les biens mal acquis à Paris le 18 octobre 2018).
Le clan Pascaline
La première enquête des BMA, qui étend son champ d’investigation jusqu’à 2008, met en lumière une accumulation indécente de patrimoine meuble et immeuble qui concerne en réalité surtout les enfants d’Omar Bongo, dont Pascaline – régulièrement qualifiée d’argentier de la famille, – et son frère Jeff Bongo, fonctionnaire au Trésor. Cela décrit en fait l’ossature et le mode opératoire du premier gang organisé (ouvertement) au sommet de l’Etat au bureau du directeur de cabinet du président. Profitant de l’affaiblissement de son président de père, qui n’est évidemment pas exempt de tout reproche, Pascaline Bongo Ondimba a organisé des hauts fonctionnaires, essentiellement du ministère des Finances, pour faire main basse directement sur les ressources de l’Etat et en disposer à sa guise. C’est ainsi qu’on observa des dépenses et acquisitions de tous types (véhicules, chèque tiré du compte de la paierie en France, affrètement d’avions pour près de 90 millions de dollars en 15 mois, etc.) directement payées par les comptes de l’Etat. Cela fut possible notamment par l’implication de son frère Jeff Bongo, chargé des règlements au Trésor publics,qui, à son tour, apparaît, pour ces années-là, à toutes les pages de cette enquête.
Il est à noter que cette enquête aurait facilement pu être élargie à d’autres membres de ce qu’on appelle le gang Pascaline, en plus de son frère précité, mais aussi à d’autres membres de son entourage immédiat du ministère des Finances ou non. En effet, des informations ont, par exemple, démontré que, dans des opérations opaques avec la multinationale Sino Hydro, Pascaline est en association avec la famille Ping, notamment son fils Franck Alain. Lors de la campagne d’août 2016, le candidat Jean Ping fut interpellé par rapport à ces faits et il s’est démarqué de » son fils majeur « .
Il y a des hauts fonctionnaires, comme Paul Toungui, ministre des Finances, pour une seconde fois de 2002 à juin 2009 et compagnon de Pascaline. Il est difficile d’imaginer qu’il n’était pas informé, donc complice actif ou passif des agissements de sa compagne sur les deniers publics dont il avait précisément la charge.
Le trésorier payeur général Blaise Louembé Kouya, notoirement proche de Pascaline Bongo Ondimba, a forcément permis ces décaissements. Il doit être visé individuellement. D’autres complices sont sur la chaîne budgétaire. Je pense notamment au directeur général du budget de l’époque, Okologho Juste Valère, qui est d’ailleurs sous le coup d’une enquête. Toutes ces personnes possèdent des biens immobiliers en France et en Amérique. Ces biens sont, par extension, des biens de la corruption relevant de la convention de Mérida.
Tous les membres de ce réseau n’ont pas encore été entendus par la justice dans le cadre de l’affaire des biens mal acquis. Il faut élargir les investigations sur le patrimoine de ces personnalités du clan Pascaline au même titre que les membres du clan Ali Bongo-Maixent Accrombessi.
Le clan Ali Bongo Ondimba Maixent Accrombessi
L’enquête sur les BMA doit connaître un nouveau tournant avec l’arrivée au pouvoir d’Ali Bongo en 2009. Dès lors, le tandem Accrombessi Maixent/Ali Bongo n’a qu’une seule ambition : atteindre et dépasser le niveau d’enrichissement illicite du clan Pascaline.
Le même mode opératoire est mis en place : Accrombessi, le directeur de cabinet, et des hauts fonctionnaires du ministère des Finances et des Hydrocarbures sont organisés en gang Accrombessi : hôtels particuliers ; patrimoine immobilier d’Ali Bongo et d’Accrombessi et associés… ; affrètement et achats d’avions.
Nous pourrions étendre à la complicité active ou passive à quelques hauts fonctionnaires :
– Magloire Ngambia, actuellement incarcéré à Libreville, est soupçonné d’avoir détourné plus de 200 milliards de Fcfa. Excusez du peu ;
– Etienne Ngoubou, ministre du Pétrole (ancien bagnard en liberté provisoire)… précipitamment libéré sous caution pour cause électorale.
Ces deux malheureux, prenant notoirement leurs ordres auprès de Maixent Accrombessi, ont fini en prison pour règlement de comptes intra-gang.
Le duo Accrombessi/Ali Bongo n’a jamais été entendu par la justice du fait, d’une part, de l’immunité présidentielle pour Ali Bongo et, d’autre part, grâce la protection intra-gang pour Maixent Accrombessi. Or, il est établi que Maixent Accrombessi est le gérant de l’hôtel particulier de la rue de l’Université à Paris. Que ce bien d’exception a été acquis avec de l’argent public gabonais de l’ordre de 150 millions d’euros. Les travaux de rénovation dudit bien ont été évalués et payés à hauteur de 100 millions d’euros, soit une valeur de 250 millions d’euros (environ 300 milliards de francs cfa). Cette somme correspond au budget de la ville de Libreville sur 6 ans. 300 milliards, c’est légalement le budget du ministère de l’Education nationale sur 4 ans.
D’ailleurs, la plupart des membres de ce gang font l’objet de poursuites judiciaires en France pour association de malfaiteurs. Accrombessi, Mborantsuo sont poursuivis pour des faits de corruption et de détournement de fonds publics.
En effet, lorsque, dans un pays, la présidente de la Cour constitutionnelle, les principaux ministres financiers, le directeur de cabinet du président et son entourage le plus proche sont tous soit incarcérés soit mis en examen, toujours pour des motifs relevant des crimes financiers, on est dans le chaos éthique, celui où les détenteurs des pouvoirs publics les utilisent pour commettre massivement des crimes financiers.
Voilà les réseaux qui sont actuellement à l’œuvre dans le noir pour empêcher que ce pays ne change et font tout pour empêcher la procédure de l’article 13 de la Constitution pour qu’on aille vers une nouvelle élection présidentielle et voir enfin l’avènement d’une nouvelle République débarrassée d’apatrides et de traîtres de la Nation qui la pillent.
Mais une chose est sûre, le temps de Dieu est le meilleur et il est déjà en marche contre eux. Leurs détournements expliquent pourquoi le Gabon n’a pas de routes, pourquoi les frais d’inscription et de scolarité augmentent dans les écoles et les universités, pourquoi les hôpitaux n’ont pas le minimum pour soigner un blessé ou un malade aux urgences. Leurs détournements expliquent pourquoi les jeunes sont au chômage, pourquoi les salaires des fonctionnaires sont menacés de non-paiement d’un mois à l’autre. Leurs détournements, ajoutés à leur entêtement à s’accrocher au pouvoir (refus d’admettre l’incapacité de Boa à diriger encore leur gang à la tête du pays), seront la cause d’une implosion sociale tôt ou tard, car à un moment ou à un autre, le Peuple gabonais, se saisissant de la déclaration des droits de l’Homme, marchera et récupérera, à leurs dépens cette fois-ci, sa liberté et sa dignité.