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Chronique politique/Transition gabonaise/ Constitution : L’hétéronomie politique et économique

Le paysage politique gabonais est, ces derniers temps, mis en ébullition par le projet de constitution rendu public au départ par doses homéopathiques qui incitaient certains gabonais, sans l’avoir lu, à demander à voter en faveur de son adoption lors du prochain référendum.

La construction d’une identité

Généralement, la Constitution est définie comme l’acte par lequel on règle les droits politiques d’une nation, la forme de gouvernement et l’organisation des pouvoirs publics. L’identité nationale étant la conception intime de l’identité d’un peuple, la constitution est l’acte par lequel une société se construit une identité et ouvre la voie de la dignité.
En s’emparant du pouvoir le 30 août 2023, le général de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, la main sur le cœur, avait promis restaurer les institutions ainsi que la dignité aux Gabonais saccagée par plus 56 ans de régime atypique Bongo-PDG. En quête de la mise en place des institutions fortes, les constitutionnalistes du CTRI auraient gagné à explorer toutes les possibilités d’établir des institutions capables d’ipséité. Avec l’intégration de nos valeurs sociétales, gardiennes de notre civilisation, découleraient des institutions qui seraient « des actes par lesquels une société construit sa propre identité. » Des institutions portant des germes et des références qui tiennent compte de nous.
La restauration des institutions aurait donc débuté par une phase d’investigation destinée à rechercher comment nos ancêtres ont pensé le monde et comment ils interagissaient.
En 54 ans de règne sans partage des Bongo, la Constitution de la République gabonaise a connu moult modifications dans le seul but de l’arrimer à la volonté du roitelet des tropiques. Les u(r)nes, comme les autres, n’accouchaient jamais de solutions durables aux dysfonctionnements politique et social du pays, en grande partie à cause du refus de prendre en compte les désidératas du peuple ainsi que ses références historiques et culturelles.
En fonction de leurs effets psychologiques sur les populations, il existe au monde notamment des régimes dictatoriaux et des régimes démocratiques. Dans leur pratique respective, ces régimes ont prouvé leurs insuffisances dans les pays qui les ont adoptés. Le patriotisme dont font preuve les hommes et les femmes appelés à gouverner les Institutions est un facteur déterminant. Des nombreux régimes qualifiés autoritaires, autocratiques, totalitaires par exemple ont conduit leur pays à des succès sociaux, économiques technologiques et sécuritaire. La Russie, la Chine pour ne pas les citer, ayant à leur tête des dirigeants qui ont sacralisé la souveraineté de leur pays et la dignité des peuples, font de leur nation des puissances dans divers domaines. La sacralisation de cette souveraineté se caractérise par le développement dans le cadre de la sécurité alimentaire, l’industrialisation de leurs économies nationales et la technologisation des systèmes de défense et de sécurité, qui font d’un pays, un Etat souverain.

La Constitution de tous les dangers

Ce ne sont pas les occasions et les hommes qui ont fait défaut pour établir des institutions capables d’ipséité dans le pays et sortir le Gabon de ses difficultés de fonctionnement. Après l’échec de la conférence nationale de 1990, le Gabon est sur le point de vivre, après trente-quatre (34) ans de désillusion, de temps perdu et de gâchis, celui du post-dialogue national inclusif du CTRI-PDG-Clergé. Pourtant, dans sa déclaration du 2 mars 2024, la CNR mettait en garde la junte contre l’usage abusif des milliards de FCFA à des fins d’enfumage et des débats cosmétiques à l’instar de ceux organisés à coup de per diem par le pouvoir Bongo-PDG, définis comme armes de mystification massive aux fins d’embuer l’esprit du peuple gabonais.

Les débats cosmétiques, nous en sommes !

Le projet de Constitution en cours est décrié par tous sauf par ceux qui, à une virgule près, ceux-là qui ramènent au régime présidentiel fort qu’a connu le Gabon en 1961 et dont la gestion a conduit au putsch de1964. D’après le Président en exercice de la CNR, de 1967 à 1989, notre pays a, une fois de plus, connu un régime présidentiel fort qui, hormis les contestations politiques de 1981, a lui aussi conduit aux crises de 1989 à 1990. Malgré les modifications apportées à la Constitution de 1991, dans la pratique de la gestion politique, le régime s’apparentait à une copie pâle du régime présidentiel.
Pour la CNR, le Gabon n’a pas besoin d’un régime présidentiel encore plus fort sachant que les mêmes causes produiraient les mêmes effets, voire avec plus d’amplitude et de résonance. Il a besoin d’une Constitution qui consacre la séparation nette et claire des pouvoirs. Elle y invite, comme bon nombre d’observateurs de la vie politique le Président de la Transition, le CTRI et le gouvernement de la Transition qui disposent entre leurs mains de huit cents-un amendements à ce projet de Constitution apportés par l’Assemblée Constituante, « à faire preuve de responsabilité et de patriotisme, en plaçant ce texte fondamental à venir au-dessus de tout. Pour qu’elle soit intemporelle, impersonnelle et non discriminatoire ». Une Constitution doit dépasser les intérêts personnels et les petits calculs politiciens.
Le déroulé des évènements, depuis la mise en place des organes de la transition jusqu’à ce jour, montre que le développement des calculs politiciens ont nettement pris le pas sur la mise en place des institutions fortes et durables.
Quoique personne ne daigne en parler, la nomination des hommes et des femmes à la tête de ces institutions, la reconduction tacite d’une forte majorité des Pdgistes, la cooptation des commissaires au fameux et coûteux Dialogue national inclusif du CTRI-PDG-Clergé, sur la base du népotisme et du clientélisme renforçaient toutes les certitudes de calculs politiciens. Les travaux effectués tous azimuts dans le pays s’inscrivent dans cette droite ligne.

La question sensible de la nationalité

Pour des raisons électoralistes, les esprits mesquins d’alors à la tête de notre pays, ont distribué la nationalité gabonaise à la hussarde aux étrangers qui, par la suite, se révélèrent incontrôlables, détourneurs des fonds et imbus de leur supposée supériorité sur les Gabonais. Supposée supériorité octroyée par ceux-là qui accompagnent le CTRI aujourd’hui et se trouvent dans l’incapacité de résoudre l’équation de l’explosion démographique dans le pays. Pour colmater les brèches, ils bouc-émissairisent les étrangers. Ainsi, les Gabonais, réduits à quia, ont vu des « étrangers » mettre aux pas, des autorités politiques, administratives et militaires gabonaises, exproprier les Gabonais de leurs biens domaniaux, vivre des abus de tout genre desquels elles auraient pris des mesures de xénélasie. La Grèce antique en fit autant pour sanctionner les étrangers corrompus, corrupteurs, espions et indésirables. Tenus responsables des fautes qu’ils n’ont pas commises, les Gabonais, sont désormais « étrangers » dans leur propre pays et se sont vus imposer des conditions drastiques d’éligibilité.
Selon le projet de Constitution, tout porte à penser qu’il ne suffit pas d’être Gabonais né de père gabonais et de mère gabonaise, eux-mêmes de père et de mère gabonais, avoir un(e) conjoint(e) gabonais(e), pour justifier de loyauté et de patriotisme à l’égard de l’Etat. Des preuves abondent et prouvent que des Gabonais de père et de mère ont pillé sans vergogne l’argent du pays, assassiné d’autres Gabonais. Des exemples des dégâts causés par cette politique d’exclusion sont patents ailleurs, avec pour conséquence le déchirement du tissu national.

Le maintien en place de l’ordre ancien

Eclipsant des questions de Souveraineté et de Dignité du peuple gabonais, le débat sur le projet de Constitution ne porte essentiellement que sur le régime présidentiel et sa durée. La présence des forces françaises au Gabon, la persistance des Accords désuets dits « de coopération », l’industrialisation de l’économie, les conditions de rétribution des richesses et d’exploitation des ressources du pays dont les Gabonais sont les propriétaires légaux, l’autonomie et la sécurité alimentaire, sont autant de questions absentes du débat. C’est la prise en compte de ces questions par les dirigeants d’un pays qui fait de lui un Etat souverain capable de « dessiner [ses vrais] contours politiques et institutionnels ».
Le maintien en place de l’ordre ancien est le signe évident que le Gabon est tenu en apparence par ces dirigeants, mais dans le fond, ils n’en sont que des marionnettistes à la solde de l’étranger, justifiant par la même occasion son hétéronomie, à savoir l’absence d’autonomie politique et économique.

Beauty Nana Bakita Moussavou

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