En l’espace de dix ans de pouvoir, Ali Bongo a fortement augmenté sa richesse. Dans son classement 2019, le magazine Forbes, spécialisé dans les investigations financières et économiques, le classe 2è derrière le roi du Maroc et premier dans le reste de l’Afrique noire. Comment peut-il justifier une telle richesse que même Bongo père, en 42 ans de pouvoir, n’avait pas pu accumuler ?
La richesse d’Ali Bongo a été récemment estimée à plus de 594 milliards de francs cfa. C’est bien mieux que Christian Kerangall, le patron de la Compagnie du Komo, entreprise la plus rentable du Gabon même devant Gabon Télécom, Comilog, Total Gabon (pétrole) avec ses 312 milliards de francs cfa, qui était considéré jusque-là comme la première fortune du Gabon. Abo vient de le dépasser pour devenir non seulement l’homme le plus riche du Gabon, mais aussi le président le plus riche dans toute l’Afrique, derrière Mohamed VI, le souverain marocain. Il est aussi le plus fortuné des présidents de l’espace de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cémac) d’autant plus qu’il devance largement Denis Sassou Nguesso (Congo), Paul Biya (Cameroun) et Faustin-Archange Touadéra (Centrafrique) qui n’intègrent même pas le Top 10 du classement Forbes Afrique. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, le président équato-guinéen, talonne son homologue gabonais à la troisième place avec une richesse estimée à près de 357 milliards de francs cfa. Le dirigeant tchadien, Idriss Deby Itno, occupe la dernière place de ce classement avec ses « petits » 29,7 milliards de francs cfa. Les trois chefs d’Etat sont cependant en retrait par rapport à Mohamed VI qui occupe la première place du classement. Le roi du Maroc et ami d’Ali Bongo possède une richesse estimée à plus de 3 447 milliards de francs cfa. Soit le budget du Gabon, avec une différence d’au moins un milliard.
Après avoir promis de financer, à hauteur de 250 milliards par an sur trois ans, les projets d’autonomie des Gabonais économiquement faibles (30 à 60 % de la population) via des Activités génératrices de revenus (AGR), Abo a fini par supprimer ce volet (Fonds national d’action sociale – FNAS) qui devait porter cette politique aux relents ambitieux. Donc ce qui compte pour lui, c’est finalement sa situation personnelle en usant de sa position de chef de l’Etat.
Abo, d’où sortent ces milliards ?
Si Abo vient récemment de durcir le code pénal pour sanctionner les critiques dont il peut être l’objet, c’est bien pour empêcher que les crimes humains et économiques que directement ou indirectement son régime a commis ne soit connus. Comment un président peut-il devenir aussi puissant, aussi riche alors que son pays traverse dans la même période l’une des plus sévères crises financières de son histoire ? D’où lui vient tout cet argent placé dans des banques, des actifs immobiliers à l’étranger et au Gabon ainsi que les parts d’actions dans les sociétés (banques, assurances, services) ? Il ne peut y avoir plusieurs explications.
En entrant en fonction en 2009 et 2016, Abo s’est-il soumis à l’obligation légale de déclarer sa fortune ?
Non. Ensuite, a-t-il, à ce jour, publié le décret et les alinéas qui fixent son salaire et ses émoluments ? La trésorerie spéciale de la présidence et des armées a été créée de toutes pièces pour faciliter des opérations financières (recettes fiscales et douanières) hors normes (mise à disposition de fonds publics) qui ont par la suite pris d’autres directions pour permettre à Boa et à certains de ses proches d’accumuler. Les recettes pétrolières sont les plus prisées du clan Bongo qui détient déjà des participations et des versements en numéraires de leurs émoluments. Les recettes pétrolières non plus ne sont gérées pas en toute transparence. Elles sont placées dans des comptes (BGFI…). Par simple chèque ou autorisation écrite, une grande partie des recettes transitent ailleurs et le reste est versé au trésor.
Du coup, Ali Bongo s’enrichit et le Gabon s’appauvrit. Voilà un bourgeois à la tête d’un pays riche, mais de pauvres. Autrement dit, il ne pourra pas avoir de développement au Gabon tant que le système-Bongo sera opérationnel, et il l’est encore. En défalquant de grosses parts des revenus du pays, les Bongo n’ont pas honte de n’avoir pas pu amorcer un quelconque développement économique et social du pays depuis plus de cinquante ans qu’ils sont là.