Le 2 décembre 2019, les Bongo vont totaliser 52 ans règne monarchique et criminel au Gabon. Un bilan qui n’a pas besoin d’être refait, l’évidence sautant aux yeux. Un anniversaire à venir qui tombe mal avec la sortie du jeu politique d’Ali Bongo par un AVC survenu à Ryad en fin d’année dernière, doublé des turpides de BLA accusé, à tort ou à raison, d’avoir comploté avec sa bande pour chasser les Bongo du pouvoir en janvier 2020.
Sylvia et Nourredine pour la continuité d’un système anachronique
La mère et le fils (adoptif) de Boa se battent pour que le pouvoir n’échappe pas à la famille. C’est ainsi qu’on les a vus, sans pitié au cœur, livrer Ali Bongo dans un spectacle désolant le 16 août dernier au mausolée Léon Mba : trainant le pied, le regard perdu dans le vide, canne en main et agent de sécurité à ses côtés lui tenant le bras pour le tirer, le guider et, au besoin, pour le soutenir en cas de chute… Un Ali Bongo arrogant, fier et sportif qui n’est plus que l’ombre de lui-même. Les séquelles post-AVC sont bien là, réelles, malgré les mises en scène théâtrales devant les caméras et les traitements payés à coups de milliards de Fcfa par le contribuable gabonais pour tenter de le rééduquer. Mais, d’un mois à l’autre, la fragilité mentale et physique de Boa se fait toujours sentir… Le spectre d’une perte de pouvoir pour la petite aristocratie téké du Haut-Ogooué se fait sentir. D’où la quête d’un plan B alternatif à Boa. La suite est connue. Les Ali Akbar, Frédéric et compagnie ont été chassés du pouvoir comme des malpropres par BLA. L’heure de la revanche a-t-elle sonné ?
Le retour à une union sacrée du G2…
En dehors des présumés détournements qui alimentent l’actualité en ce moment, on peut dire que ce que BLA a réussi au moins à faire, c’est de créer ou fédérer deux camps qui étaient déjà en rupture : la petite famille d’Abo (Nouredine et sa mère Sylvia) et (une partie de) l’aristocratie téké. Les deux clans étaient en rupture de dialogue. Leur belle-fille Sylvia et leur neveu Nouredine les ont toujours tenus à distance, surtout depuis l’AVC de Boa. La mère et le fils sont convaincus que ces gens ne sont derrière Abo que pour de l’argent. Il n’y a rien de sentimental ou de familial. Du coup, ni sa « mère » Patience Dabany, ni son « oncle » J. Boniface Assélé, encore moins les Andjoua, les Ngari et ses autres « frères » du G2 n’avaient pas accès à Boa. Il fallait passer par BLA. D’où leur indignation, colère et rancune. Pour eux, pour avoir fait le sale boulot en 2016, ils ne méritaient nullement un tel traitement. BLA, pour sa part, ne s’était pas privé de limoger plusieurs cadres téké des postes de hauts fonctionnaires et des ministères stratégiques (économie, finances, défense, intérieur, affaires étrangères, renseignement). En cristallisant la haine de cette faction de l’aristocratie parasitaire téké, BLA savait qu’à la moindre erreur, ces derniers lui tomberaient dessus. Ayant perdu la confiance de Nourredine et Sylvia, qui, eux-mêmes, n’ont aucune base politique dans le Haut-Ogooué (où ils ne se rendent presque jamais, ou plutôt très rarement), le G2 est revenu en force. A l’exemple de Mborantsuo dont le fils (pourtant directeur général du budget des finances publiques) n’est pas cité officiellement dans les détournements. Qui, finalement, décaissait ?
Sylvia, Nourredine et le clan du G2 ont fait alliance pour barrer la route à BLA et à sa bande de « voleurs » présumés. Ce qui justifie les vagues d’arrestations en cours diligentées par un natif du G2, le général Oligui, qui applique les plans des réunions nocturnes ou restreintes pour « neutraliser » rapidement le système qui avait déjà trop de tentacules au sein du PDG (élus à l’Assemblée nationale et dans les collectivités locales), de l’armée (services de renseignements) et des finances publiques (régies financières, sociétés parapubliques) et du gouvernement (plusieurs postes clés). En clair, pour Sylvia, Nourredine et le clan téké, BLA a tenté insidieusement de remplacer le système Bongo sans attirer leur attention.
Une fois que la menace de BLA sera complètement écartée, viendra la question cruciale : que fait-on avec un Ali Bongo « hors-jeu » pour raison médicale ? Abo a ramené, en janvier 2018, dans la nouvelle Constitution, l’âge pour être président de la République à 18 ans pour préparer le chemin à son rejeton. Il avait donné des moyens et le pouvoir à BLA pour épauler Noureddine (création de l’Ajev et de nébuleuses associations de crève-la-faim). Si BLA a, un temps, roulé pour préparer le chemin à Noureddine, il aurait été persuadé, entre mars et octobre 2019, que Noureddine avait de gros problèmes d’âge, d’expérience et de popularité et donc d’acceptabilité aussi bien par les « vieux » du G2 que par la population du fait de son patronyme « Bongo ». D’où le crime qui lui est reproché d’avoir tenté de changer les plans initiaux pour sa propre intronisation. Surtout qu’Abo est forfait pour 2023 et peut lâcher le pouvoir avant même cette date pour des raisons médicales. Si, pour Sylvia, son fils est déjà prêt à aller sur orbite pour remplacer Abo, malade, ce n’est pas l’avis majoritaire des Altogovéens et la France, l’autre partie prenante, doute de ce plan. Est-ce ce qui explique la présence discrète au Gabon du roi du Maroc à qui Paris a sous-traité la souveraineté du Gabon ? Si, déjà en 2009 et, surtout, en 2016, les actes de naissance multiples et les témoignages aussi ridicules que contradictoires les uns les autres n’ont convaincu personne sur les origines non gabonaises qui lui collent à la peau jusqu’à ce jour, les 99 % du Haut-Ogooué ont montré à la face du monde que Boa a lamentablement échoué, combien plus ça va être « difficile » de faire monter Noureddine sur le trône de son père et grand-père ?
Or, le clan téké veut récupérer le pouvoir car, pour eux, les Bongo n’ont plus d’héritiers valables à proposer aux Gabonais et à la France. Pour ne pas tout perdre en cas d’évènement brusque du fait de l’état de santé de Boa d’ici 2023, ils se réunissent pour que le pouvoir ne leur échappe pas. L’éjection de BLA leur redonne du zèle. Du coup, au-delà de la vague d’arrestations des BLA boy’s entamée au lendemain de sa chute le 07 novembre 2019, la question qui va de nouveau diviser la famille d’Abo avec le clan téké du G2 est là : qui prend la relève de Boa ? Nourredine est dans l’antichambre !