C’est le très introduit Jeune Afrique qui avait donné l’alerte. Nous avons mobilisé nos enquêteurs afin d’avoir la véracité de l’info. Après avoir recoupé aussi bien au palais du bord-de-mer qu’au palais de justice – et même au niveau de la prison centrale de Libreville -, il n’y a pas l’ombre d’un doute, l’ado-pubère Jessye Ella Ekogha, Pablo Escobar pour les intimes, respire l’air frais de la liberté depuis quelques semaines déjà.
Si nos sources parlent d’une « mise liberté provisoire » pour des raisons de santé, les plus avisés ont tôt fait de comprendre qu’il s’agit là d’une vraie mise en liberté et que le délinquant ne retournera plus jamais en prison où se trouve sa vraie place. En effet, la libération de Pablo Escobar a provoqué indignation, frustration et déception auprès de nombreux compatriotes, y compris auprès de ses anciens camarades du PDG. Et pour cause, l’homme était devenu la vraie quatrième personnalité du régime au moment où Sylvia assurait la régence. Après cette dernière, Mohammed Nour Ed Din et Ian Gyslain Ngoulou, mais la deuxième personnalité la plus influente derrière Ian Gyslain Ngoulou, les deux leaders de la « République des humiliations ».
Le dernier fait d’armes de ce gamin, qui se prenait pour le centre du monde alors qu’il n’était rien (infographe de pacotille), était son intrusion au sein du Centre gabonais des élections (CGE) pour imposer à son président de lire les résultats qu’il lui avait apportés et qui donnaient son candidat, Ali Bongo Ondimba, vainqueur. Le dandy jouait gros en ce sens que lui et son groupe s’étaient fait le pari qu’ils pouvaient faire gagner Ali Bongo sans l’aide du PDG, juste en comptant sur le CGE, la Cour constitutionnelle et la GR. Ce qui leur permettait d’avoir le vrai pouvoir pour eux.
Mais, pour Pablo Escobar, il n’était pas question d’avoir le pouvoir seulement. Le pouvoir leur servait de bouclier pour se lancer dans des détournements massifs de fonds (des caisses de milliards ont été trouvées à leurs domiciles). Le Gabon a aujourd’hui une dette cumulée de plus de 7 000 milliards. Une bonne partie de cette dette est liée aux emprunts. En effet, chaque fois que le Gabon levait des fonds à l’international, l’argent n’arrivait jamais au trésor. Il allait directement au palais. Pablo Escobar, Ian Gyslain Ngoulou, Mohamed Ali Saliou…se le partageaient. Conséquence, les caisses du trésor public était désespérément vides. Ils avaient trouvé là-bas une expression pour décourager ceux qui se pointaient pour un paiement : « les machines sont plantées ». En réalité, elles ne l’étaient pas. Sauf que soit le grisbi venait de partir au palais, soit le trésor attendait un appel de fonds du palais. Même au niveau des banques, les gamins exerçaient une pression pour grappiller les devises étrangères qui arrivaient, notamment les euros. Heureux qui pouvait trouver cette devise dans une banque à Libreville… Ayant découvert le goût de l’argent, ces gamins se livraient aussi à la consommation de la drogue et à l’organisation de partouzes à leur QG où le VPM Alexandre Barro Chambrier a posé ses baluchons ministériels. Gageons qu’il a eu recours aux services d’un prêtre pour purifier ce haut lieu de la perversion émergente et de la perdition. Le comble c’est que, pour y arriver, il faut passer devant un lieu de la rédemption, la paroisse catholique Saint André.
Porte-parole de la présidence de la République, Pablo Escobar se considérait comme le vrai ministre de la Communication. Sa parole avait valeur d’un article du code pénal. Le ministre de la Com’, qui refusait de se plier à ses injonctions, savait qu’il allait être viré au prochain remaniement. Edgar Anicet Mboumbou Miyakou ne nous démentira pas. Escobar avait sous son contrôle l’ensemble des patrons des médias d’Etat. Ces derniers, grâce à lui, se sentaient plus puissants que les ministres. Ngoyo Moussavou, patron de la Hac, en sait quelque chose. Pablo Escobar et Nick Jocelyn Fouba lui avaient passé un savon pour avoir écarté un piètre journaliste de l’AGP, où trônait Nick Joscelyn Fouba grâce à Pablo Escobar, de l’émission électorale « 1 candidat 1 projet ». Les patrons de presse qu’il ne maîtrisait pas étaient taxés d’être à la solde de l’opposition. Il n’hésitait donc pas à les humilier lorsqu’il croisait leur chemin ou lorsque ces derniers faisaient l’erreur de se rendre à son cabinet pour exprimer une doléance. Les dirigeants de l’Opam en savent quelque chose.
Grand voleur devant l’Eternel, Pablo Escobar avait créé de nombreux journaux en ligne qui émargeaient au trésor public. L’un d’eux, Médias 241, touchait 65 millions par mois lorsque d’autres journaux libres attendaient la fin de l’année pour recevoir un million ou deux au titre de la subvention à la presse écrite libre.
La mise en liberté de Pablo Escobar est non seulement un précédent, mais aussi questionne. Voilà des gens qui ont jeté d’autres compatriotes en prison en leur infligeant des sévices et des humiliations les plus inhumains et les plus dégradants et qui, malgré les crimes dont ils sont accusés, ne passent en prison que le temps d’un matin, car nous pouvons prédire, sans risque de nous tromper, qu’après Pablo Escobar, d’autres ado-pubères seront élargis de Sans-famille. Les regards se tournent vers Nour Ed Din Bongo Valentin et sa mère la Veuve noire ainsi que vers les fils de l’ancien imam de Libreville. Est-ce cela la justice à l’ère du CTRI ? Les Gabonais apprécieront.
Laurent Lekogo