Le 31 décembre dernier, peu de Gabonais ont cru à ce que l’on a voulu leur faire croire : que tout va bien. L’apparition d’Ali Bongo à Gabon Télévisions a démontré que le chef de l’Etat gabonais ne sera pas en mesure de reparaître en public de si tôt. Son immobilité manifeste, côté droit, perceptible même par l’œil d’un néophyte, conforte l’idée selon laquelle le principal représentant du système-Bongo est dans les cordes. Va-t-il jeter l’éponge ?
Son passage à la télé semble dire qu’il ne l’envisage nullement. Lui-même ou son entourage ? En effet, tout indique que, si ce n’est pas de son fait, son entourage, du moins une partie, ne souhaite pas faire entrer le pays dans la phase du constat de la vacance et, encore moins, de l’empêchement définitif tant que, tenants du système, ils n’ont pas encore mis un nom et un visage sur celui ou celle qui pourrait succéder au fils d’Omar Bongo Ondimba affaibli. En fait, on en est là malgré les divers habillages audio, vidéo et sono auxquels, depuis qu’il se trouve au Maroc, différents spécialistes travaillent, souvent dans la précipitation, pour présenter la réalité sous des traits rassurants. En fait, jusqu’à la travestir. Et le spectacle du 31 décembre 2018 à la télé est riche d’enseignements. Malgré les propos encourageants d’Ike Ngouoni Aila Oyouomi pour qui « chaque jour, le président travaille. Il tient des réunions quotidiennes avec ses collaborateurs au cours desquelles sont traités les grands dossiers qui engagent le pays », il n’échappe à personne que le porte-parole s’est noyé, une fois de plus, dans des contradictions. D’un côté, il nous affirme qu’Ali Bongo « va mieux, il est rétabli ». D’un autre, il ne nous explique pas les raisons fondamentales qui font qu’il soit contraint de séjourner à Rabat si, du point de vue santé, ça va mieux, qu’il est rétabli et qu’il tient des réunions quotidiennes, c’est-à-dire tous les jours, avec ses collaborateurs. Par ailleurs, Ike Ngouoni insiste lourdement sur le fait que « depuis le départ, nous [la communication présidentielle] avons indiqué que le président de la République, Ali Bongo Ondimba, surmontera ses ennuis de santé passagers et qu’il sera de retour au Gabon ». Et, triomphal, de conclure : « Et que s’est-il passé ? La preuve en a été bien donnée ce 31 décembre 2018 ». Cette absence manifeste de modestie l’empêche de réaliser que le « retour au Gabon » d’Ali Bongo n’a pas été acté…alors qu’il est, soi-disant, rétabli et bosse au quotidien avec ses collaborateurs…à Rabat.
En gros, Ike Ngouoni s’échine à affirmer en fait que « le président de la République, Abo, est en bonne santé et il sera de retour très prochainement au Gabon ».
Ces contradictions dans les interventions du porte-parole du bord de mer donnent le sentiment qu’une certaine panique s’empare des clans du pouvoir et que nous sommes entrés dans l’ère de l’après.
En effet, depuis 2009, les Eyeghe Ndong, Oye Mba et Mba Obame, pour ne citer que ceux-là, s’étaient positionnés pour l’après-Obo. Imposé avec la bienveillance de la France, Abo a poussé d’autres, d’Adiahénot à Ping, en passant par les Ndemezo’o Obiang René et autres Nzouba Ndama, à se liguer pour un après-Abo.
La situation actuelle ne peut que renforcer, confirmer ou réactiver, pour certains, cette posture de l’après-Abo. Les prétentions se feront de plus en plus jour au fil du temps. Il se dit même d’un pays voisin que son chef d’Etat, voulant en découdre avec Abo, n’aurait ménagé aucun effort pour offrir officieusement ses bons offices à qui était intéressé. Certains Gabonais l’auraient été. C’est Paris qui décida d’y mettre un holà. Aujourd’hui, l’état dans lequel est apparu Abo lundi dernier ne laisse aucun doute sur le fait que beaucoup, même discrètement, se situent désormais dans l’ère de l’après. Donc de la prise du pouvoir.