A la faveur du Conseil des ministres du 15 octobre dernier, le gouvernement a annoncé, sous la houlette de BOA, les grands axes de sa politique économique pour 2019. Qu’est ce qui attend les entreprises et les demandeurs d’emploi en 2019 ?
Un vrai « cocktail Molotov » économique et social : hausse des impôts, baisse des moyens de fonctionnement de certaines administrations et non des plus budgétivores comme la présidence de la République, diminution des transferts sociaux, remboursement de la dette extérieure colossale…
Ainsi, pour l’année 2019, les prévisions du cadrage macroéconomique et budgétaire affichent des opérations budgétaires et de trésorerie équilibrées en ressources et en charges à 2 806,9 milliards de FCFA, contre 2 918, 5 milliards de FCFA dans la Loi des finances rectificative (LFR) 2018, soit une baisse de 3,8 % représentant un montant de 111,7 milliards de FCFA. Cette contraction serait imputable, d’après la junte, au recul des ressources de financement (-219,8 milliards de FCFA) en dépit d’une prétendue hausse des recettes budgétaires (108,1 milliards de FCFA) attendue en 2019.
Les recettes du budget de l’Etat s’établiraient à 2 150,3 milliards de FCFA, soit une augmentation de 108,1 milliards de FCFA, par apport à la LFR 2018. Il ne s’agit pas de nouveaux investissements qui vont pleuvoir sur e Gabon grâce à la « ligne réformatrice » de BOA, mais plutôt de l’argent que le gouvernement ira chercher de force dans les caisses à sec des sociétés, des commerçants grâce aux effets attendus des nouvelles mesures de mobilisation des recettes fiscales et douanières. Autrement dit, les impôts et taxes vont augmenter dès le 1er janvier 2019 : taxes diverses frappant les sociétés, les prix des carburants, les droits de douanes, etc. Un cycle économique qui va davantage ralentir l’économie au lieu de la faire redémarrer. Ce qui va alimenter le cycle pervers de la crise (enlisement), du chômage et de la pauvreté.
Pas de croissance en 2019
Pour l’année prochaine donc, la croissance ne devrait pas atteindre 1% (0,5-7%) selon le FMI (juin 2018). En clair, le chômage va encore augmenter, les entreprises (BTP, services) qui travaillent avec l’Etat ou espéraient un apurement de leurs dettes ou qui pour la plupart résistaient jusque-là, vont aussi connaitre des difficultés financières (absence de marchés publics et de paiements lents du Trésor public). Comme le circuit économique est lié, les sociétés qui avaient pour clients d’autres sociétés vont aussi connaitre une baisse (contraction) sévère de leur activité qui les contraindra à opérer des chômages techniques ou tout simplement économiques.
BOA a en tête une seule idée : sécuriser le compte qui permet de payer les salaires des fonctionnaires chaque 25 pour éviter un retard de paiement. C’est pourquoi ces taxes vont augmenter en 2019 et qu’il va contracter encore et encore d’autres dettes, mais jusqu’à quand car le FMI lui retire déjà sa confiance. Boa cherche à éviter une explosion sociale et politique qui peut le faire fuir le pays ou aboutir à son jugement (révolution) en cas de faillite certifiée de l’Etat, c’est-à-dire de cessation de paiement du trésor. Il est conscient de ce que si les gabonais s’accommodent des tricheries électorales, mais couper les fonctionnaires, y compris les militaires leurs soldes, ainsi que les primes des régies financières (douanes, impôts, trésor…) et les bourses des étudiants signifie son arrêt de mort. Mais cette envolée fiscale aveugle ne finira que par produire les mêmes effets à moyen terme (1er semestre 2019). A moins si Macron, à qui il demande l’appui de la France au FMI et de nouveaux prêts de l’Agence Française de Développement (AFD), ne lui concède ces coups de pouce, en échange de plus de pétrole et de bois.
Des mesures d’investissement en trompe l’œil pour 2019
Pour masquer la crise de l’économie réelle qui continue de provoquer la fermeture des PME, les licenciements des travailleurs dans les sociétés, et la fermeture au nez de la porte de la fonction publique aux jeunes diplômés, BOA a annoncé lors de ce Conseil des ministres du 15 octobre 2018, qu’il va injecter au titre des dépenses d’investissement, la somme de 423,9 milliards de FCFA pour la relance des chantiers à l’arrêt, l’amélioration du système éducatif, de l’offre de santé ainsi que la lutte contre la précarité et les inégalités. Un discours et du déjà entendu depuis qu’il est là. Parce que dans la pratique, cet argent ira dans les comptes off-shore (secrets) des pays qu’il vient de visiter lors de son récent tourisme mondial.
La vérité est que les dettes sont prises pour rembourser d’autres dettes pressantes contractées dans les banques internationales privées qui coutent très chères. L’économie gabonaise va connaitre un grand choc dû à l’incapacité à moyen terme de l’Etat à rembourser un grand nombre de ses dettes qui arrivent en fin d’échéance entre la fin de cette année et le premier trimestre 2019. Une menace plane donc sur la capacité de l’Etat à continuer à payer ses bailleurs de fonds, mais aussi les salaires des fonctionnaires. D’ici 2019, le taux de chômage pourrait passer la barre des 50% des jeunes. La délégation du FMI qui était venue en juin dernier n’avait pas caché son scepticisme, en évoquant notamment dans son rapport « des dérapages budgétaires substantiels et des progrès lents sur les réformes structurelles ».