En visite à Makokou du 20 au 21 avril dernier, l’enfant-roi avait zappé les éléments des ados pubères de sa virée ogivine. Ni Noureddin Bongo Valentin, ni son alter ego Ian Ghislain Ngoulou, ni Jessye Ella Ekogha, pourtant porte-parole, et encore moins le porte-baluchon du clan, le directeur de cabinet du distingué camarade président (DCP), Cyriaque Mvourandjami, n’ont fait le déplacement de capitale ogivine. Signe que le dictateur émergent tient désormais à se démarquer du prince héritier et de sa bande.
Et pourtant, les événements n’étaient pas des moindres. Au-delà des inaugurations et de la caravane médicale, un point d’honneur de cette visite a été le sacre du nouveau Secrétaire général du Parti démocratique gabonais (PDG), Steeve Nzegho Dieko. Que l’on s’en souvienne ! La promotion de ce quadragénaire à la tête du parti au pouvoir a été le fait des ados pubères. Sa mission était d’aller étouffer un dangereux ennemi du clan qui règne au palais, le ministre d’Etat Alain Claude Bilie-by-Nze. Depuis décembre 2021, Nzegho Dieko était déjà donné pour remplacer Eric Dodo Bounguendza, que les ados pubères tenaient à virer de la tête du PDG. Comment, alors au moment de la présentation de cet homme à la communauté ogivine par l’enfant-roi, tenant lieu d’officialisation de sa fonction, les « parrains » du promu ont-ils pu être éloignés la partie ?
A ce que l’on a appris, la décision de ce protocole émanait du dictateur émergent. Histoire de passer un message clair au « camarade Secrétaire général ». A savoir que dans le parti, le chef d’orchestre c’est lui. C’est lui qui compose la partition que Nzegho Dieko devra interpréter avec tout son ensemble. Et qu’en tant que chef d’orchestre, les yeux et les oreilles de Nzegho Dieko devront être rivés vers lui et l’instrument entre ses mains. Un message certes codé, mais qui a eu le mérite d’être clair. Obligation donc d’observer des distances quant à l’influence du prince héritier et de ses ados pubères dans la conduite du parti.
Il est tout aussi clair que si le nouveau Secrétaire général ne se montre pas à la hauteur des désidératas de l’enfant-roi, la fermeté qui a accompagné le cadre de ces festivités ogivines ne manquera pas de se transformer en décision contre lui. Le séjour ogivin a eu son lot de cachoteries. Entre des huis clos et des tête-à-tête avec seulement quelques deux ou trois nababs rigoureusement sélectionnés. Bien que très peu ait filtré de ces entretiens exclusifs, il est quand même ressorti un plan d’ensemble quant à la perspective de 2023. Par endroit, une autopsie rigoureuse de la formation gouvernementale actuelle. Autopsie qui a passé au crible les moindres artères de l’appareil pour en sortir les malaises profonds. Et sans se tromper, l’imminence d’un remaniement du gouvernement est là, afin de composer un bloc fort à même de mener les batailles qui se profilent où, à ce qu’il se susurre, la primeur, pour une fois depuis 1990, devra être donnée aux urnes, rien qu’aux urnes. Un challenge qui ne dépendra que « des hommes aguerris ».
En décortiquant la tête du gouvernement, rien n’a filtré sur l’éviction ou non de l’actuelle cheffe du gouvernement, Rose Christiane Ossouka Raponda, dont le maintien se justifie dans ces arcanes par la montée d’Alexandre Barro Chambrier. Ceci afin d’empêcher la mobilisation de la communauté iboto (Myéné, Sékiani et Benga) autour de lui comme ce fut le cas avec Jean Ping en 2016. Ainsi, il ressort que la cheffe du gouvernement devra être renforcée par un poste qui sera une sorte d’alter ego (coordination de l’action gouvernementale) où il sera porté une femme ou un homme à poigne. Lorsqu’on descend plus bas, l’on observe que le casting des ados pubères a péché par l’avidité à prendre le contrôle et par la méconnaissance du système politique gabonais et ses ramifications.
Si dans l’Ogooué-Maritime, le ministre de la Communication, Pascal Houangni Ambourouet, a pris racine dans certains pans de Port-Gentil, tout comme le député et ancien ministre Jean-Fidèle Otandault dans d’autres, on ne saurait délier cela par le fait que ces deux personnalités ont construit sans bousculer les piliers de la province, dont Michel Essonghe. Ailleurs, les ados pubères ont placé leurs hommes et femmes avec la certitude qu’ils étaient les nouveaux roitelets du seul fait de leur présence au palais où non seulement ils estiment qu’ils peuvent placer qui ils veulent là où ils veulent, mais aussi qu’ils ont droit de vie et de mort sur les autres compatriotes dont la bouille ne leur revient pas.
En plus de cela, en bousculant les équilibres qui ont rythmé la vie politique dans ces contrées. Le Haut-Ogooué, qu’on pourrait désormais appeler « la poudrière », en est l’illustration. La province compte sept ministres dont deux de l’ethnie mbahouin : Vincent de Paul Massassa et Lambert Noël Matha, les deux sont non seulement sur la route de Mvengue, mais en plus dans le même voisinage à Franceville. Toujours à Franceville, la jeune promue au ministère du Budget, Judith Mounombi-Oyouomi, du même village Omoye que Justin Ndoundangoye, de mère obamba et de père gisir, utilise le réseau téké pour pouvoir s’implanter dans le 2e arrondissement. Elle a d’ailleurs nommé Ultri Okenkali, Téké d’Akiéni, bras droit d’Ali Akbar Onanga malgré ses origines paternelles à Okondja. Tout ceci pour ravir ce fief téké. Elvis Ossindji, Obamba d’Okondja, Max-Samuel Oboumadjogo, de mère obamba de Moyol sur le canton Lekala, route d’Ayanabo en allant vers Aboumi. Oswald Mayounou, ministre de la Mer, Awandji de Moanda. Seule Téké 100 %, originaire d’Akiéni, la ministre de la Défense nationale, Félicité Ongouori Ngoubili. Ce casting n’est pas pour rassembler le Haut-Ogooué, où certains l’assimilent à un « registre de la comédie ».
Le Woleu-Ntem n’en donne pas une vue plus sereine. Les deux communes d’Oyem et Bitam, les plus importantes, ont vu le leadership être déporté vers les départements. Quant à la représentativité, l’avis de certaines personnes est que les promus manquent d’envergure. Il y a d’un côté Guy Patrick Obiang Ndong du canton Bissok, l’un des plus petits. Il vient de démontrer son incapacité à fédérer et à organiser les troupes lors des festivités du 12 mars en différé.
Dans le département du Ntem, Charles Mve Ella, du village Akamsi au canton Mveze. Battu aux dernières élections législatives de 2018 par Akue Elli, de Démocratie Nouvelle (DN), de l’avis de Bitamois, ce n’est pas certain qu’il puisse terrasser son tombeur actuellement à l’Assemblée nationale, aux prochaines élections malgré ses doubles prérogatives de ministre et de membre du comité permanent du PDG. Comment penser que cet attirail puisse conduire Ali Bongo aux prochaines élections ?
L’Estuaire n’a pas été exempté de ces constats. Si la communauté fang de Libreville ronge toujours son frein faute de figures représentatives dans les milieux décisionnels, le cas le plus flagrant dans ces déconstructions est la commune de Ntoum qui a avalé Bikélé. D’aucuns se demandent comment les ados pubères ont positionné Camélia Ntoutoume Leclercq face à un Julien Nkoghe Bekale ou à un vétéran comme Paul Biyoghe Mba, des gens rompus aux subtilités politiques de la province, au point de faire d’elle l’une des figures tutélaires de l’Estuaire ? D’où la nécessité d’un toilettage et d’un rééquilibrage dans les provinces les plus sensibles. Notamment l’Estuaire, le Haut-Ogooué, le Woleu-Ntem, la Ngounié et la Nyanga. Dans la dernière province citée, les choix de Sidonie Moussirou et Aubierge Sylvine Ngoma sont restés en travers de la gorge aux Nynois. Quant à l’imminence de ce remaniement gouvernemental, il est dicté par l’urgence de la situation. Août 2023 arrive dans quatorze mois. Pas étonnant qu’il intervienne entre juin et août prochains. L’escapade ogivine était plus qu’une ballade de santé.