Si le RPM ne dispose pas encore suffisamment de dignitaires et hauts cadres dans le septentrion, la visite hautement stratégique qu’entreprend Alexandre Barro Chambrier depuis le 31 janvier dernier ne vise pas moins à mieux le faire connaitre lui-même, ses idées et sa formation politique dans la perspective des échéances en vue d’ici.
Le poids encore faible du RPM dans le Woleu-Ntem
Le bilan politique actuel du RPM dans le Grand Nord se résume à un député dans le canton Woleu, Edgard Owono Ndong qui est aussi l’un des Vice-présidents de cette formation politique. A cela s’ajoutent des structures de base répertoriées dans quelques localités de la province. La tournée provinciale du Président du RPM est donc d’une grande importante à deux ans de la présidentielle de 2023. Le premier enjeu pour ABC est d’abord de se faire véritablement connaitre par les populations du Grand Nord. En effet, jusque-là son aura politique, bien que nationale, ne pénètre pas encore bien le monde rural. Une critique qui lui est souvent faite par les observateurs qui tout en voyant en lui un possible présidentiable pour 2023 dans le camp de l’opposition, ont cependant souvent relevé sa « distance » avec le reste du pays, en dehors de son fief du 4e arrondissement de Libreville où il connait les moindres recoins.
L’autre enjeu est l’implantation du RPM. Si le parti revendique avoir une certaine crédibilité depuis la naissance du Rassemblement Héritage et Modernité en 2017 (fusion-absorption avec le FUNDU) et sa mutation en Rassemblement pour la Patrie et la Modernité (RPM) en 2019, il reste que sur le terrain, beaucoup reste à faire en terme d’implantation des structures de base. Un parti politique digne de ce nom ne peut pas valablement aller à des élections (locales, législatives et présidentielle) sans de telles structures qui assurent, dans chaque localité, l’encadrement des militants, la mobilisation des indécis et la sécurisation du vote dans les bureaux de vote et en dehors. C’est d’ailleurs pourquoi, en marge de l’arrivée de leur président, les militants et sympathisants de cette formation politique avaient d’abord tenu à organiser à Oyem, le samedi 30 janvier 2021, un congrès provincial extraordinaire pour actualiser les responsables départementaux et communaux du Parti après une certaine période d’éveille entre la présidentielle de 2016 et après les élections locales et législatives d’octobre 2018 au cours desquels le RPM avait présenté des candidats.
Vers un contrat entre ABC et le Grand nord ?
Province qualifiée de « faiseur de roi », le Woleu-Ntem influence fortement les tendances et positionnements du reste du pays. Etre porté dans le cœur des Woleu-Ntemois, c’est compter sur un électorat sincère et sûr. Le Woleu-Ntem politique, c’est aussi ses ramifications à l’Estuaire (grands quartiers des ressortissants du Woley-Ntem comme Cocotiers, Nzneg-Ayong…). L’enfant du pays AMO et bien après lui Jean Ping, pourtant originaire de l’Ogooué-Maritime et non fang (myénè), ont reçu les faveurs des électeurs du Grand Nord pour plus de 80%. La raison est que culturellement et historiquement, le Grand Nord s’est souvent positionné dans une logique anti-pouvoir Bongo. Du coup, tout candidat sérieux dans sa démarche et son discours est bien placée pour être portée par les nordistes. L’entourage d’ABC que 2023, ne se fera sans les grands villes d’Oyem et Bitam et les appuis de Mitzic, Minvoul et Medouneu. Il faut d’ores et déjà, aller au contact de ces populations dans un bon timing pour coller à son nom un visage d’une part, et pour que ces populations, au-delà des clichés entendus par le camp PDG sur ABC, se fasse un véritable portrait de lui dans des échanges face à face comme on a pu le constater à toute les étapes qu’il a déjà faite du village Miang (dans l’Okano) à la mythique place de l’indépendance d’Oyem au corps de garde. Contexte de Covid-19 obligeant, les mobilisations populaires estimées et souhaitées ont dues être contenues pour éviter que le pouvoir ne se serve de cela pour accuser l’opposition et ABC notamment de mettre en danger la vie d’autrui et fouler aux pieds les mesures réglementaires de lutte contre la propagation de la Covid-19. Mais malgré cela, les populations manifestent entre enthousiasme et curiosité à venir « découvrir » et « écouter » le patron de la fronde anti Ali Bongo au sein du PDG en 2015 et qui tend à se positionner, selon certains observateurs, comme un possible leader pour 2023. On en est pas encore là, certes, mais une chose est sûre, la tournée politique d’ABC dans le Nord est fortement suivie par les PDGistes de la contrée qui savent que le RPM vient dans un territoire « ouvert » et qui a soif d’alternance. C’est donc dans une vision d’avenir que se place le RPM en choisissant de faire honneur au Woleu-Ntem pour inaugurer une tournée politique nationale qui va probablement conduire ABC à sillonner, tel un pèlerin, les autres provinces du pays, avec un seul et même discours : garder la foi dans l’avenir du pays en dépit du chaos dans lequel il se trouve à tous les niveaux.