En crise depuis l’entrée de son président, Jean de Dieu Moukagni-Iwangou, au gouvernement, Union & Solidarité (US) a enregistré, mercredi 30 mai 2018, sa première vague de démissions. Anges Kévin Nzigou, Nicolas Nguema et Elza-Ritchuelle Boukandou ont quitté le navire et promettent le désistement de plusieurs autres militants.
Ce même 30 mai, le tribunal de Libreville vidait son délibéré sur la plainte introduite par Elza-Ritchuelle Boukandou contre Moukagni-Iwangou. Elle voulait que le juge prononce la destitution de son leader pour avoir rallié le camp de l’oppresseur. Mission que nous savions impossible du fait que Moukagni, non seulement est un haut magistrat et, solidarité de corps oblige, il était difficile pour ses enfants qui voulaient organiser un parricide à la régulière d’avoir gain de cause.
Ensuite, Moukagni émarge désormais dans les arcanes du régime. Il bénéficie ainsi de la protection et du soutien ferme et sans faille du régime. Il n’était donc pas pensable que le régime allait désavouer comme ça un des siens face à des gamins qui osent impunément le tutoyer. Un régime aussi rancunier que mesquin comme celui de Libreville est tout sauf impartial. La justice n’est-elle pas à sa solde ? Mais ce n’est pas faute d’avoir essayé. A la limite, cela en valait la peine.
Cependant, cette crise, suivie d’un procès au sein du parti de Moukagni-Iwangou, aura de graves conséquences aussi bien pour lui que pour les enfants qui viennent de le quitter. En effet, si Moukagni avait une vraie mentalité africaine, pour ne pas dire gabonaise, il devrait savoir qu’il arrive toujours malheur à celui qui blesse un enfant. Le comble est que ces enfants, à l’image de Jerry Pambo (le premier à avoir démissionné depuis Paris), Elza-Ritchuelle Boukandou, Anges Kévin Nzigou avaient cette particularité d’être des novices en politique. Dans leur naïveté, ils ont vu en Moukagni pas seulement un leader politique au sens vulgaire du terme, mais un père, un exemple, un compagnon de lutte qui avait la capacité de les accompagner dans le sens du renouvellement de la classe politique gabonaise. Malheureusement, ce père a abusé de leur naïveté. En faisant cela, il a violé le contrat de confiance qui le liait à eux, celui de tout faire pour ne pas leur montrer le visage d’un traitre, d’un corrompu, d’un vendu. De ne pas leur montrer sa « nudité ». Malheureusement, c’est ce qui vient d’arriver.
Ainsi, au-delà de ce procès qu’il vient d’emporter sur des gamins à la naïveté débordante, Moukagni sait au plus profond de lui-même que plus rien ne sera comme avant. Il se fait en ce moment de nouveaux amis certes, mais il va vite comprendre que ces derniers, qui arrivent au moment où il émarge au gouvernement, ne sont guidés que par l’intérêt, pas par conviction. Ce qui n’était pas le cas de ces gamins qui, certainement, auraient pu, eux-aussi, avoir des postes au sein du ministère de celui qui, hier encore, était leur père, leur mentor, leur leader. Mais, au nom du peuple, ils n’ont pas failli, ils n’ont pas cédé. Ils sont des exemples pour le bas peuple.
Pour ces gamins aussi, plus rien ne sera comme avant. Ils viennent de se faire surprendre par un individu qu’ils prenaient pour un modèle mais qui s’est révélé être un traitre. Leur incrédulité est totale. Ils ne s’expliquent pas ce qui est arrivé… Ne pouvant trouver des réponses, dans la précipitation, ils ont décidé tout de suite, sans prendre le temps de la réflexion, de créer leur propre parti. Moukagni vient de leur faire la démonstration de comment se comporte un régime dictatorial vis-à-vis de ceux qui le dénoncent. La bande à Ritchuelle aurait gagné à prendre un temps d’observation, d’écoute et de réflexion. En décidant de créer tout de suite un autre parti, ils font là la preuve de leur jeunesse, de leur naïveté en politique. Ils agissent par émotion. Or, la politique est le domaine de tout, sauf celui des sentiments et des émotions. C’est pourtant ce que leur ancien leader Moukagni vient de leur en faire la démonstration.
Il y a quelques années, des jeunes qui, dans la même logique, avaient suivi le père Paul Mba Abessole. Auprès de ce grand homme politique, ils avaient tout appris jusqu’à ce matin où le leader bûcheron décida de rallier le régime après avoir compris que Paris ne voulait pas l’aider à prendre le pouvoir à cause de ses origines fang. Ces jeunes avaient pour noms Grégory Ngbwa-Mintsa, Francis Edou Eyene, Désiré Ename, Rick-Emery Tsouk Ibound, Guy Pierre Biteghe, Christian Ateng Mendome, Marc Ona, Dieudonné Minlame… Comme les jeunes de Moukagni, ceux de Mba Abessole formèrent un bloc homogène en se servant des leçons apprises auprès de Mba Abessole. Ils ont dit non à l’idée de créer un parti. Ils ont plutôt opté pour s’affirmer chacun dans son domaine d’excellence. Aujourd’hui, Désiré Ename préside aux destinées du journal Echos du Nord ; Guy Pierre Biteghe à celles du Mbandja, encadrés par Francis Edou Eyene. Tsouck est l’un des rares cadres gabonais à la Banque mondiale, alors que Christian Ateng et Grégory Ngbwa-Mintsa ont rejoint l’au-delà. Pour le groupe des vivants, la lutte pour la destitution des Bongo se poursuit. Cette lutte ne permet aucune collaboration avec l’oppresseur. Elle est longue et difficile, le prix à payer est cher, mais cela vaut le coût.
Moukagni peut se le prendre pour dit. En se mettant à dos des enfants qui lui ont fait confiance, il vient de perdre à jamais le crédit qu’il avait au sein du peuple. Il est un homme banni par le peuple qui lui fera payer tôt ou tard sa trahison. Le peuple gabonais sait comment il traite les collabos et les traitres.