M. Guy Nzouba Ndama est le président du parti Les Démocrates (LD). En 2016, il claqua violemment la porte du Parti démocratique gabonais (PDG) dont il fut l’un des remarquables piliers. Il présida pendant une vingtaine d’années l’Assemblée nationale où son salaire mensuel culminait à cent soixante millions de Fcfa (160 000 000), hormis les multiples et mirobolantes primes. Le samedi 19 septembre 2022, en provenance du Congo, il a été cueilli à Kabala en possession de la faramineuse somme d’un milliard cent quatre-vingt dix millions de Fcfa (1 190 000 000) qu’il tentait d’introduire au Gabon.
La prouesse de Guy Nzouba Ndama
Il se susurre que, fauché, curieusement comme toujours, l’ex-baron du PDG aurait sollicité son pote, un ami de longue date. Il en serait sorti avec cette astronomique somme, pour le citoyen lambda, d’un milliard cent quatre-vingt dix millions de Fcfa (1,190). Cet ami de longue date, « sans oursins dans les poches » pour son peuple, n’étant ni membre du CAC 40 ni héritier à la fortune inépuisable, il se murmure que, pour répondre à l’urgence de son ami, ce dernier a saigné les caisses du trésor dont il se considère, à l’instar de tous les dictateurs tropicaux, comme propriétaire.
Au Gabon, sans surprise, cet évènement a créé des opinions divergentes. Une partie de l’opinion s’en est satisfaite, allant même jusqu’à féliciter Nzouba Ndama « d’être allé prendre l’argent à l’extérieur pour l’amener au Gabon ». Ainsi, Guy Nzouba Ndama est aussi perçu par ladite frange populaire comme un hussard qui prend sa revanche sur l’ensemble des parasites sévissant au Gabon.
En effet, depuis des lustres, les fonds sont toujours partis de notre pays à destination d’horizons divers à travers des bras séculiers. Ainsi, à l’initiative de ces crapuleux arrivés à pieds, par « Air buissons » ou à la nage, baluchons en bandoulière ou sur la tête, cure-dents serrés entre des lèvres souvent gercées et sèches, en sandalettes, les talons fendillés, l’argent destiné au développement local commun s’est volatilisé. D’autres, débordant de malice, exploitent outrancièrement les esprits naïfs des superstitieux au pouvoir pour parvenir à leurs fins. Ces « aéropages » ont fini par transformer notre pays en xénodoque se réclamant même d’être plus Gabonais que les Gabonais.
Une autre partie de l’opinion juge indécent de voir Guy Nzouba Ndama au centre d’un tel scandale alors que sa stature de responsable politique, de surcroît de l’opposition, devrait faire de lui un exemple de la moralisation et du financement de la vie publique. Pour notre part, le bon sens est un code qui ne peut subir une mise en œuvre sélective.
Tomber pieds joints dans le piège
La mesure de la vraisemblance nous conduit à soutenir l’hypothèse selon laquelle l’argent ici querellé ne provient pas d’un compte logé dans une banque du Congo. Le moyen de transfèrement mis en œuvre s’inscrit dans un cadre digne de la contrebande financière et semble soutenir cette hypothèse. Contrevenant à aux dispositions légales et compte tenu de son nouveau statut d’opposant au régime, Guy Nzouba Ndama a été d’emblée catalogué comme vulgaire bootlegger. Les jeunes « émergents », alertes dans l’art de l’intrigue, s’empressèrent de ridiculiser et d’humilier, à satiété, le « vieux ». Pendant ce temps, au Congo, des larmes ont coulé à flots des fatwas ont même été lancées contre les Gabonais. C’était l’incompréhension totale.
Toutefois et à n’en point douter, pensons-nous, Guy Nzouba Ndama paraît être tombé pieds joints dans le piège tendu par ses anciens amis, à en juger par l’imposant dispositif d’accueil à Kabala : douaniers, gendarmes, autres services de sécurité et badauds immortalisant et médiatisant la scène surréaliste. Spectacle affligeant lorsqu’on exhibe l’ex-président de l’Assemblée nationale installé devant un large et épais tapis de billets de banque étalés à perte de vue. Omar Bongo est mort, vive Guy Nzouba Ndama remettant au goût du jour la traditionnelle circulation des mallettes d’argent sous cape !
D’un côté, l’ex- président de l’Assemblée nationale a coaché l’émergent en chef qui lui rendait bien l’ascenseur. Jusqu’à ce que, patatras, Guy Nzouba Ndama, voyant le bateau émergent aller droit dans le récif, avait décidé de s’en extraire.
De l’autre côté de la frontière, le père Noël de Brazzaville, formé en Ukraine dans le domaine des services secrets que Poutine, dans son « opération spéciale », a entrepris de dénazifier, pourrait se révéler redoutable quel que soit le degré de l’amitié et Moukombo semble l’avoir perdu de vue. Qui a trahi trahira toujours.
La parole se doit d’être « orthogonale »
Les premiers angles de défense de Nzouba semblent n’avoir convaincu les opinions des deux côtés de la frontière. Guy Nzouba Ndama, de son nom sacré, Moukombo, a même oublié que la parole se doit d’être « orthogonale ». Aussi, face à des hommes de loi instrumentalisés, ses alibis sont-ils tombés un à un comme des châteaux des cartes.
Déclarant, d’une part, qu’il s’était rendu au Congo pour des soins médicaux en brandissant les vestiges d’une hospitalisation, en l’occurrence quelques sparadraps collés au poignet droit et à la tempe droite. Tout ceci a soulevé des rires moqueurs et des remarques sarcastiques acerbes du genre « les Congolais recherchent encore les structures sanitaires développées dans leur pays dont les patients Gabonais seraient soudain les bénéficiaires ». Ce qui, vraisemblablement, n’est pas le cas.
D’autre part, il a argué que l’argent en sa possession provenait d’un de ses comptes logés dans une banque congolaise. Mais laquelle ? Et pourquoi ce transfèrement artisanal et malveillant ? Malin qui croirait que ladite banque aurait ouvert ses portes, un samedi après-midi, spécialement pour l’ancien président de l’Assemblée nationale. Et des justificatifs bancaires auraient simplement fait foi.
Enfin, en désespoir de cause, il avança, comme pour amuser la galerie, pour dire que les valises contenaient du linge pour son épouse. Tout bien considéré, l’épaisseur de ce mensonge jette le trouble dans les esprits des militants et des sympathisants du parti quant à son aptitude à présider aux destinées du pays. Au demeurant, ils se demandent, pour la plupart, si un mensonge n’était pas caché dans la vérité, ou la vérité n’était pas enfouie dans le mensonge. Libre au philosophe émérite qu’il est d’éclaircir la situation. Ce président n’est-il pas un froussard à même de se débiner à la moindre incartade, se demanda tristement, à haute et intelligible voix, un groupe des militants du parti Les Démocrates ?
De la suite d’un tel questionnement pourrait dépendre la décision des hommes liges de tous horizons du bord de mer de continuer à le suivre en reconnaissance des services rendus. Un avant-goût lui a été donné à travers la balade de juridiction en juridiction, de cour en cour et une garde-à-vue humiliante qui lui ont été offertes tout en écornant, petit à petit, son honneur et sa dignité. Assigné à résidence grâce en partie au battage soutenu de ses amis politiques, il a évité une destination moins idyllique qui aurait compromis ses prétentions pour le palais du bord de mer qui serait, en somme, l’objectif inavoué de ses anciens amis. Dans une telle posture inconfortable, le cours de la vie est presque incertain, tant la possibilité de s’en sortir est mince. Du regard hagard surgissent les regrets.
Le temps du soutien au père Omar Bongo Ondimba, auquel il accorda des lois iniques dites « loi Nzouba » pour garantir sa longévité au pouvoir et ses virées libidinales insatiables, a coulé sous le pont de la Bouenguidi et toute l’énergie déployée au profit de ce vertugade Ali Bongo Ondimba, amoral, insouciant de la dignité humaine, mais fond de l’argent facile, s’est résumée à une escroquerie de sa confiance. C’est un secret de polichinelle, dans son soutien à l’accès au fauteuil présidentiel en 2009 d’Ali Bongo Ondimba, Guy Nzouba Ndama avait pris la tête de l’opération « Tout sauf Fang (TSF) » qui a abouti à la succession monarchique au pouvoir qui nous accable maintenant alors que, depuis 1998, la tendance générale clamait que « Bongo doit partir (BDP) ».
Ces soutiens appuyés à Bongo découlaient de cette volonté obséquieuse de garder la “province sœur” au pouvoir. Il n’avait de cesse, de manière goguenarde et arrogante, d’affirmer que les provinces du Haut-Ogooué et de l’Ogooué-Lolo étaient comme le pied gauche et le pied droit du pouvoir.
Protéger son fret et sa personne
A dire vrai, ce samedi 19 septembre 2022, l’attitude de Guy Nzouba Ndama n’a ressemblé ni plus ni moins qu’à celle d’un individu qui, étant lassé de vivre dans le faux, a décidé de mettre un terme à cette forfaiture politique, autrement dit de fournir des munitions à l’ennemi pour se faire abattre.
Qu’est-ce qui peut amener le président Guy Nzouba Ndama à prendre avec autant légèreté sa carrière politique et sa personne ? Même pour sa sécurité, le problème se posait déjà de se promener avec autant d’argent à la barbe des desperados et au mépris de sa vie. Même en passant par la frontière de la « province sœur », aucun élément espérentiel ni expérimentiel ne protégeait son fret et sa personne.
Aujourd’hui c’est Moukombo, demain à qui le tour si les…se réconcilient à la gamelle ?
Beauty Nana BAKITA MOUSSAVO