La société de téléphonie mobile Airtel Gabon, qui vient d’offrir au ministère de la Santé, via son directeur général Kamal Okba, la bagatelle de 500 millions de Fcfa, rubis sur l’ongle pour lutter contre le Covid-19, chercherait-elle à se donner une image clean auprès de l’opinion alors qu’elle réduit son personnel au régime pain sec ?
Fille incestueuse de la défunte société Zain, qui avait comme slogan, pour ne pas dire mérite, de rendre « la vie en mieux » à son personnel et à sa clientèle, Airtel Gabon, semble-t-il, ferait voir des vertes et des pas mûres à son personnel, particulièrement en ces temps de lutte contre le Coronavirus.
Alors que le DG de cette entreprise dite pompeusement citoyenne disait toute sa joie d’être avec l’équipe du Copil pour leur abouler un chèque de 500 millions : « Aujourd’hui, nous sommes contents d’être avec le Copil pour remettre ce chèque de 500 millions de francs pour aider dans la grande mission qui est la protection du pays de cette pandémie », son personnel ne cachait pas sa surprise de s’être fait couillonner cette fin du mois.
En effet, il semble que dès le début du confinement, Airtel Gabon aurait librement décidé de payer des primes d’astreinte de 15 000 Fcfa/jour, en dehors du salaire mensuel à son personnel. Or, il se trouve qu’en recevant leur paie cette fin du mois de mai 2020, tous les employés, sauf preuve du contraire de la part d’Airtel, ont reçu leur salaire sans la fameuse prime d’astreinte et sans la moindre explication de la part de la direction générale, dévoilant ainsi, le peu de considération qu’il a envers ces « petits nègres de service ».
Ruminant leur colère avec une dose de frilosité, les employés couillonnés se sont tout de même lâchés sur les réseaux sociaux afin de soulager leur conscience face à cette petite escroquerie dont ils sont victimes, alors que chaque jour que Dieu fait, ils prennent des risque pour satisfaire leur employeur.
Certains ont d’ailleurs mis au goût du jour, leur connaissance du droit : « Vu la loi n° 11/90 du 16 novembre 1990 relative à l’état d’urgence ; vu la loi n° 3/94 du 21 novembre 1994 portant code du travail en République gabonaise, ensemble les textes modificatifs subséquents ; vu le décret n° 106/PR/MEFPTFPDS du 09 avril 2020 désignant les services et les personnels essentiels du secteur public, parapublic et privé d’astreinte pendant l’état d’urgence lié au Covid-19 ;
l’arrêté n° 0061/PM/MEFPTFPDS du 20 avril 2020 fixant les modalités d’application du décret n° 106/PR/MEFPTFPDS du 09 avril 2020 désignant les services et les personnels essentiels du secteur public, parapublic et privé d’astreinte pendant l’état d’urgence lié au Covid-19 prend son sens dans la mesure où nous sommes dans nos droits de recevoir nos astreintes en considérant l’article 4 : des structures ne relevant pas des services essentiels dont le fonctionnent pendant la période d’état d’urgence, sur un rythme de travail réduit fixé comme suit : le lundi, le mercredi et le vendredi de 07 heures 30 minutes à 14 heures 30 minutes. A cet effet, ils sont tenus d’organiser le travail par rotation ou le télé-travail dans l’accomplissement de leurs missions.
A contrario c’est ce que ce nous avons fait au call center pendant la période d’avril, étant donné que l’article 5 fait état de notre situation en tant que personnels strictement nécessaires au fonctionnement régulier et ininterrompu des services essentiels des secteurs parapublic et privé intervenant dans les domaines ci-après: la téléphonie fixe et mobile : les personnels de direction, les commerciaux et les techniciens.
Ainsi le travail était réparti du lundi au dimanche, ôté les deux jours de repos qui constituent largement les 5 heures de temps pour recevoir nos astreintes, selon le décret n° 00100/PR/PM du 10 avril 2020 portant déclaration de l’état d’urgence en République gabonaise…
S’il vous plaît, on a risqué nos vies, la vie de nos familles parce que Dieu a dit que tu mangeras à la sueur de ton front. Je me rappelle, pendant ce mois d’avril, une des nôtres avait fait des pompes au carrefour Léon Mba, imposées par la GR, car on n’avait pas de masque. Comment ne pas avoir nos astreintes…? Tant bien que mal on se retrouvait des heures à la route pour patienter le transport délégué par Airtel. Certains se réveillaient à 5h du matin et rentraient chez eux à 20h. Combien de fois nous sommes arrivés exténués au travail et on a travaillé avec honneur, courage et ferveur malgré le stress d’attraper le virus et de savoir qu’on peut mourir en deux semaines pour garder le salaire à un meilleur pourcentage… Comment ne pas avoir les astreintes si ce n’est que pour citer ces exemples ?…»
« …le mois d’avril, nous avons travaillé tout le mois avec tous les risques que ça demandait. Beaucoup parmi nous ont été contaminés au Covid-19 sans compter ceux qui sont encore dans l’incertitude de leur état de santé. Beaucoup ici ne peuvent plus soulever, ni même allaiter leur enfant du fait qu’ils ont été déclarés positifs. Nous avons travaillé parfois sans protection pour rentabiliser et répondre à notre devoir en tant qu’agents sans se plaindre du risque que l’on courait.
Je pense que nous méritons le fruit de notre travail et du sacrifice que l’on a tous fait pour le bien de nos familles. Le partenaire peut ne pas être d’accord avec cela, ce n’est pas grave, mais toutes les mesures ont été prises par le président de République et son gouvernement, donc nous ne voyons pas pourquoi nous n’allons pas bénéficier de ce qui nous revient de droit vu que ce ne sont pas les agents qui ont décidé de cela… Nous voulons manger à sueur de notre front, s’il vous plaît ».
Gageons qu’après nous avoir lu, Airtel pourra donner à ses agents du call center la réponse qui sied. Par décence, le Copil gagnerait à rendre à Airtel son chèque, par solidarité avec des compatriotes exploités, voire surexploités.