Alfred Nguia Banda, Altogovéen libre, exilé politique en France, couche ces mots adressés à l’oligarchie régnante altogovéenne. Il les appelle à la prise de conscience et à ne pas s’accrocher au pouvoir au risque de se mettre à dos les autres provinces du Gabon. Aux autres Gabonais, Nguia Banda rappelle que le Haut-Ogooué n’est pas une province à part, car victime, elle aussi, de la mauvaise gestion des Bongo. Lecture !
Je commencerai cette lettre par une citation de Jules Roumain dans son ouvrage Gouverneur de la rosée : « La vie est comme un fil qui ne se casse pas, qui ne se coupe pas. Chaque homme, pendant son existence, fait un nœud ».
En effet, depuis son accession à une indépendance octroyée, le Gabon a connu trois présidents de la République :
Léon Mba, que la maladie a emporté très tôt, n’a pas pu faire véritablement ses preuves. Le nœud qu’il a attaché n’a pas donné des résultats susceptibles d’une appréciation objective.
Albert Bernard Bongo, dont l’arrivée au pouvoir a d’abord créé l’espoir, a plongé le pays, après quarante-deux ans de règne sans partage, dans une situation politico-socio-économique ubuesque et loufoque.
Ali Bongo Ondimba, personnage controversé et sulfureux, a davantage engagé le pays dans une crise multiforme quasi démentielle : une gouvernance calamiteuse, une criminalité économique et financière sidérante, un népotisme affligeant, une paupérisation intellectuelle et morale hallucinante. Le désastre touche tous les secteurs de la vie sociale. Le système scolaire est une véritable tragédie. Le secteur sanitaire est complètement délabré, les transports constituent un chemin de croix, une piraterie financière qui dépasse l’entendement. La précarité et la pauvreté évoluent de façon exponentielle par un chômage des jeunes devenu endémique et incompréhensible. Un tissu d’injustices incommensurables, une gestion des ressources humaines opaque, une corruption généralisée et une dictature terrifiante.
Ce sombre tableau est relayé par le hold-up électoral à la présidentielle du 27 août 2016 dont le candidat Jean Ping était le vainqueur. La victoire de Monsieur Jean Ping aurait été une excellente opportunité pour vous, chers oligarques, de sortir par la grande porte. Michel Chartrand le disait à juste titre : « Quand les bandits sont au pouvoir, la place d’un honnête homme est en prison ».
Mais votre entêtement obscur et schizophrénique de vouloir conserver coûte que coûte le pouvoir par des fleuves de sang, des disparitions forcées, les violations manifestes et flagrantes des libertés, des droits fondamentaux du peuple ainsi que par votre goût du lustre vous soumet à une viscérale détestation, voire une haine névrotique des autres Gabonais.
Chers oligarques altogovéens !
Il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir et plus sourd que celui qui ne veut pas entendre. Alors, ne voyez-vous pas que la politique que vous menez constitue le chapitre le plus cauchemardesque et le plus apocalyptique de l’histoire de notre pays ? Oui, Emmanuel Kant le disait : « La possession du pouvoir corrompt inévitablement la raison ». Les manœuvres politiciennes de conservation du pouvoir que vous élaborez maladroitement avec vos thuriféraires, collabos et renégats nouvellement convertis, vous exposent davantage à la colère du peuple. Il faut toujours avoir à l’esprit que le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours maître. L’heure a véritablement sonné pour que le curseur politique bouge. Il faut savoir quitter les choses avant qu’elles ne vous quittent. Le peuple gabonais se bat et se battra toujours pour le respect de son vote de l’élection présidentielle du 27 août 2016. La raison doit triompher sur l’obscurantisme et la passion. L’heure a encore sonné pour restituer le pouvoir confisqué. Ainsi vos intérêts, privilèges seront préservés et le Haut-Ogooué, arbitrairement ostracisé, pourra sortir de l’infamie dont il fait l’objet.
Chers oligarques altogovéens !
Le cas de la province du Haut-Ogooué interpelle plus d’un Altogovéen. L’instrumentalisation dont cette province fait l’objet constitue un scandale. En effet, province considérée, à tort ou à raison, comme la plus nantie, le Haut-Ogooué et les Altogovéens souffrent le martyr à l’instar des autres provinces et compatriotes gabonais, sinon plus. Ces compatriotes qui le pensent sont excusables, car l’image que vous, oligarques, vous donnez, ne correspond pas à la réalité. Qui plus est, vos propos et l’arrogance qui vous caractérisent décrédibilisent la province et contribuent injustement à soumettre les Altogovéens à une marginalisation insuportable.
En effet, Ali Onanga, a tenu des propos maladroits lors d’un meeting à Franceville : « Qui touche à Ali Bongo Ondimba aura affaire à la province du Haut-Ogooué ».
Dans le quotidien l’union du 5 décembre 2018, Monsieur Noël-Lambert Matha, ministre du gouvernement illégitime, convoque les ressortissants du Haut-Ogooué à une réunion. Ces deux cadres ignorent-ils les termes de l’article 1er de la Constitution : « Tout acte de discrimination raciale, ethnique ou religieuse, de même que toute propagande régionaliste pouvant porter atteinte à la sécurité intérieure ou extérieure de l’Etat ou à l’intégrité de la République sont punis par la loi ». Et l’article 2 d’ajouter : « Le Gabon est une République indivisible, laïque, républicaine, démocratique et sociale… » ?
Un autre opportuniste vient tout récemment de s’illustrer négativement, comme à son habitude, par des propos démagogiques à Franceville devant une assistance ébahie. Maganga Moussavou, très connu par ses invectives et sa rhétorique insultante et irrévérencieuse à l’égard du clan Bongo et des Altogovéens, vient de confirmer aux yeux de tous les Gabonais sa versatilité légendaire, son inconstance politique, sa vacuité morale et intellectuelle.
En effet, ne pouvant exercer les hautes fonctions de l’Etat par la voie des urnes, Maganga Moussavou voudrait y parvenir par la déformation honteuse de l’histoire politique du Gabon et par un bloc de propos dithyrambiques à l’égard d’Ali Bongo Ondimba et du président de la Cour constitutionnelle.
En effet, en évoquant le douloureux état du président Léon Mba, hospitalisé à Paris, le lilliputien politique veut tronquer l’histoire à son profit. C’est manifestement une grande escroquerie intellectuelle qui nécessite quelques précisions historiques. L’article 6, alinéa 5, de la Constitution de 1967, révisée à la hussarde, stipule : « Le président de la République est assisté d’un vice-président de la République qui le remplace en cas d’empêchement temporaire ou définitif et jouit alors des prérogatives, rang et pouvoir de chef de l’Etat ». Cette Constitution, qui instaure un régime présidentiel, avait permis à Albert Bernard Bongo, devenu vice-président de la République, d’être le colistier de Léon Mba à l’élection présidentielle anticipée du 19 mars 1967. A la mort du président Léon Mba, à Paris, Albert Bernard Bongo lui succède sur la base de cette nouvelle Constitution. Ce qui n’est pas le cas de la Constitution actuelle qui, à travers l’article 13 énonce : « En cas de vacance de la présidence de la République pour quelque cause que ce soit ou d’empêchement définitif de son titulaire constaté par le gouvernement et statuant à la majorité absolue de ses membres ou à défaut par le bureau des deux chambres du Parlement statuant ensemble à la majorité de leurs membres, le président du Sénat exerce provisoirement les fonctions du président de la République ou, en cas d’empêchement de celui-ci dûment constaté par la Cour constitutionnelle saisie dans les mêmes conditions, le vice-président du Sénat ….
En cas de vacance ou lorsque l’empêchement est déclaré définitif par la Cour constitutionnelle, le scrutin pour l’élection du nouveau président a lieu, sauf cas de force majeure constaté par la Cour constitutionnelle, trente jours au moins et soixante jours au plus après l’ouverture de la vacance ou de la déclaration du caractère définitif de l’empêchement ».
Pierre Claver Maganga Moussavou, dont la soif du pouvoir n’a pas de limite, ne peut donc pas assurer l’intérim de quelque manière que ce soit. Il ne pourra pas prononcer l’allocution présidentielle de fin d’année, car n’étant ni responsable du bilan annuel, encore moins capable de tracer des perspectives.
Si Ali Bongo se montre capable de signer des décrets et autres documents administratifs nécessitant une réflexion et des amendements, pourquoi ne parviendrait-il pas à lire une simple allocution de fin d’année ?
Maganga Moussavou, très connu pour son nombrilisme et son tribalisme sidérant, est frappé d’amnésie. Oublie-t-il ses déclarations tonitruantes au cours de l’émission Agora animée par Hass Nziengui mettant en cause la filiation d’Ali, le traitant de musicien et n’ayant aucune formation ? A Africa 24, il le qualifie « de roi fainéant, jouisseur et paresseux, passant le plus clair de son temps à voyager ».
En parlant de lui, Omar Bongo Ondimba disait : « Moi je n’aime pas parler de ces gens-là. Maganga Moussavou, c’est un extra-terrestre ».
Que Maganga Moussavou sache que les Altogovéens ne sont ni les sujets du clan Bongo ni de l’oligarchie régnante.
En allant à Franceville en villégiature, Maganga Moussavou a perdu son temps pour ne pas lire l’histoire politique du Gabon. Dommage !
Chers oligarques altogovéens !
Le peuple altogovéen, ostracisé par les autres compatriotes, mais surtout instrumentalisé, persécuté et pris en otage par vous, a subi et continue de subir. A l’image du pays tout entier, cette province connaît de nombreuses fractures et les fleuves de sang les plus odieux sont commis dans cette province. La communauté téké, injustement vilipendée, s’est vue délestée de brillants et valeureux cadres civils et militaires.
D’autres Altogovéens ayant bravé la pensée unique croupissent dans des prisons et subissent des traitements infâmes, dégradants et la torture.
Pascal Oyougou, qui totalise plus de 480 jours de prison, est victime de son engagement politique dans l’opposition. Saturnin Odouma et Madame Brigitte Ossibi, natifs de Bongoville, sont incarcérés depuis trois mois à la prison de Franceville. Les seuls chefs d’accusation demeurent la présentation de leur candidature aux élections législatives. Le mythe de la « princesse idiote » contre Malika Bongo, fille du despote. Madame Brigitte Ossibi, qui a perdu son époux le 3 décembre 2018, n’a pu bénéficier d’une libération provisoire pour assister à l’inhumation de son époux.
Moi-même, Alfred Nguia Banda, victime d’une tentative d’assassinat orchestrée par les extrémistes téké et leurs collabos obamba que nous connaissons, vis en exil en France. Le caractère hautement criminel et cynique qui vous caractérise se manifeste également par votre honteuse décision de m’interdire de rentrer au Gabon assister à l’inhumation de mon épouse décédée à l’hôpital américain de Paris. Mais à Dieu la rétribution, à Dieu la vengeance.
Je ne cesserai de remercier la grande diaspora européenne et particulièrement celle de France, venue des quatre coins m’assister de bout en bout. Gratitude que j’exprime à toute la classe politique de l’opposition gabonaise qui s’est mobilisée à Libreville, depuis l’aéroport, les veillées, l’Eglise et l’inhumation. Et pour l’entraide multiforme.
Depuis l’accession, par effraction, du despote au pouvoir, le nombre de demandeurs d’asile a augmenté de façon exponentielle et effrayante. Ce nombre a atteint 1 401, dont 229 Altogovéens. Chiffre très alarmant pour un petit pays qui devient la risée du monde.
Chers oligarques altogovéens !
La crise multiforme qui prend de l’ampleur, l’ingouvernabilité qui s’installe durablement et la désespérance qui habite profondément les cœurs meurtris des Gabonais devraient interpeler votre conscience.
Les manœuvres sordides de conservation du pouvoir ne vous serviront guère. Le temps est le véritable maître du temps. François Mitterrand, en parlant du temps, disait : « Il faut savoir laisser du temps au temps ». Oui, le temps est venu à bout des dictatures. La jurisprudence politique est très dense et devrait servir au temps présent pour préparer un futur alléchant pour des visionnaires. Bokassa, Mobutu, Moussa Traoré, Blaise Compaoré, Idi Amin Dada, Bozizé, Mugabe, n’ayant pas tenu compte du temps, ont fait lamentablement les frais de leur obstination à s’incruster au pouvoir. Il faut toujours avoir à l’esprit que chaque fruit a sa saison. Ne serait-il pas temps que vous vous retiriez pour jouir paisiblement de vos richesses ?
La politique ne doit pas constituer un champ d’embourgeoisement éternel ni de tromperie permanente, encore moins de persécution perpétuelle du peuple. Elle doit être une sphère privilégiée non seulement de l’affirmation intellectuelle et morale de soi, mais aussi et surtout la matrice fondamentale de défense des intérêts de l’Etat et du peuple. C’est ce qui confère à l’action politique son charme et ses lettres de noblesse. C’est vraiment ça l’essence du pacte républicain et du contrat social. Le Premier ministre singapourien, Lee Kuan Yew, que vous connaissez séduit quand il déclare : « J’avais le choix entre deux chemins, à savoir, le premier voler l’argent de l’Etat, enrichir mes amis et mes parents ; appauvrir mon pays et en conséquence mon peuple dans la misère.
Le deuxième, servir mon peuple et faire rentrer mon pays dans les rangs des dix meilleurs nations du monde. J’ai choisi le deuxième ».
Chers oligarques altogovéens !
Permettez-moi d’attirer votre attention en me référant à cette déclaration d’Abraham Lincoln : « On peut tromper tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps ». Et un proverbe obamba dit : « Le corps de garde d’un sage n’est jamais fréquenté par ceux qui ne veulent pas écouter les conseils ».
Je m’appelle Alfred Nguia Banda, Altogovéen libre, exilé politique en France