Dans son discours à la nation au soir du 31 décembre2022, le président élu Jean Ping est longuement revenu sur la question électorale, certainement en rapport aux différents scrutins de cette année. Sauf qu’à l’écouter, non seulement il ne sera pas candidat, mais n’espère pas non plus faire la courte échelle à ses amis candidats de l’opposition qui attendait de lui, un passage de témoin amical…En disant non aux électoralistes, Ping leur envoie un message inamical aux conséquences incalculable y compris au sein de la diaspora où ses partisans et les électoralistes sont arme au pied.
Entre sa position lors des élections locales et législatives de 2018 et les futures échéances de cette année, le discours de Jean Ping n’a visiblement pas varié. Envoyant dans les cordes, tous ceux qui au sein de l’opposition estimaient que le chinois, bien qu’ayant battu Ali Bongo en 2016, n’a pu accéder au bord de mer. Il lui fallait donc constater les limites de son combat qui logiquement devra prendre fin avec l’organisation des prochaines élections présidentielles et désigner la personne à même de poursuivre le combat pour l’alternance démocratique au Gabon. Malheureusement, Jean Ping va se payer la naïveté de tous ceux qu’il avait déjà lâché en 2018 et qui naïvement croyaient que l’homme des Charbonnages s’était un tant soit peu assagi. Que nenni : « La violation constante et permanente du vote et du choix fait par l’électorat gabonais, a atteint un point culminant avec l’élection présidentielle de 2016. La tradition de la violence post-électorale propre à ce régime au pouvoir depuis plus
de 50 ans a atteint un point de non-retour. Nous partageons la conviction profonde que définitivement, face à ce régime, point d’élection qui vaille. La peine ne vaut de parler d’élection… »
Désormais il est interdit aux activistes-électoralistes à Paris d’aller parler élection 2023 au Trocadéro. Ils seront pourchassés par les pro Ping.
Ce discours lucide va certainement laisser des traces en termes de frustration au sein des oppositions électoralistes du Gabon, notamment du côté de ceux qui ont soutenu la candidature de Ping en 2016. Ce discours, aussi éclairé soit-il, n’est-il pas guidé par l’émotion lorsqu’on sait qu’en dehors des élections, une seule alternative s’offre à l’opposition, le coup d’Etat militaire. Or, on ne se lève pas un matin, pour dire je vais prendre le pouvoir les armes à la main. Cela demande une minutieuse préparation, militaire, politique, sociale et même diplomatique, car en cas d’échec, il faudra bien trouver une frontière de repli…Certes, tous les autres dictateurs aux frontières du Gabon détestent Ali Bongo, mais tous également détestent les coups d’Etat. Ils n’hébergeront jamais des putschistes gabonais. (Sans oublier la main invisible qui tient le pays) Les élections restent donc la seule alternative qui vaille, en ce sens qu’à chaque fois que l’opposition va présenter des candidats, le régime sera obligé de tricher. La résignation sera la pire des choses qu’elle puisse faire, car elle offrira aux Bongo, le champ libre pour gagner les élections sans tricher.
En tournant le dos aux élections, Ping semble dire à ceux qui y croient, débrouillez-vous sans moi et sans mes partisans. Et c’est là tout le danger, car ses partisans prennent désormais pour traitre, tous ceux qui aspirent aller aux élections. Au sein de la diaspora en France, le mal est déjà fait, partisans de Jean Ping n’accordant la moindre importance à ceux qui là-bas, soutiennent ouvertement les électoralistes au Gabon. Leur dernier communiqué est explicite : “ Samedi 14 Janvier 2023 Place du Trocadéro à Paris 16ème (14h à 18h)
Le déroulé comme d’habitude, ne change pas lors de notre manifestation. Toutes les interventions seront axées sur le respect de notre souveraineté, notre vote… Jean Ping, les Martyrs et les prisonniers d’opinion, ni plus ni moins.
Ceux qui font allusion à 2023 sont priés de pas mettre les pieds. Ils sont interdits d’accès.”… Voilà qui est clair.
Au regard de la manière dont se font les choses, si Ping ne revoit pas sa position et s’il ne recadre pas ses fanatiques, cette attitude aura certainement des conséquences graves après les prochaines élections où l’opposition électoraliste aura sur son chemin, désormais deux adversaires aux intérêts divergents mais dont le sens du combat sera le même ; faire mordre la poussière à l’opposition électoraliste.
De son côté, l’opposition électoraliste se sent déjà comme dupé par un homme qu’elle a aveuglement soutenu en 2016 et qui après, a pris la lourde responsabilité de les abandonner en plein vol. Certes, au regard du poids de son âge, le chinois n’a plus rien à gagner dans son combat, mais quel sera le regard de l’histoire vis-à-vis de son parcours ? Il est encore temps pour lui, de sortir de l’émotion et laisser parler la raison. Et la raison commande qu’à pile ou face, il faut aller affronter les Bongo dans les urnes. Car personne ne maitrise l’humour de Dieu. Suivez notre regard en prenant comme axe, 2018.
Ornica B.
