Tout le « cinéma », il faut bien nommer les choses par leur nom, donné au peuple gabonais, ou encore au pays réel, par le système-Bongo, ou encore le pays officiel, montre clairement qu’on est encore loin de l’épilogue. Qui pourrait ne pas se révéler un happy end.
A croire que nous avons affaire à un film dont les scenarii et les scripts s’élaborent au fur et à mesure qu’on en tourne les séquences. La dernière en date concerne la prestation de serment des membres du gouvernement. Il n’y avait pourtant pas meilleure manière de mettre fin aux rumeurs les plus pessimistes qui engagent le pronostic vital d’Ali Bongo Ondimba que de laisser la presse nationale et internationale assister à ladite prestation de serment des ministres. Même de Rfi on se méfie. Une telle attitude prouve qu’il y anguille sous roche. Qu’il y a quelque chose à cacher.
Au cinéma, lorsque vous vous rapprochez d’un acteur en plein tournage, vous pouvez remarquer le détail des maquillages, des fausses rides, des fausses moustaches, enfin, de tous ces artifices sans lesquels le cinéma ne serait pas du cinéma. Pareil pour le théâtre. C’est pourquoi, en général, il est préférable de ne pas assister au tournage d’un film ou d’être trop près de la scène où se joue une pièce de théâtre. Au risque d’être désillusionné.
A tort ou à raison, pour de nombreux internautes, ce n’est pas l’enfant-roi qui a entendu les membres du gouvernement lors de la cérémonie de prestation de serment. A tout le moins, on est en droit, sans être aussi formel, de se demander si ce n’était pas lui qui était là. Mais difficile à estimer à une telle distance. Car le secret réside justement dans la distance. Le peuple tenu à distance depuis le Maroc, les journalistes à distance, dans la pièce d’à-côté, même les membres du gouvernement à distance respectable lors de la cérémonie. Une distance méticuleusement maintenue dans le but évident d’empêcher les Gabonais, la presse et même certains cercles du pouvoir de faire le point.
Le point sur le fait qu’Ali Bongo Ondimba est ou n’est plus. La vidéo muette avec le roi du Maroc, celle du 31 décembre 2018 et, enfin, celle de la prestation de serment, c’en est une aussi, ont toutes visé à confirmer qu’Ali Bongo Ondimba, non pas qu’il est en mesure d’assurer la fonction de président de la République, mais qu’il est bien vivant. Ce qui, aux yeux des tenants du système, est largement suffisant pour donner une constitutionnalité républicaine à une illimitation dans le temps de la convalescence d’Abo et aux diffusions de vidéogrammes où apparaît son image.
Que de tracasseries pour un homme qui va « très bien » aux dires de Guy-Bertrand Mapangou et du tout nouveau Premier ministre. La preuve que non ! la preuve que les choses ne sont pas encore au point. Dans un article du dernier Jeune Afrique, en page 8, nous apprenons que Mohammed VI a rencontré « Marie-Madeleine Mborantsuo, Pierre-Claver Maganga Moussavou et Emmanuel Issoze Ngondet » Plus loin, l’article poursuit : « Le roi a consulté les politiques, rassuré les responsables sous pression et, surtout, tenté de déminer les conflits entre clans rivaux. Le premier rassemble, en partie autour de 3M, des caciques tels qu’Hervé Patrick Opiangah, Ali Akbar Onanga, Fabrice Andjoua Bongo Ondimba, Steed Rey et Arsène Emvahou. Le second regroupe des « Ajeviens », (du nom de l’association que préside Brice-Laccruche Alihanga, le directeur de cabinet du président), comme ce proche de Sylvia Bongo, la première dame, et Ike Ngouoni, le porte-parole de la présidence. Entre les deux, se situent les « républicains » emmenés par Emmanuel Issoze Ngondet, qui comptent dans leurs rangs les ministres Lambert Matha ou Etienne Massard. Une guerre de clans qui, depuis l’AVC dont a été victime le chef de l’Etat en octobre dernier, prend des proportions inquiétantes ». Quelques conclusions surviennent nécessairement. Deux déjà. D’abord, le dégagement d’Issoze Ngondet de la primature semble en être le résultat. Secundo, si les clans s’affrontent c’est que chacun d’eux est nourri du sentiment que leur élément fédérateur, Ali Bongo Ondimba, est en situation d’empêchement définitif. D’où toutes ces ardeurs à vouloir s’accaparer le gouvernail « que M6 s’emploie à calmer », nous informe Jeune Afrique.
C’est vrai qu’au cinéma, comme on dit au Gabon, l’acteur ne meurt jamais à la fin. C’est ce que les tenants du pays officiel veulent faire croire au peuple, au pays réel. Marlon Brando est mort. Pourtant, on le voit encore sur les écrans.