Sauf à réécrire l’histoire du Gabon et sa Constitution en vigueur en 1966 et 67, il est inutile de vouloir faire croire aux gabonais que pendant le séjour hospitalier de feu Président Léon Mba en France, ses vice-présidents successifs, Paul-Marie Yembit et Albert Bongo, allaient régulièrement prendre des consignes auprès de Léon Mba et lui faire signer les décrets à l’ambassade du Gabon en France.
Plusieurs gabonais savent que la Constitution en vigueur en août 1966, était la loi constitutionnelle n° 1/61 du 21 février 1961 qui disposait en ces articles 8, 9 et 10 que :
Article 8. – Le président de la République est assisté de vice-présidents du gouvernement, qu’il nomme et qui exercent en son nom les pouvoirs qu’il leur délègue.
Article 9. – En cas d’intérim ou d’empêchement temporaire, les fonctions du président de la République, à l’exclusion des pouvoirs prévus par les articles 16, 17 et 19, sont provisoirement exercés par un vice-président du gouvernement.
Article 10. – En cas de vacance définitive de la présidence de la République, pour quelque cause que ce soit, constatée par la Cour suprême saisie par le gouvernement ou par le président de l’Assemblée nationale, le président de la République est remplacé provisoirement par un vice-président du gouvernement jusqu’à l’élection au suffrage universel direct du nouveau président de la République, laquelle doit intervenir au plus tard dans les trois mois de la constatation de la vacance.
Ce que l’on sait, c’est que placé en orbite par la France pour succéder à Léon Mba déjà malade, le chef de cabinet, Albert Bongo, sera nommé ministre délégué à la présidence dès septembre 1965 et exercera en réalité, les fonctions d’un Premier ministre.
Lorsque Léon Mba est hospitalisé à Paris en août 1966, bien qu’étant en incapacité de gouverner, il s’accrochera au pouvoir, alors que son état de santé ne lui permet plus de retourner au Gabon exercer ses fonctions. C’est sur insistance de Jacques Foccart, qu’en novembre 1966, Léon Mba acceptera de nommer Albert Bongo au poste de vice-président, en remplacement de Paul-Marie Yembit ; non pas par un décret signé de sa main à l’ambassade du Gabon en France, mais par un message radiotélévisé, enregistré dans sa chambre de l’hôpital Claude-Bernard à Paris. Dès lors, Albert Bongo qui règne déjà en maître sur le pays depuis l’hospitalisation du président Léon Mba assurera l’intérim de ce dernier, conformément aux dispositions de l’article 9 de la Constitution du 21 février 1961.
En février 1967, soit trois (3) mois plus tard, un coup d’Etat constitutionnel est opéré par une modification de la Constitution, qui permettra au vice-président d’exercer les pleins pouvoirs exécutifs en l’absence du Président de la République. L’article 6 alinéa 5 de cette Constitution disposait clairement que :
« Le président de la République est assisté d’un vice-président de la République qui le remplace en cas d’empêchement temporaire ou définitif et jouit alors des prérogatives, rang et pouvoirs du chef de l’Etat ».
Le plan de succession orchestré par la France étant déjà finalisé, peut-on raisonnablement imaginer un Albert Bongo jouissant des rang et prérogatives de chef de l’état que lui conférait la Constitution du 17 février 1967, recourir aux instructions d’un Léon Mba qui cloué sur son lit d’hôpital, n’avait plus eu la force de se rendre à l’ambassade du Gabon pour enregistrer le message radiotélévisé de nomination de son vice-président de la république ?
Ce que tout le monde sait, c’est que Albert Bongo n’avait plus besoin de consulter Léon Mba qui sous la pression cédera à l’idée de la France, de prendre l’opposition de court en organisant un mois après la révision de la Constitution, des élections générales anticipées le 19 mars 1967, alors que celles-ci étaient initialement prévues pour 1968.
Nous mettons au défi, quiconque pourra produire l’original du décret de nomination d’Albert Bongo au poste de vice-président de la République, et des actes de la République signés du président Léon Mba à l’ambassade du Gabon en France, entre février et novembre 1967.
Par ailleurs, il serait bon que ceux qui prétendent que les locaux d’une ambassade à l’étranger constituent une parcelle du territoire de leur pays, soient plus convaincants en indiquant dans la convention de Vienne de 1961 qui codifie le droit des relations diplomatiques, les dispositions qui font mention de l’extraterritorialité.
Le Gabon n’est pas une colonie du Maroc.
Marcel Djabioh