En France, le représentant de commerce, très souvent appelé VRP (voyageur, représentant et placier), est un salarié dont la fonction est de démarcher une clientèle de particuliers ou d’entreprises pour le compte d’un ou plusieurs employeurs. A quelques nuances près, c’est bien à l’absence d’un VRP que le système Bongo est confronté depuis le 24 octobre 2019. Près de quatre mois. Les clans bongoïstes bataillent et ils sont de plus en plus clairement identifiés.
Pour Jeune Afrique, par exemple, les derniers départs du gouvernement – Magnagna excepté – ne sont que le résultat de ces luttes de clans. Par ailleurs, dans un article intitulé « Ali Bongo, chef d’Etat délégué aux villes », il ne fait aucun doute pour La lettre du Continent n°794 que le choix des maires des villes stratégiques correspond à la volonté de Brice Laccruche Alihanga de les contrôler. Léandre Nzué à Libreville, Gabriel Tchango à Port-Gentil, Christian Abessolo Mengue à Oyem, Joachim Lekogho à Franceville et Grégory Laccruche Alihanga, le bien nommé, à Akanda sont, tous, assimilés à ses obligés. Pour cette publication, très renseignée sur les dessous du microcosme politique gabonais au pouvoir, Marie-Madeleine Mborantsuo (3M) serait, par exemple, la « marraine » de Rose Christiane Ossouka Raponda que des liens rattacheraient au Premier ministre Julien Nkoghe Bekale avec qui la nouvelle patronne de la Défense devra examiner les dossiers sécuritaires. Massard, quant à lui, aurait été remercié du fait de ses contradictions avec le Directeur de cabinet Laccruche. Et Laccruche, peu l’ignorent, ce n’est pas 3M, c’est Sylvia Bongo. Sylvia Bongo, c’est Nourredine Bongo Ondimba qui n’ayant pas gardé les cochons avec Fabrice Andjoua Bongo Ondimba, le fils de 3M, est soupçonné de nourrir ses propres ambitions. Que dire de Frédéric Bongo ? Et quid du retour de Mferri Bongo, compagne officielle de Paul Toungui, dans les murs du palais du bord de mer ?
De toute évidence, pour cette foison de personnalités dont l’énumération est loin d’être exhaustive, il est donc question de trouver ou de se présenter comme le nouveau VPR du système. Et non pas de changer le système. Et le problème, il est bien là. C’est que ce système ne veut pas et ne peut pas s’autodétruire. Bien au contraire, il se concocte au sein des think tanks du système Bongo des manœuvres pour le stabiliser parce qu’en ébullition interne depuis le 24 octobre dernier. Des manœuvres dont le but stratégique n’est que la permanence dudit système. Et des pistes, semble-t-il, sont à l’étude.
D’abord, s’assurer, avant de lancer la vacance ou l’empêchement définitif, que le patron du Sénat, futur président de la République, ne constituera pas un empêchement quelconque au VRP qui aura été choisi pour représenter le système pour les 7 prochaines années. Apparemment, les choses n’étant pas encore au point, certaines fuites laissent entendre que l’inquiétude pourrait même pousser à déplacer l’intérim présidentiel, après modification prévisible de la Constitution, vers l’Assemblée nationale.
Par ailleurs, la crainte atavique du suffrage universel de la part des tenants bongoïstes du pouvoir donnerait à réfléchir à leurs think tanks qui savent pertinemment que la légitimité de Jean Ping serait un handicap quasiment insurmontable. Surtout si le VPR choisi n’est qu’un bongoïste indécrottable reconnu et vomi par le peuple. Ils sont donc en train de soupeser l’idée d’une lourde modification de la Constitution qui ferait passer le Gabon à une autre République : faire voter le président de la République par un collège de grands électeurs. Et le problème serait, pensent-ils, réglé.
Les Gabonais, dans leur immense majorité, comprendront bien, après 30 ans de fausse démocratie, que le changement ne réside pas dans le choix de ce nouveau et énième VRP bongoïstemais dans la fin de ce système. A eux de décider comment.