Certains sifflotent déjà « TANT VA LA CRUCHE A L’EAU… ». C’est là une sagesse populaire dont le contenu explique que lorsque l’on défie un danger trop souvent ou que l’on commet toujours la même faute, on finit par en être la victime. Ce proverbe peut également être compris comme une métaphore de l’usure. D’où « tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se brise ».
Apparemment Brice Laccruche Alihanga vient de faire l’amère expérience de cette vérité populaire. Son départ du cabinet d’Ali Bongo Ondimba pour le gouvernement dirigé par Julien Nkoghe en est une illustration. Pour La lettre du continent de cette semaine, BLA aurait fauté à trois reprises.
LES ABO A DOS. D’abord, il se serait mis à dos le fils, Nourredine, et l’épouse, Sylvia, d’Ali Bongo Ondimba. « La pomme de discorde, souligne l’hebdomadaire français,… est à la fois financière et politique ».
FINANCES. Plusieurs opérations pétrolières récentes, à l’initiative de BLA, auraient fait l’objet de demandes d’explication de la part de Nourredine et de Sylvia Bongo. Une baisse de confiance qui a amené les Bongo à lui « retirer la gestion du domaine privé du couple présidentiel ». Désormais, c’est le pôpô « Mohamed Ali Saliou, fils de l’imam de Libreville et ami personnel de Nourredine Bongo…nommé le 15 octobre dernier directeur de cabinet adjoint » qui s’occupe des « affaires financières » des Bongo, notamment de ceux qui tiennent encore les clefs…de la présidence.
POLITIQUE. BLA se serait osé à proposer que se tienne « un dialogue avec tous les partis gabonais…une vaste discussion avec toute la classe politique gabonaise, y compris les exilés, qui seraient, pour l’occasion, autorisés à rentrer ». Ce qui, selon La Lettre du continent (LC), a « mis le feu aux poudres » parce que ces « pourparlers » auraient porté « sur l’organisation de la prochaine élection présidentielle pour laquelle Laccruche » aurait recommandé « un scrutin indirect à un tour ». Alors qu’officiellement la prochaine présidentielle n’interviendra qu’en 2023, BLA, pris entre vitesse et précipitation, aurait tôt fait d’être soupçonné de nourrir des ambitions personnelles. La famille d’Ali Bongo, Nourredine et Sylvia principalement, ainsi que celle élargie d’Omar Bongo, représentée, dans le cas d’espèce, par Marie-Madeleine Mborantsuo, ne l’entendant pas de cette oreille viennent d’y mettre un holà.
Tel que narré par LC, à aucun moment, il n’est fait allusion à Ali Bongo à aucun moment du récit. Où est-il dans cette affaire ? Encore absent ? Son épouse et son fils sont contraints de rentrer dans l’arène au point de faire sauter le directeur de cabinet d’un chef d’Etat ? Où est le chef d’Etat lui-même ? Ali Bongo est-il encore capable de prendre de telles décisions ? BLA doit, ricanent d’aucuns, s’interroger. Et l’on devine aisément Massard et Onanga Y’Obegue riant sous cape, eux qui ont mis en doute la validité des décisions qui les avaient éconduits du gouvernement.
De fait, celle qui vient de reprendre sérieusement la main n’est autre que 3M qui représente l’Etat profond sans qui, finalement, BLA ne peut rien au-delà de certaines limites. Dans nos Etats, et nous l’avons plusieurs fois souligné, sans les contrôles absolus de l’argent, des institutions et de la force, réunis, il est vaniteux de penser pouvoir durer et perdurer. BLA n’a jamais été au fait de ces contrôles. Qui le lui aurait permis ? Qui l’aurait laissé faire ?
Par ailleurs, même la famille d’Ali Bongo, Nourredine et Sylvia, sans 3M comme alliée, pourrait avoir beaucoup de mal à tirer leur épingle du jeu… notamment dans le Haut-Ogooué, par exemple, avec tout ce que cela implique.
Bien évidemment, de nombreux observateurs s’interrogent sur le rôle bienveillant ou pas de la France dans les mouvements politico-administratifs qui viennent de s’opérer dans les hautes sphères de l’Etat-Bongo. La France qui, nous le rappelons, a été officiellement invitée par le Parlement européen à proposer des issues à la crise post-électorale gabonaise. La France a-t-elle été surprise ? Difficile à croire. La mission de BLA n’est-elle pas tout simplement accomplie ?
Affaire à suivre, bien évidemment.