Pour arriver à ses fins, Mborantsuo s’est appuyée sur l’article 88 de la Constitution qui stipule que la Cour constitutionnelle assure la régulation des institutions. Dans son entendement, qui vise à préserver les intérêts du clan au pouvoir, Mbourantsuo estime que cet article lui donne le droit de dissoudre les institutions, de réformer leur nature, d’en créer au besoin. Ce qu’elle a déjà eu l’occasion de faire le 30 avril dernier en ordonnant les dissolutions du gouvernement et de l’Assemblée nationale.
Dans les tous les systèmes constitutionnels et politiques modernes ou démocratiques, on retrouve la même disposition. La régulation à laquelle la Constitution fait référence porte non sur la reformulation de la nature des institutions ou même de leurs missions, mais sur les interprétations (avis) ou arbitrages (décisions) que la Cour doit faire en cas de crise ou de conflit entre institutions. Exemple : entre le président de la République et le PM, le gouvernement et l’Assemblée nationale ou avec toute autre institution en rapport avec leurs domaines respectifs d’action. Il ne s’agit pas d’aller abusivement au-delà du texte constitutionnel pour « imaginer » ce qui n’est pas écrit. La Cour constitutionnelle a le pouvoir d’interprétation et non de réécriture de la Constitution. Ce travail est fait par le pouvoir constituant et, au besoin, par le Parlement (article 116). La Cour constitutionnelle se borne à expliquer, comme tout juge, le texte constitutionnel, mais pas à lui rajouter des choses. On ne peut pas avoir fait une révision constitutionnelle par voie parlementaire en décembre 2017, validée en janvier 2018, et se retrouver chaque fois (avril 2018 et maintenant novembre 2018) avec des rajouts par petits bouts de la Constitution et ce, chaque fois que cela arrange le clan Bongo.
En estimant que l’on n’est ni dans le cas d’une vacance du pouvoir (car Boa n’étant pas déclaré mort ou démissionnaire officiellement, encore que vacance n’est pas synonyme de mort), ni d’empêchement définitif du PR (inaptitude physique ou mentale à diriger le pays), Mbourantsuo a créé de toutes pièces la notion d’« empêchement provisoire ». Cette notion n’existe pas dans la Constitution. A partir de là, elle a conclu que Boa, même dans un état de santé précaire, restera au pouvoir ad vitam aeternam. Du moins, le temps pour eux de se préparer, comme en RDC, pour désigner un successeur « sûr » (comme en 2009). C’est donc sciemment qu’ils ne veulent pas dire au peuple gabonais l’état exact de santé de Boa afin de maintenir le suspens en leur faveur jusqu’au dernier moment. En réalité, cela veut dire que même si Boa ne peut pas rentrer maintenant ou recouvrer sa santé d’ici un à 6 mois ou plus, le VPR et le PM, en écran, gèreront le pays, mais en arrière-plan ce sera bel et bien Mbourantsuo qui dirigera véritablement le pays. Si, pour elle, ce n’est pas une vacance du pouvoir ou, encore moins, un empêchement du PR, une chose est sûre, c’est un coup d’Etat !
Mborantsuo n’est nullement concernée ou qualifiée pour modifier ou compléter même d’un mot la Constitution. Elles’illustre délibérément soit dans le désordre juridique, soit dans l’incompétence au nom des intérêts du clan ethnique et financier auquel elle appartient. La vérité voudrait que ce soit la Constitution qui parle « noir » sur « blanc ».