Sans avoir besoin d’attendre les résultats de ce sérieux institut international, les Gabonais vivent au quotidien dans l’insécurité. Une insécurité aux causes essentiellement politiques et économiques. Sur le plan politique, l’Etat de droit est inexistant, pour ne pas dire aléatoire. Les écoutes téléphoniques systématiques et illégales des citoyens, les enlèvements d’activistes politiques ou de la société civile, les crimes rituels pour nourrir de sang un pouvoir illégitime et vomi par le peuple gabonais, les tortures et assassinats politiques expliquent le sentiment d’insécurité des Gabonais.
L’on vit dans un pays où la police, la gendarmerie et les services spéciaux de l’armée (B2, etc.) surveillent, bastonnent, torturent, humilient et peuvent enlever, tirer et tuer au su et au vu de tout le monde et sont parfois complices des pires crimes contre l’espèce humaine au seul motif que les ramifications de cette criminalité sont ordonnées ou bénéficient, au final, au pouvoir sanguinaire et illégitime établi de force au Gabon. Ainsi les multiples bavures d’agents des forces de sécurité et de défense, la recrudescence des violences et les nombreuses affaires judiciaires non résolues sont de nature à corroborer ce mauvais classement du Gabon.
Sur le plan économique, la pauvreté grimpe quand l’Etat Bongo-PDG multiplie les impôts et taxes, les dettes pendant que les tenants du régime vivent dans l’opulence et demandent au reste de la population de se serrer la ceinture parce que la « crise ». Un mot qui était tabou en 2016, mais qui, curieusement, est devenu l’apanage des émergents. C’est le terme « austérité » qu’ils récusent comme si les mesures anti-sociales et anti-fonctionnaires qu’ils balancent au pifomètre étaient autre chose que de l’austérité. Cette pauvreté explique (mais ne justifie pas) le recours à la violence dans les quartiers (braquages, vols, assassinats, drogues) pour des motifs d’une banalité déconcertante : le fils qui tue le père pour sa pension, le voisin qui braque derrière les bananiers pour arracher un téléphone, les jeunes qui s’adonnent aux cobolos et commettent vols, braquages, viols et assassinats. La raison est la défaillance généralisée de l’Etat sous les Bongo de père en fils : l’école ne fonctionne pas bien, les entreprises ne recrutent pas, les parents sont au chômage ou gagnent des petits revenus qui ne permettent pas de scolariser et nourrir correctement leur progéniture, la fonction publique qui ferme les portes et bloque les salaires des chefs de familles.
Ce qui a été étudié ici c’est le sentiment d’insécurité, de « peur » qu’éprouvent la grande majorité de Gabonais. D’ailleurs, les seuls pays au monde qui devancent actuellement le Gabon sont les pays en guerre civile ouverte (Vénézuela, Afghanistan). Les Gabonais n’ont pas confiance en leur Etat qui doit assurer leur sécurité économique et sociale. Un manque de confiance que les résultats des sondages de l’afro-baromètre publiés par l’UOB et le Pnud en 2016 avaient déjà révélé : plus de 60 % de Gabonais ne font pas confiance aux institutions politiques et administratives du pays. Un score qui correspond presque, trait pour trait, au résultat que Jean Ping a obtenu à la présidentielle de 2016. Les chiffres publiés par l’institut Gallup, finalement, ne décrivent pas une réalité ou des sentiments d’insécurité inventés ou méconnus des Gabonais puisque le sondage a été mené à Libreville l’année dernière. Ils corroborent, par contre, un triste constat : le Gabon est dangereux pour les Gabonais. La justice ne dit pas le droit mais veille au grain des Bongo ou de ceux qui versent des pots-de-vin ; la police et la gendarmerie, pour ne plus le redire, montrent du zèle quand il est question de commettre des exactions sur de paisibles populations qui revendiquent le respect des lois de la République et les crimes rituels qui profitent à ce régime ne sont pas élucidés.