Malgré l’annonce de la suspension de la mesure tendant à imposer l’obtention de la bourse à 19 ans et 12/20 de moyenne, la vigilance reste de mise, car, en ligne de mire, ce régime illégitime vise la mise à mort de l’école de la République (l’école pour tous) afin d’instituer une école qui ne serait accessible qu’aux nantis.
L’école est le moteur de l’ascension sociale dans un tout moderne. Les combats menées au cours du siècle dernier en Occident ont permis de rendre le savoir (l’école) universel et de garantir à tous, sur la base des seuls mérites et non plus du nom de famille et de l’argent, un avenir meilleur. Le modèle social gabonais que les Bongo veulent démanteler parce qu’il serait devenu trop coûteux pour les finances publiques n’est pas la cause de la crise économique actuelle, ni celle des finances publiques et de l’économie. Sans ce modèle social, des enfants de prolétaires et de pauvres, aujourd’hui devenus ministres, DG, magistrats, médecins, enseignants du supérieur, officiers supérieurs des corps d’armée…auraient naturellement remplacé leurs pères dans les champs pour pratiquer une agriculture de subsistance ou dans les lacs pour pêcher au jour le jour. Les Moukagni-Iwangou, Michel Menga, Faustin Boukoubi, Julien Nkoghe Bekale, Marie Madeleine Mborantsuo et consorts ne peuvent pas dire le contraire. Mais comme aujourd’hui ils sont devenus au service d’un régime dont ils savent au fond d’eux-mêmes qu’il est mauvais, ils acceptent, malgré eux, de défendre l’indéfendable pour protéger leurs sources de revenus et d’avantages. Jusqu’à quand, messieurs les ministres « tueurs » de l’école de la République, camperez-vous sur des positions intenables et injustes ?
Le démantèlement de l’école de la République se fait comment ?
En tentant de prendre les deux mesures d’obtention du baccalauréat et de la bourse (19 ans et 12/20) alors que la moyenne d’âge d’arrivée en terminale est actuellement 21, 22, voire 23 ans actuellement, le régime va créer un effet pervers : le désistement des bancs de l’école des élèves qui vont désormais se dire qu’avec cet âge-là ils n’auront aucun appui pour aller loin dans les études. A partir du bac de juillet 2019 prochain, beaucoup d’élèves se seraient démoralisés quant au fait qu’ils n’ont pas 19 ans et 12/20 au bac. Ces élèves représentent 85 % de nos bacheliers, soit plus de près de 12 000. Donc, l’Etat va fabriquer des chômeurs en quantité industrielle au cas où cette mesure revenait au goût du jour.
Comment naît dès lors l’école des nantis ?
Dans le contexte de cette nouvelle réforme, si jamais elle venait à nouveau, l’Etat ne s’occupera désormais que de ceux qui ont 19 ans et 12/20 au bac. En regardant les données statistiques de l’Agence nationale des bourses du Gabon (ANBG), sur 1 000 élèves de 19 ans qui ont le bac, à peine 100 seulement d’entre eux ont une mention autre que « passable », c’est-à-dire ont une moyenne égale ou supérieure à 12/20. Cela veut dire quoi concrètement ? Cela veut dire que dès le bac, l’Etat ne va octroyer des bourses qu’à 100 bacheliers sur un total d’admis prévus de 12 000. Cela veut dire que plus de 11 000 élèves, si on garde les statistiques actuelles, iront l’université sans bourse, contrairement à la donne actuelle où ils sont presque 100 % de boursiers dès l’obtention du bac, à l’exception de ceux qui étaient dans les prépas et autres établissements privés non reconnus d’utilité publique. Un vrai désastre social à court terme !
Dans ce contexte-là, ne feront l’université que les enfants dont les parents ont les moyens, donc les nantis. Si, déjà actuellement, avec la crise à l’UOB et dans les autres grandes écoles de l’Etat (USS, USTM, Enset, Institut de gestion, ENS, IUSO, Ena, Ecole nationale de la poste, Ecole nationale des eaux et forêts…) frappées par les mesures d’austérité d’Ali Bongo (interdiction de concours pendant 3 ans), les parents inscrivent en parallèle leurs enfants dans des universités et écoles privées, cela va donc devenir la tendance nationale. Mais où les parents de pauvres vont-ils trouver l’argent pour inscrire leurs enfants dans des universités privées chères dont les coûts vont de 700 000 à 1 500 000 Fcfa la première année ? Il faut aussi s’attendre à ce que l’UOB, comme les universités privées et les hôpitaux publics-cliniques (Owendo, Jeanne Ebori, Angondjé) revoie aussi à la hausse ses frais d’ici la rentrée 2019, au plus tard 2020. Donc seuls les enfants des nantis fréquenteront l’UOB et les autres universités privées qui ne vont pas tarder à rehausser leurs frais grâce à cette mesure impopulaire.