Il est plus qu’évident que la dernière sortie d’Ali Bongo Ondimba, émaillée de difficultés d’élocution, n’avait d’autre but essentiel que le remaniement qui vient de s’abattre sur les partenaires comme une faux pour couper l’herbe sous les pieds de tous ceux qui se mettraient en tête de profiter de l’évident affaiblissement des potentialités physiques d’Abo.
Ce n’est pas nouveau. C’est même une vieille pratique à laquelle ce dernier nous a habitués depuis qu’il a succédé à Omar Bongo Ondimba. A l’inverse, celui-ci, dès 1967, avait plutôt eu tendance à rameuter systématiquement tout le monde ou presque. Au point de rassembler amis et adversaires dans le même parti, son parti unique, le PDG.
Contrairement à l’actuel occupant du palais du bord de mer dont les premiers coups de faux, en 2009, se sont abattus sur les anciens collaborateurs du disparu. Ces vieux avec qui on ne saurait faire du neuf comme, en son temps, plastronnait Ali Akbar Onanga Y’Obegue. Ils ont été remerciés, parfois poliment, souvent sans ménagement. Ejectés du gouvernement, harcelés jusqu’au sein du PDG, ils ont été les premières victimes à faire les frais de l’accrombessisme triomphant.
Simplice Guédet Manzela, François Engongah Owono, Paul Toungui, Laure Olga Gondjout, Richard-Auguste Onouviet, Idriss Ngari, Honorine Dossou Naki, Jean-Norbert Diramba, Angélique Ngoma, Georgette Koko, etc. Leur instinct de survie les a poussés à se replier au sein du parti et du Parlement. Et à y entretenir une certaine résistance face à l’absolutisme du bord de mer. Mais jusqu’où pouvait aller cette résistance alors que les cordons de la bourse était tenus par le cabinet du président de la République ? Une bourse qui a préféré financer les courants concurrents du PDG : notamment le Mogabo et Renaissance. En rappel, quelques noms phares de ces organisations : Pacôme Moubelet Boubeya, Ali Akbar Onanga, Denise Mekam’ne, Alain Claude Billie-By-Nze et autres Mamfoumbi… C’était là le deuxième coup de faux dans l’héritage laissé par Obo. Partisans. L’APR (Action et perspectives pour le président de la République) de Guy-Bertrand Mapangou, Noël Nelson Messone, Ernest Mpouho Epigat, entre autres, après avoir tenté de s’imposer face au Mogabo qui bénéficiait des appuis du cabinet présidentiel de l’époque, s’est finalement tassé à l’approche du 11ème congrès du PDG après l’avertissement de Dodo Bouguendza qui a condamné « avec la dernière énergie [la] démarche qui relève de l’indiscipline notoire » et donné un avertissement aux membres signataires du manifeste de l’APR parmi lesquels Guy Bertrand Mapangou, Noël Nelson Messone, Ernest Mpouho Epigat et François Engonga Owono. Ceci conformément à l’article 154 des statuts du PDG. Clair net et précis, Eric Dodo Bouguendza explique : « Le fonctionnement actuel du Parti démocratique gabonais ne peut plus s’accommoder de ce genre de sorties intempestives assimilables à une tentative de déstabilisation et de démobilisation ayant pour objectif majeur de faire obstruction à la mise en œuvre de la nouvelle vision du distingué camarade président Ali Bongo Ondimba. Le moment choisi subtilement par les auteurs de ce manifeste, à quelques jours du 11è congrès ordinaire avancé de notre parti, s’assimile à une manœuvre de diversion intolérable et injustifiable » et de « sorties insolites aux desseins inavoués [et de]sorties de piste cavalières ». Le règne du directeur de cabinet d’Abo a duré 5 ans, jusqu’en 2016, lorsqu’il fit un AVC. Sous la pression des réseaux paternels, l’éphémère Martin Boguikouma remplaça Accrombessi avant d’être lui-même rapidement écarté au profit de Brice Laccruche Alihanga qui accède à la direction du cabinet d’Abo en août 2017.
Ardent défenseur d’Ali Bongo lors de la campagne présidentielle d’août 2016, il est l’auteur de « L’or jeune : plaidoyer pour la jeunesse gabonaise », paru en juillet 2016, et fondateur de l’Association des jeunes émergents volontaires (Ajev). Près de deux ans après, tout le monde convient que ce monsieur a élargi son rayon d’action politique à un niveau jamais atteint par aucun dircab gabonais, sauf peut-être par Albert-Bernard Bongo dans les années 1960. Qui a d’ailleurs terminé président de la République.
Brice Laccruche en terrain conquis
Presque tout le monde s’accorde à dire que le dernier remaniement ministériel n’est venu que confirmer soit la symbiose entre Ali Bongo Ondimba et l’ami intime de son fils Nourredine, Laccruche Alihanga, soit sa puissance. En effet, ce sont aujourd’hui ses proches et autres ralliés qui dominent la composition du nouveau gouvernement. Un remaniement qui a signé l’épitaphe funéraire des accords politiques d’Angondjé avec les départs des ministres Ndaot, Mbadinga, Estelle Ondo et Ndoutoume Ngome. Départs précédés par l’éviction de PC Maganga Moussavou.
Certains PDGistes affirment, par ailleurs, que les nominations du PDG qui ont suivi ce remaniement peuvent être soumises à la même problématique. Quand on sait que le directeur de cabinet du « distingué camarade » n’est autre que Brice Laccruche Alihanga. Ces mêmes observateurs PDGistes n’hésitent à prévoir que cette situation peut perdurer jusqu’en 2023, le temps pour le successeur – l’ami du fils ou le fils de la mère ? – de préparer les conditions pour un sans-faute lors de la prochaine présidentielle. En effet, entre-temps, il faut bien convaincre la vieille garde qui, jusqu’aujourd’hui, tient les fusils par le bon bout et reste omarienne de la première heure. Une inconnue.