Le 12 mars 2022 marquera cinquante-quatre (54) ans du règne du Parti démocratique gabonais (PDG) au pouvoir depuis 1968. En réalité, il avait pris la place du Bloc démocratique gabonais (BDG 1953-1968) de Paul-Marie Indjenjet Gondjout (4 juin 1912 – 1er juillet 1990) et de Léon Gabriel Mba Minko-mi-Edang (9 février 1902 – 28 novembre 1967), mone Essokè et mongone Essivi, premier dirigeant de l’Etat gabonais qui fut, sous la férule du transfert de pouvoir sous la colonisation, premier maire gabonais élu de Libreville (1956), vice-président du Conseil exécutif (1957-1958), Premier ministre (1959-1961) et, enfin, premier président la République gabonaise post-coloniale (1961-1967).
Ce changement de nom par le nouveau président Albert-Bernard Bongo (1935-2009) avait pour but d’entamer la « rénovation » politique au Gabon. Mais 54 ans après, force est de constater que le pays a plutôt sombré sous le règne d’une famille et de leurs affidés. Aussi, sur les deux phases du long règne du PDG (1968-1990), phase du monopartisme qui devait éviter au Gabon les « affres de la division et du tribalisme » en appelant à « l’unité nationale de toutes les forces vives de la nation pour construire le développement du Gabon dans la paix et la concorde ». Un appel curieux, car si le Gabon était divisé en 1966, Albert-Bernard Bongo n’aurait jamais été président du Gabon.
Certes, aucune société n’est immunisée contre une guerre civile, mais le Gabon n’était pas sur la corde raide. C’est la gestion politique du règne des Bongo qui a favorisé les crispations communautaires sous la tyrannie des petites ethnies. Et le cycle post-monopartite en cours : (1990-2022). Les Gabonais sont écrasés de la même façon. Le pays est sous terre. Même les esprits nous ont tourné le dos. Ce qui en dit long sur la décrépitude gabonaise. Pour vous éviter des exégèses sociologiques, entendez le concept de habitus ici comme l’ensemble des dispositions socio-politiques qui déterminent un régime politique. Au point que, quoi qu’il fasse, il reproduit toujours les mêmes structurations. C’est comme une seconde nature, car ici, depuis 54 ans, tout est fait pour maintenir les choses en l’état. On ne choisit donc pas les ministres au Gabon pour résoudre les problèmes inhérents à la communauté politique, mais des collaborateurs qui permettent au régime Bongo-PDG de continuer à piller le pays.
Dès les législatives de 1990 et la présidentielle de 1993, Omar Bongo avait planté le décor de la phase du pluralisme autoritaire en confirmant qu’il demeurera éternellement au pouvoir. L’ironie c’est qu’en 1993 il avait déjà accumulé 26 ans de pouvoir sans partage. Mais il refusa de s’en aller en dépit d’un vote de défiance populaire en faveur du père Paul Mba Abessole. C’était pour cela que la formule imaginée par René Journiac (11 mai 1921-6-février à Ngaoundéré, au nord-Cameroun), magistrat de formation, bras droit et tête pensante de Jacques Foccart – une formule inédite en droit constitutionnel français qui consista à faire élire au Gabon en 1966 dans une élection anticipée un ticket à l’américaine, c’est-à-dire le PR et Le VPR sur le même bulletin de vote et le dernier succédera au premier – était taillée sur mesure pour un homme, car Léon Mba mort, personne n’aurait jamais voté pour cet inconnu (surtout dans le Haut-Ogooué) comme président de la République en 1966. Léon Mba avait donc été réélu avec une doublure.
Aristide Mba