Un mois après le constat de la mort des poissons, principalement les carpes, sur une bonne partie du fleuve Ogooué et son affluent la Ngounié, le gouvernement peine à dire avec exactitude ce qui tue des milliers de poissons dans l’eau. Les deux études qu’il a lancées jusque-là ont du mal à convaincre.
Le Centre national de recherches scientifiques et technologiques (Cenarest) était le premier à rendre ses conclusions, suivi du Centre international de recherches médicales de Franceville (Cirmf). Conclusions que nous avons publiées lors de notre dernière parution. Il se trouve que les moyens mis pour chercher et trouver ce qui tue les poissons à Lambaréné ne sont pas à la hauteur des conclusions. Pour le Cenarest, il lui est difficile de donner des conclusions convaincantes, faute d’un plateau technique performant au niveau de son laboratoire. Il suggère au gouvernement d’abouler le fric pour s’équiper en matériel de haute technologie. Le Cirmf, tout en écartant tout de go l’hypothèse d’une contamination chimique, impute la cause à la présence d’une bactérie de type Aeromonas veronii. Seulement ça ?
Il se trouve qu’aujourd’hui, non seulement le périmètre circonscrit lié à la mort des carpes s’est agrandi, mais, pire, depuis la semaine dernière, nous avons découvert qu’il n’y a plus que les carpes qui sont touchées. Du côté du lac Onangué et à l’île Pélican où nous avons été en fin de semaine dernière, nous nous sommes aperçus, pour s’en inquiéter, que l’Ogooué charriait sur les rivages et les bancs de sable de nombreuses espèces de cadavres de poissons. En dehors des carpes, il y avait des bossus, des machoirons, des brochets… Des poissons meurent par centaines, voire par milliers et le gouvernement peine à donner une explication plus plausible. C’est vraiment dommage, triste et affligeant ! La particularité de ces cadavres de poissons est que non seulement ils n’attirent pas les mouches, mais encore les charognards ne les consomment même pas. Est-ce à dire que la substance qui les tue empêche leur pourrissement ?
C’est d’autant plus triste et affligeant que les populations riveraines qui y vivent ne savent plus comment faire au moment où le gouvernement vient de proroger l’interdiction de la pêche et de la commercialisation de la carpe pour vendre le thon, son thon. Une vente dont se réjouit Lee White. Si, à Lambaréné les gens ont vite conclu que l’arrivée du thon, dont le ministre Lee White fait la promotion, coïncidant avec le début de la mort des carpes, le gouvernement serait donc derrière ce carnage, il n’en demeure pas moins que la vente du thon à un prix modéré n’atteint pas les lacs où la consommation du poisson local se poursuit. Dieu seul sait qu’ils sont des milliers dans les zones des lacs, avec de nombreux regroupements de villages, qui ne vivent essentiellement que de la pêche et qui utilisent l’eau de l’Ogooué pour l’ensemble de leurs besoins… A l’approche de la rentrée scolaire, c’est une véritable catastrophe sociale et économique pour ces populations-là. Il faut rapidement remédier à cela.
Si le gouvernement n’a pas les compétences requises pour trouver de quoi les poissons d’eau douce meurent à l’Ogooué et dans les lacs du Moyen-Ogooué, il gagnerait à tout mettre en œuvre pour fixer les populations en danger. Jouer la montre en pensant que le phénomène va s’arrêter de lui-même serait assimilable à un crime contre sa propre population.
Le gouvernement et, particulièrement, le ministre britannique des Eaux & Forêts gabonaises jouent gros.