Dans une démocratie, la paix est le gage du développement alors que la légitimité conditionne la paix et la stabilité. Dans une dictature, par contre, les armes et la violence aveugles sont le gage de la stabilité du régime. Toutefois, cette stabilité peut être remise en cause à tout moment, pourvu que les gouvernés, pardon, les oppressés, aient le courage de prendre conscience de leur état d’esclave et se donner la volonté de se libérer des liens de l’oppresseur.
Au Gabon, la dictature des Bongo, l’une des plus dures et des plus impitoyables en Afrique en ce moment, donne bien du fil à retordre au plus déterminé et au plus téméraire d’entre nous du fait que la moindre velléité de contestation et d’émancipation est sévèrement réprimée ; parfois dans le sang. Alors que si nous étions en démocratie, Ali Bongo aurait pris la latitude de consulter les partenaires sociaux ainsi que la classe politique pour leur expliquer la situation de fragilité du pays, demander des propositions de gestion ou de sortie de crise, ensuite, faire un grand discours solennel à la Nation afin d’expliquer au peuple la situation de précarité dans laquelle se trouve le pays et lui demander des sacrifices. Mais pour arriver à pareilles initiatives, il faut jouir de la légitimité populaire et avoir la confiance et la sympathie du peuple. Ce qui fait malheureusement et cruellement défaut au dictateur émergent. Il est conscient du rejet total dont il fait l’objet auprès des Gabonais au point qu’il vit très mal ce désamour et c’est en réalité cette frustration qui justifie sa violence et son caractère violent, indépendamment de ses origines supposées d’où vous savez. La preuve, ses proches disent qu’il a un minimum d’humanité en lui. Ce qui fait dire qu’il n’est pas foncièrement et totalement mauvais.
Toutefois, il a cru bon de se retrouver au mauvais moment au mauvais endroit. En voulant assouvir ses rêves d’enfance, l’enfant-roi a décidé d’usurper le pouvoir en marchant sur les cadavres des Gabonais. La malédiction du sang, pour les initiés, est la pire des malédictions, nous rappellent nos coutumes, mais aussi le livre judéo-chrétien qu’est la sainte Bible : « Et Dieu dit à Caïn qu’as-tu donc fait ? Le sang de ton frère Abel crie de la terre jusqu’à moi… »Pour avoir versé le sang de son frère Abel, Dieu avait maudit Caïn. Tous ceux qui versent impunément le sang sacré des autres sont maudits et par la nature et par le Dieu Tout-Puissant et Eternel. Dieu et les Gabonais auraient jugé Ali avec moins de sévérité s’il avait préservé la vie de ses compatriotes aux mains nues dont il a malheureusement abrégé les jours. Aujourd’hui, la maîtrise du pays commence à lui échapper et sa chute peut arriver à n’importe quel moment.
Un chef qui demande à sa population de se serrer la ceinture commence par montrer l’exemple lui-même. Or, Ali Bongo continue de dilapider l’argent du Gabon avec des voyages d’agrément à travers l’Afrique et le monde. Il semble qu’il était à « la coupe mondiale » en Russie. On l’aurait vu à Monaco, en Éthiopie, en Espagne, au Maroc… Le dictateur émergent ne se refuse aucune destination, surtout lorsque c’est le contribuable qui doit trinquer. En moins d’un mois, celui qui ne se souci guère des problèmes des Gabonais enchaine les destinations de croisière avec, comme toujours, une importante délégation, notamment ses proches. A peine avait-il instauré des mesures d’austérité iniques et esclavagistes aux agents publics qu’il avait sauté dans son avion, direction la Turquie pour rencontrer un autre dictateur qui venait, lui aussi ,de gagner une élection organisée de main de maître par lui-même, le Turc Recep Tayyip Erdogan. Un usurpateur ne peut rien faire de bon pour son pays ! Même les choses les plus simples sont de l’ordre de l’impossible pour lui.
En neuf ans, Ali Bongo a amassé énormément d’argent pour faire décoller le pays et en faire, comme il aime à le dire, « un pays émergent ». Neuf ans après, il se comporte comme quelqu’un qui vient d’hériter d’un pays pillé par ses anciens gestionnaires et que lui, voudrait redresser. Combien de kilomètres de routes bitumées en neuf ans ? Il n’est même pas arrivé à relier Libreville à la commune de Ntoum. En neuf ans, c’est péniblement qu’il est en train de vouloir boucler un petit tronçon long de moins de six kilomètres (PK 6 – PK 12). Qu’il nous dise combien de salles de classe il a construites, combien de parcelles de terrain viabilisées et vendues…
Nous n’avons rien contre Ali Bongo, mais s’il aime le Gabon, s’il a de l’amour pour ce pays qui lui a tout donné et qu’en retour lui et ses amis ont agréablement pillé, qu’il libère le pouvoir et demande pardon au peuple.
.