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Politique internationale/Afrique de l’ouest : L’étau militaire se resserre sur la démocratie

Pionnière des coups de force sur le continent, la région d’Afrique de l’ouest continue d’entretenir la tendance aujourd’hui avec l’interruption accomplie des processus démocratiques depuis plusieurs années dans au moins quatre pays. D’autres, comme la Guinée Bissau et la Sierra Leone, y ont échappé de justesse. Généralement arrivés au pouvoir pour y mettre l’ordre dans des institutions ballotées par des dictateurs civils au gré de leurs intérêts égoïstes, les militaires sont de plus en plus enclins à s’y accrocher, parfois à la demande des populations qui ne mesurent pas toujours la perversion des enjeux.

L’ancienne puissance coloniale y serait-elle pour quelque chose ? Nous ne saurions l’affirmer avec certitude. On peut, néanmoins, constater que la prise de conscience des forces armées dans la région d’Afrique de l’ouest se fait dans un contexte où l’ex-puissance colonisatrice et ses valets locaux ont fini de consommer le peu de crédit que leur accordaient encore les populations, relativement à leur capacité de veiller à leur sécurité. A défaut de pourvoir à leurs besoins basiques sur des territoires, tous, potentiellement, richement dotés par la nature. L’or, par exemple, abonde au Mali et au Burkina Faso. L’uranium et, dernièrement, le pétrole au Niger. La bauxite et tant d’autres ressources minières en Guinée Conakry. Autant de pays aujourd’hui sous le contrôle de juntes militaires de plus en plus en phase avec les populations malgré les épreuves et le dénuement.
Ces pays, victimes depuis plusieurs années de l’intrusion du phénomène djihadiste favorisé par la déstabilisation de la prospère Libye de feu Mouamar El Kadhafi, ont progressivement compris que la France et ses alliés occidentaux, qui ont détruit le pays phare de la libération africaine, venaient faire du combat contre le terrorisme en Afrique à l’ouest du continent, un véritable fonds de commerce en procédant, sous le couvert de missions proclamées nobles, à un véritable pillage des ressources des sols et sous-sols africains.
Première nation à en prendre conscience : le Mali du Cl Assimi Goïta, d’autant mieux au parfum du jeu de dupes qu’il était formé dans la filière du renseignement et des services spéciaux. Depuis sa prise de pouvoir, il y a bientôt quatre ans, son pays, en dépit des embargos téléguidés de la Cédéao, tient bon. Tellement fort que le pays a pu exiger et obtenir de la France que ses troupes armées quittent la région de Kidhal où elles se livraient plus à faire autre chose qu’à s’occuper de combattre les terroristes. Imposant même au Mali une partition de fait depuis plus d’une décennie. De sorte qu’aujourd’hui à Bamako, alors que la classe politique, parfois comptable ou complice des errements d’hier, crie à la confiscation du pouvoir par l’armée, les populations, elles, encouragent le Cl Assimi Goïta non seulement à prolonger la transition, au moins pour cinq ans encore, mais aussi à se porter candidat à la présidentielle le moment venu.
C’est pratiquement le même son de cloche qui est entendu non loin de là, au Burkina Faso, où celui qui est de plus en plus considéré comme l’héritier du capitaine Thomas Sankara vient d’organiser en une journée ce qu’il nous a fallu près d’un mois à asseoir : la nouvelle feuille de route de la transition. Ainsi, désormais à Ouagadougou, la transition pourra se prolonger, depuis la semaine dernière, de cinq autres années supplémentaires. Avec, en plus, tous les encouragements faits au capitaine Ibrahim Traoré pour briguer, lui aussi, le fauteuil présidentiel lorsque toutes les tâches de la transition auront été accomplies.
Quand il prend le pouvoir en juillet 2023, pratiquement un mois avant que le Gl de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema n’en fasse de même au Gabon, peu d’observateurs donnaient des chances réelle de survie à la junte dirigée par le Gl Abourahamane Thiani. Pour plusieurs raisons dont la principale était l’enclavement sévère du Niger et l’hostilité implacable de la France et de ses hommes aux ordres alors au pouvoir à Abidjan, Cotonou et Dakar. Il y avait aussi le puissant voisin nigérian qui jouait les gros bras pour faire plier de force des Nigériens tout de même souverains dans leur propre pays.
Malgré les sanctions et les privations injustement imposées par la Cédéao, les Nigériens ont fait bloc autour de leurs militaires et obtenu non seulement que l’ambassadeur de France à Niamey quitte définitivement le pays, mais aussi que les 1 500 soldats français qui stationnaient dans le pays regagnent la France ou s’en aillent ailleurs. Ce qui est chose faite.
Aujourd’hui, c’est au contingent américain à qui il est demandé de quitter le sol nigérien. Ce que s’apprêteraient à faire les compatriotes armés du président Joe Biden, déjà informés que les Russes pourraient bien venir prendre bientôt leurs places. Pendant ce temps, au Niger, personne, au sein des populations longtemps asservies, ne semble se préoccuper de la transition et de sa durée en vue d’un retour à une administration civile qui a montré toutes ses limites ces dernières années.
En Guinée Conakry, venu mettre fin au régime autocratique de l’ancien opposant Alpha Condé, le Gl Mahamadi Doumbouya semble regarder de haut une classe politique qui veut l’enjoindre, lui, le militaire, à passer la main le plus rapidement possible à un pouvoir civil issu des élections. Des politiciens à qui le civil Alpha Condé en a fait voir de toutes les couleurs. Jusqu’à s’autoriser à briguer et à consommer un troisième mandat auquel il n’avait constitutionnellement pas droit. L’ancien chef de l’Etat civil, qui n’a pas pu faire organiser, contre le régime du capitaine Dadis Camara, le procès des évènements du 28 septembre dont les verdicts seront bientôt connus.

Ngale Beghl’Ango

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