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J’accuse

Tribune libre de Guy Nang Bekale

L’actualité politique nationale est caractérisée par plusieurs problématiques contradictoires. Au sommet de celles-ci se trouve la violation de la loi, en particulier la violation de la Constitution, qui est la loi suprême, par la Cour constitutionnelle qui est sa garante. Ce viol n’est pas nouveau. La Cour est coutumière du fait. Elle le fait impunément et avec une certaine délectation depuis des décennies, sous la présidence de la même femme qui devient son incarnation. Tous les membres de la Cour font montre d’une légèreté plus que blâmable en prenant des décisions iniques à l’unanimité. Ce sont eux la source et les responsables des troubles, des meurtres et du désordre en cours au Gabon depuis sa création. C’est la Cour constitutionnelle qui, en complicité et sous la dictée des forces françafricaines, empêche le peuple gabonais d’exercer son pouvoir de souverain en falsifiant ses choix électoraux. C’est la Cour qui déclare les faux résultats des votes à la place des vrais. C’est elle qui nargue les électeurs et agresse les honnêtes citoyens. C’est elle le mal gabonais et la « prostituée » de la République gabonaise. La loi, le droit, la justice et la vérité sont des noms communs des valeurs qui vont ensemble.
Dans les actes conflictuels qui relèvent de la loi, la vérité doit se mettre au service du droit pour aboutir à la justice. Le débat actuel qui se focalise sur l’article 13 de la Constitution n’est que partiellement et incomplètement posé et abordé. Au regard de la réclamation et de l’exigence du respect de la loi, l’on doit intégrer les tricheries et autres manquements qui ont émaillé les élections présidentielles au Gabon depuis 1993 et dont la « victoire d’Ali » est porteuse.
Ali Bongo n’a pas été élu président par le peuple gabonais, il a été nommé par une poignée de compatriotes soucieux de maintenir un vieillot système de domination et de préserver les avantages qu’il leur procure pour mener une vie aisée au détriment de la majorité des Gabonais. Désormais, il y a un préalable pour mettre fin à la crise actuelle et pour réinstaller le Gabon dans la paix et le calme : c’est de restituer au peuple sa souveraineté. Sans le respect de cette exigence, point de tranquillité et de réconciliation nationale. Cette responsabilité incombe à la Cour constitutionnelle qui est l’institution qui détient et exerce le pouvoir au Gabon depuis le dialogue gouvernemental d’Angondjé.
Si la Cour ne peut pas s’exécuter par sa propre volonté, il faut la contraindre par des actions revendicatives de masse. En cas d’échec, il faut faire appel aux institutions supra nationales auxquelles le Gabon est membre par les accords et conventions. Pour le renouveau du Gabon, il faut réformer et réorganiser la totalité des administrations qui ont en charge la régulation de la vie publique de la nation, la recherche et l’établissement de la vérité, l’arbitrage des crises et conflits et l’application des sanctions issues des décisions des juges. La Cour constitutionnelle a perdu toute crédibilité et, à ce titre, elle s’est auto-disqualifiée pour gérer une élection au Gabon. Aucun honnête ami et aucun compatriote amoureux du Gabon ne peut plus faire confiance à cette institution qui a démontré à plusieurs reprises son penchant pour le régime Bongo-PDG. Indiscutablement et objectivement, la Cour a accaparé le pouvoir et la place de souverain qui sont dévolus au peuple. Elle se comporte en créatrice des institutions républicaines. A la place du suffrage universel exprimé par les citoyens pour élire leur président, elle a mis la nomination prononcée par 9 juges dirigés de main de maître par une femme à l’allure de donzelle dont l’élégance et la dévotion cachent une excessive méchanceté. Audacieuse, déterminée, effrontée et téméraire, elle ne recule devant aucune occasion pour tordre le cou à la loi pour conserver des intérêts privés au détriment de l’intérêt général.
La Cour constitutionnelle, dans sa configuration actuelle, n’a pas de place dans la mise en place de la nouvelle République et, avec elle, les autres organismes administratifs chargés de la gestion des processus électoraux. Non seulement la Cour s’est substituée au peuple des électeurs habilités à donner un chef d’Etat au pays, mais en plus, elle est devenue la parfaite doublure du président de la République, allant jusqu’à donner des « ». Plus grave encore, elle se transforme en législateur pour modifier la loi fondamentale et l’appliquer à sa guise. Sa surprenante décision qui a consisté à autoriser le vice-président de la République à agir en lieu et place d’Ali équivaut à la signature présidentielle… Cette décision, prise nuitamment dans la précipitation, prouve que la Cour constitutionnelle agit à la fois par elle-même, mais aussi parfois par procuration sous la dictée d’un gourou de la politique et de la finance tapi dans l’ombre et veillant sur leurs intérêts partagés. La Cour fait tout pour que le pouvoir d’Etat ne soit pas occupé par un compatriote n’appartenant pas au système Bongo-PDG.
Dans une société gabonaise où la majorité des personnalités publiques se côtoient depuis longtemps, Madame la présidente de la Cour et ses comparses « surfent » sur la parfaite connaissance qu’elle a des limites, des défauts, du niveau de détermination et d’engagement des ténors et leaders de l’opposition gabonaise dans leur lutte politique pour le changement et l’alternance. Tous les anciens collaborateurs d’Omar Bongo « se tiennent par la barbichette ». Il y en a qui ont servi le PDG par amitié, par affinités familiales, ethniques et provinciales, par intérêts, par devoir, par la nécessité de vivre ou par envie d’enrichissement… D’autres y étaient à contre-cœur, souffrant en silence pour des maux subis par eux-mêmes ou par les gens de leur parentèle. Il y avait toutes ces catégories de citoyens dans le parti unique et aux côtés d’Omar. 3M les connaît et s’en sert pour leur en s’imposer et pour défier les Gabonais. Quelques-uns de ces citoyens sont encore vivants. Aujourd’hui, les plus emblématiques sont membres ou leaders des partis de l’opposition. Parmi eux, certains honnêtes caciques qui ont résolument et sincèrement pris parti pour le changement et l’alternance en affichant leur volonté de développer le Gabon.
Après la victoire refusée à Mba Obame en 2009, nous sommes face aux manœuvres de la Cour constitutionnelle qui s’évertue à barrer le chemin du pouvoir à Ping Jean, le candidat élu président de la République Gabonaise en 2016. L’entrée dans la nouvelle République qu’il appelle de ses vœux doit se faire avec toutes les Gabonaises et tous les Gabonais épris de justice, de vérité et de progrès. C’est en cela que, le 3 novembre dernier, il a invité le peuple gabonais à un rassemblement patriotique. Paul Mba Abessole et Pierre Mamboundou, opposants de souche, ont été les personnalités politiques les plus populaires après la Conférence nationale au début des années 90. Ils ont été élus président du Gabon par les populations. Mais l’accès au pouvoir leur a été interdit par décrets arbitraires de la Cour constitutionnelle statuant à l’unanimité de ses membres. Au début des années 2000, quatre anciens PDGistes, passés dans l’opposition, ont porté l’espoir du peuple : Casimir Oye Mba, André Mba Obame, Jean Ping et Jean Eyeghe Ndong. Les deux derniers sont actuellement les hommes politiques les plus populaires du Gabon. Seront-ils capables de mobiliser le peuple pour d’affronter la Cour constitutionnelle et permettre la naissance de la nouvelle République ? Sans la mobilisation du peuple, l’opposition politique ne peut pas défaire le système machiavélique mis en place par Omar et ses parrains occidentaux.
Esseulé, le paisible peuple gabonais souffre dans sa lutte pour mettre fin au pouvoir PDG-Bongo et compagnie. Le déficit d’esprit patriotique et de détermination dans la lutte démocratique populaire de nombreux citoyens explique en grande partie les échecs de l’alternance au Gabon. Le blocage du Gabon est aussi le fait des forces de l’ordre qui ne comprennent pas, ou très peu, pourquoi l’opposition préconise le changement pour tous. Leurs comportements belliqueux les éloignent des populations en provoquant chez ces dernières des sentiments d’incompréhension, de mépris, voire de haine. Le peuple gabonais est agressé au quotidien par les autorités étatiques civiles et militaires. La nouvelle République, dont l’accouchement sera forcément douloureux, doit être porteuse d’une amélioration significative de l’organisation du cadre et des conditions de vie des populations pour les mettre « à l’abri de la peur et a l’abri du besoin ». Peut-on savoir pour quelles raisons la Cour tarde-t-elle à prononcer la vacance du pouvoir ? A-t-elle des difficultés à trouver son candidat à la présidentielle en cas d’application de l’article 13 ? Peut-elle franchir la ligne rouge en proclamant sa présidente vainqueur si elle est candidate pour légaliser la fonction de chef de l’Etat qu’elle exerce déjà de fait ? Si, dans les jours à venir, la Cour décide d’organiser une élection présidentielle, c’est qu’elle aura trouvé son candidat et qu’elle mettra tout en branle pour le faire gagner. Plus encore, si ce candidat est la présidente de la Cour constitutionnelle. En cas de concrétisation de cette hypothèse : bonjour les dégâts !
De même, si, dans un bref avenir, une présidentielle est organisée, nous parions que le peuple obligera Jean Ping à y participer. Et qu’on ne nous parle pas de limite d’âge et autres finasseries. Quel compatriote peut le battre dans un scrutin transparent ? Tous les potentiels leaders des partis de l’opposition qui se sont présentés aux dernières législatives ont échoué. Constatons que les compatriotes de toutes les localités du Gabon réagissent favorablement à l’appel au rassemblement lancé par Jean Ping le 3 novembre dernier. Des délégations provinciales se forment pour rencontrer et échanger avec le président élu de la République gabonaise. Le mercredi 28 novembre, une délégation de la coordination de la Coalition pour la nouvelle République (CNR) de la province du Moyen-Ogooué à été reçue par le président Jean Ping. J’y étais.

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